DE NOMBREUX «facteurs intrinsèques», voire comportementaux ou environnementaux, comme les médicaments et les maladies altérant les fonctions sensitives, cognitives ou motrices, favorisent la chute. La personne âgée fragile à domicile, ou dépendante en institution, est particulièrement concernée. Chaque année, quelque 9 000 décès de personnes de plus de 65 ans sont liés à une chute.
Lorsque le fait de tomber est responsable de fracture, cela touche surtout l’extrémité du fémur, indirectement à l’origine d’une mortalité élevée dans les mois qui suivent. Indépendamment du risque fracturaire, l’impact psychologique devient parfois majeur. «Le syndrome postchute se caractérise par une désadaptation psychomotrice, une réduction spontanée de l’activité, et des troubles posturaux (rétropulsion) et de la marche.» Pour y faire face, la Société française de documentation et de recherche en médecine générale a élaboré une série de recommandations dans le cadre d’un partenariat avec la Haute Autorité de santé (HAS)*.
Les chutes dues à une perte de connaissance, à la survenue d’un accident vasculaire cérébral et à des «accidents extrinsèques importants» ne sont pas prises en compte, et les situations pathologiques n’interviennent que pour le risque de faux pas qu’elles peuvent engendrer.
Repérage et évaluation.
La prévention primaire repose sur le repérage du risque, souligne la HAS. Le médecin devrait demander à toute personne âgée, si besoin à son entourage, quel que soit le motif de la consultation, si elle a chuté durant l’année précédente et dans quelles conditions.
On sait que le risque de traumatisme consécutif à la chute est plus élevé chez les femmes de race blanche et de faible poids et, en général, en cas de pathologies fragilisant l’os, altérant la vision et la marche, ou en cas de polypathologie chronique. Il faut donc améliorer la prise en charge de ces problèmes de santé et réduire la polymédication. Il n’est pas réaliste de s’appuyer sur des mesures standards de prévention, «elles doivent toujours être personnalisées». Quelques tests simples, systématiques, au cours du colloque singulier, serviront à confirmer l’absence de risque. Ils sont indispensables lors d’une chute signalée ou en présence de facteurs de risque. Le patient doit se lever d’un siège, faire environ trois mètres, tourner et revenir s’asseoir sans aide humaine. Le déficit de mobilité commence au-delà de vingt secondes et est jugé important à partir de vingt-neuf secondes. Le sujet est appelé aussi à se tenir sur une jambe au moins cinq secondes et à exercer une poussée sternale, un déséquilibre étant prédictif de chute. Enfin, le praticien posera une question sur un thème quelconque de manière à voir si la personne âgée s’arrête de marcher, comme le font les patients fragiles dans de telles circonstances.
Si les tests se révèlent positifs, une évaluation multifactorielle et interdisciplinaire semble nécessaire. Avec une femme en bonne santé vivant à domicile, la stratégie à déployer consistera à encourager à poursuivre l’activité physique et à développer des programmes de rééducation adaptés. Avec quelqu’un de vulnérable, à domicile ou en hébergement, un apprentissage du relever pourra être envisagé ainsi qu’un aménagement de l’habitat (système de téléalarme). Pour les résidants dépendants en foyer, la prise en charge des polypathologies, spécialement les démences de type Alzheimer, est à prévoir, de même qu’une remise en question des contentions. Dans tous les cas, la correction des déficits neuro-sensoriels, un chaussage et des soins de pied appropriés, des conseils nutritionnels, des mesures préventives et/ou curatives de l’ostéoporose, et une recherche de facteurs de risque iatrogènes s’imposent.
Interventions.
En présence de facteurs de risque ou d’antécédents de chute, la HAS juge impérative une rééducation-réadaptation visant les muscles porteurs, l’équilibre, la marche, l’apprentissage de cannes ou de déambulateur, l’aménagement des dangers du domicile, la correction des troubles visuels et le toilettage des ordonnances de psychotropes. Trois situations réclament des dispositions spécifiques : chez les plus de 80 ans, une supplémentation vitaminique avec au moins 800 UI par jour de cholécalciférol (ou 100 000 UI tous les quatre mois), ou par calcitrol en cas d’insuffisance rénale ; pour les sujets à risque élevé de chute en établissements spécialisés, des programmes éducatifs intégrés aux interventions multifactorielles en groupe ; et en ce qui concerne les femmes et les hommes sujets à une fracture de hanche, des protections de hanche.
Au total, la Haute Autorité de santé insiste sur la mise en place d’actions préventives, fondées sur une reprise ou une accentuation de l’activité physique dans des cadres collectifs ludiques, des démarches pilotes locales en partenariat avec des réseaux gérontologiques, et une recherche évaluant l’efficacité des opérations sur la morbi-mortalité et les problèmes de coûts-efficacité.
* Les recommandations peuvent être consultées et téléchargées sur le site www.has-sante.fr.
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