L'ORDRE VEUT prendre la main sur le dossier des études médicales. Après l'Académie de médecine (1), la commission Thuillez (2) et la Conférence des doyens, le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom) formule plusieurs propositions pour réformer les études médicales. La réflexion menée depuis deux ans par le Pr Claude-François Degos, le Pr Jacques Roland, président du Cnom, et le Dr Xavier Deau, président de la section formation médicale et qualification au Cnom, est compilée dans un rapport de 25 pages. «Plusieurs éléments ont conduit l'Ordre à se pencher sur ce sujet, explique le Dr Deau : la réflexion autour du cursus européen du licence master doctorat ( LMD) et les problèmes démographiques que va rencontrer le pays.» Comme dans les précédents travaux menés par les académiciens et les doyens, l'Ordre prône une refonte complète de la première année de médecine. «Le Cnom ne veut plus de la sélection par l'échec induit par le numerus clausus, indique le Dr Deau. Nous avons tous connu chez nos amis, dans nos familles, les dégâts causés par le concours de première année. Il nous paraît aujourd'hui plus logique de faire une sélection en fin de terminale.»
Ne seraient admis à présenter leur dossier à l'inscription en faculté de médecine que les candidats ayant des notes minima en philosophie, en mathématiques et en sciences de la vie, et dans une quatrième matière choisie par l'étudiant. Les candidats seraient dans un second temps auditionnés par un jury qui testerait leur motivation et leur aptitude à une carrière de santé. Cet entretien aurait le mérite, selon les auteurs du rapport, «de dissuader certains de se lancer dans une carrière avec des chances réduites de réussite». Cette proposition d'entretien préalable, déjà formulée par les doyens, a toujours été rejetée par l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), qui souhaite que les études de santé restent accessibles à tous, en dépit du fort taux d'échec au concours de Pcem1. «C'est hypocrite, car ce barrage existe déjà avec le concours de première année, qui fait perdre un ou deux ans à des étudiants», estime le Pr Claude-François Degos. Le Pcem1 pourrait donc se dérouler sans concours et deviendrait ainsi une «année purement médicale». L'Ordre estime que 8 000 étudiants devraient être autorisés à passer en seconde année contre 7 100 cette année.
Le Cnom désapprouve l'adaptation des études médicales au cursus européen du LMD avec des cycles de trois, cinq et huit ans. Il souhaite en effet maintenir la durée de six ans des deux premiers cycles de formation. «La directive européenne 2005-36 précise que six années d'études sont nécessaires pour acquérir la formation de base en médecine. Il n'est pas question de faire un nivellement par le bas en acceptant d'amputer d'un an les études médicales pour les intégrer au LMD», explique le Dr Deau.
Les ECN en ligne de mire.
L'Ordre est également très attentif au contenu des stages effectués pendant le deuxième cycle. Il lui paraît essentiel que les étudiants commencent les stages dès la quatrième année et que ces stages soient mieux encadrés, protocolisés, avec des objectifs individuels validés par la commission pédagogique de l'UFR. «Le stage est un compagnonnage qui doit permettre à l'étudiant de se frotter aux malades et au raisonnement médical», estime le Pr Degos. Comme plusieurs spécialistes des études médicales avant eux, les auteurs du rapport prennent position contre les épreuves classantes nationales (ECN). «Le bachotage de ce concours conduit la plupart des facultés à sacrifier peu ou prou l'année de Dcem4, tant pour les enseignements théoriques que pour les stages», constatent-ils. Le Cnom propose que les ECN prennent en compte 50 % des notes obtenues pendant l'année et 50 % des notes obtenues aux épreuves pour valoriser les cursus dans les facultés. «Les ECN ont renforcé l'inégale répartition des médecins sur le territoire, affirme le Dr Deau. La formation des médecins doit davantage correspondre aux besoins de santé publique sur le territoire.» Le Cnom a remis son rapport aux ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur. Reste à savoir ce que le gouvernement en retiendra.
(1) Rapport sur l'intégration des études médicales au cursus LMD (24 janvier 2006).
(2) Rapport sur l'intégration des professions médicales et pharmaceutiques au LMD (août 2006).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature