Deux méthodes testées chez le rat et la souris

L'orexine contre la narcolepsie-cataplexie

Publié le 15/03/2004
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DEPUIS le travail mené par le Dr Emmanuel Mignot (Boston) sur son labrador narcolepsique, on sait que cette pathologie est liée à un mauvais fonctionnement des voies de signalisation médiées par des neuropeptides spécifiques : les orexines, encore appelées hypocrétines. Les deux orexines actuellement connues, les orexines A et B, proviennent du clivage d'un polypeptide précurseur commun, le prépro-orexine, qui est produit par une population de neurones spécifiques localisés dans la région préfornicale latérale de l'hypothalamus. Ces neurones innervent de façon très spécifique des noyaux de la base et de l'hypothalamus impliqués dans la régulation de la vigilance et du sommeil. L'administration intraventriculaire des orexines dans des modèles de souris et de rats atteints de narcolepsie-cataplexie permet de majorer la durée des périodes de vigilance et de supprimer des phases de sommeil REM (Rapid Eye Movement : mouvements oculaire rapides) et non REM. Si, chez le labrador, la plupart des narcolepsies sont en rapport avec l'absence de récepteurs spécifiques à l'orexine, chez l'homme il semblerait qu'elles puissent être liées à deux grand phénomènes : soit une inactivation du gène de la prépro-orexine, soit à une apoptose, d'origine inconnue, des neurones à orexine.
De fait, les taux d'orexine A, un agoniste non sélectif des deux types de récepteurs à l'orexine déjà découverts, présents chez plus de 95 % des humains atteints par la maladie, sont très faibles, voire indétectables. Jusqu'à présent, les seuls traitements disponibles dans cette maladie sont purement palliatifs (caféine, amphétamines, modafinil).
Partant de ces constats, des chercheurs texans ont mis en place une étude sur un modèle murin de narcolepsie-cataplexie (inactivation du transgène de la prépro-orexine) et ils ont testé les capacités de deux méthodes distinctes (lune génétique, l'autre pharmacologique) à rétablir un cycle vigilance/sommeil normal. La première des méthodes consistait dans l'introduction du transgène de la prépro-orexine au sein des neurones du ventricule latéral par méthode stéréotaxique afin de restaurer une sécrétion ectopique d'orexines. La seconde approche passait par l'injection directe intraventriculaire d'orexine A synthétique. Dans les deux cas, les chercheurs ont obtenu des résultats positifs à la fois sur la vigilance et sur la durée du sommeil REM et non REM. L'expression ectopique du transgène de la prépro-orexine a permis de prévenir de façon complète les attaques de narcolepsie et l'ensemble des anomalies du sommeil dans le modèle animal de souris dépourvues de neurones à orexine.

Majoration de la vigilance.

L'injection intraventriculaire d'orexine A a, pour sa part, supprimé les endormissement et a majoré la vigilance pour une durée de trois heures. Mais, contrairement aux traitements utilisés jusqu'à présent dans cette pathologie, l'administration d'orexine ne s'est pas accompagnée d'une nécessité d'un effet rebond.
Pour les auteurs, « ces techniques pourraient être utilisées chez l'homme, mais il reste encore à déterminer le niveau des doses à utiliser afin de ne pas influer de façon négative sur le rythme vigilance/sommeil physiologique. Elles pourraient aussi, à l'avenir, être proposées dans d'autres pathologies telles que l'hypersomnie idiopathique. Enfin, l'utilisation de l'orexine A synthétique dans des situations de privation de sommeil devrait être aussi proposée ».

« Proc Natl Acad Sci USA », à paraître sur pnas.org

> Dr ISABELLE CATALA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7499