Depuis le début des années 1990, la classe des bisphosphonate s'est enrichie et nous disposons aujourd'hui de plusieurs molécules efficaces dans le traitement de l'ostéoporose. Ces traitements qui permettent de réduire de moitié l'incidence des fractures, essentiellement vertébrales et du col fémoral, constituent une arme efficace contre la catastrophe de santé publique qui s'annonce dans les années qui viennent. En effet, du fait de l'allongement de l'espérance de vie, l'accroissement de la fréquence de ces fractures ostéoporotiques apparaît inéluctable, dont le coût direct sera multiplié par 3 ou 4 dans un avenir proche. Or, actuellement, en France, l'ostéoporose représente déjà une dépense d'un million d'euros par an.
Parmi les traitements disponibles, l'étidronate constitue le chef de file historique des bisphosphonates. Il est doté d'une excellente tolérance, mais d'une efficacité limitée. Il reste encore la première molécule de cette classe prescrite par les médecins généralistes. Développés ultérieurement, l'alendronate et le risédronate offrent une efficacité rapide et prolongée bien démontrée dans les essais thérapeutiques et l'expérience née de l'emploi de ces molécules. Nous disposons également du raloxifène, modulateur sélectif des récepteurs aux estrogènes, qui prévient l'ostéoporose, améliore le profil lipidique et réduit le risque de cancer du sein. Des molécules sont également en cours d'enregistrement : le ranélate de strontium (agent découplant qui augmente la formation et la résorption osseuses) et la parathormone (puissant anabolisant osseux en injection quotidienne). Le traitement de l'ostéoporose ne saurait cependant se limiter à une prescription médicamenteuse qui, même si elle a prouvé son efficacité, doit s'intégrer dans une prise en charge plus globale. Une intervention nutritionnelle est de fait souvent nécessaire, notamment pour les patients institutionnalisés chez lesquels l'apport de calcium et de vitamine D a démontré un bénéfice. Le traitement physique est également essentiel pour maintenir la masse musculaire et éviter les chutes par un travail proprioceptif adapté : le patient doit pouvoir se coucher sur le sol et se relever seul. Selon le Pr G. Weryha (Nancy), l'ostéoporose, « maladie à déterminisme pédiatrique et expression gériatrique » doit, par ailleurs, être l'objet d'une stratégie préventive beaucoup plus large. Chez l'enfant et l'adolescent, la surveillance de l'acquisition d'un capital osseux satisfaisant grâce à des apports calciques suffisants et à une activité physique minimale est aussi le premier pas de cette démarche préventive. La prise en compte de certains désordres métaboliques, tel l'hypogonadisme, ou de l'effet négatif de certains médicaments, comme les corticoïdes, est également capitale. Chez la femme, après la ménopause, la vigilance doit bien sûr être majeure, non seulement en raison des modifications hormonales mais aussi du fait de l'abandon médical des femmes qui, à partir de l'âge de 50 ans et jusqu'à celui de l'éclosion des grandes pathologies neurologiques, cardio-vasculaires, tumorales et métaboliques sont pénalisées par une « fenêtre thérapeutique » délétère. Pourtant, c'est dans cet intervalle que des mesures préventives et curatives permettraient d'éviter le développement de complications ultérieures. En matière de déminéralisation ostéoporotique, ce préalable se heurte cependant à deux difficultés : le non-remboursement de l'ostéodensitométrie dont la prescription n'est ainsi souvent effectuée qu'à la demande de la patiente ; le remboursement des traitements efficaces qu'une fois survenue la première fracture.
Une optimisation de la prise en charge grâce aux filières de soins
C'est donc tout l'enjeu de la mise en place des filières de soins, comme celle existant en Lorraine (pour la Qualité de l'Os en Lorraine) dont les objectifs sont, grâce à une sensibilisation de la population générale et des médecins, d'offrir à la majorité des patients la possibilité d'une prise en charge pluridisciplinaire et systématisée de l'ostéoporose avant l'heure de la fracture. Cette démarche s'inscrit ainsi pour le praticien dans une vision à long terme, en laissant de côté toute attitude fataliste ou négative. En tant qu' « avocat de son malade, le médecin généraliste doit être définitivement convaincu que l'ostéoporose est une pathologie dégénérative face à laquelle il dispose maintenant de moyens d'intervention thérapeutiques efficaces et qu'il est capital de mettre en uvre précocement ».
D'après un entretien avec le Pr Georges Weryha (endocrinologie, Nancy).
Campus parrainé par les Laboratoires MSD.
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