L'ONCOPLASTIE mammaire deviendra-t-elle une technique de référence dans la prise en charge des cancers du sein dans un proche avenir ? «Cette nouvelle technique chirurgicale, fruit d'une collaboration entre chirurgiens oncologiques et plasticiens, intègre d'emblée l'incision cutanée, la résection glandulaire réglée, le remodelage du sein et le repositionnement aréolaire», explique au « Quotidien » le Pr Philippe Rouanet (Montpellier). Elle est actuellement proposée sur des tumeurs de taille limitée lorsque le risque de mastectomie est important : tumeur multifocale, cancer intracanalaire localisé ou diffus, cancer invasif à composante intracanalaire extensive ou sans composante intracanalaire et cancer invasif localement évolué.
Cancers de moins de 3 cm.
Des essais préliminaires prospectifs randomisés avaient déjà prouvé l'intérêt de cette technique conservatrice sur des cancers insitu et des cancers infiltrants de moins de 3 cm. Pour que les objectifs carcinologiques du traitement soient respectés, il est indispensable de réaliser une exérèse macroscopique de la tumeur avec résection en marges saines. Pour répondre à la question des indications chirurgicales, l'équipe du Pr Rouanet a mis en place une étude pilote sur une série de 133 patientes consécutives, prises en charge au CRLC Val-d'Aurelle de Montpellier entre 2001 et 2007. L'âge moyen des femmes s'établissait à 51 ans, leur tour de poitrine était de 95 cm. Au moment du diagnostic, 40 % des femmes étaient classées T0 ; 17 % T1 ; 30 % T2 et 13 % T3. La taille moyenne de la tumeur était de 21,5 mm (de 2 à 55 mm) et 40 % d'entre elles correspondaient à des carcinomes intracanalaires. En moyenne, quatre femmes sur dix avaient été traitées par chimiothérapie en préopératoire.
L'intervention avait consisté en une oncoplastie mammaire pure pour 54 % des femmes, les autres avaient bénéficié de gestes associés tels qu'un curage ganglionnaire. Les pièces opératoires pesaient en moyenne 160 g (de 40 à 490 g) et la durée moyenne des interventions s'établissait à 84 minutes. Plus de 82 % des résections ont eu lieu en marge saine, dont 45 avec une marge de plus de 3 mm. Les patientes ont été hospitalisées 3,8 jours et la plupart d'entre elles ont aussi été traitées par radiothérapie. Une femme sur cinq a dû être réopérée : deux pour complications et les autres en raison de marges thérapeutiques insuffisantes. La seconde intervention consistait généralement en une mastectomie totale (16 femmes), six tumorectomies et deux nouvelles oncoplasties mammaires ont aussi été pratiquées.
Après un suivi moyen de 33 mois, deux femmes sont décédées de leur pathologie carcinologique, cinq ont présenté des récidives locales et douze ont dû être traitées pour des métastases. Dans le sous-groupe des femmes qui avaient subi une chimiothérapie d'induction, les tumeurs mesuraient en moyenne 33 mm, elles pesaient 173 g, 78 % des interventions ont été réalisées en marges saines et seulement 12 % des patientes ont dû être réopérées.
Évaluation du ressenti esthétique.
L'équipe a ensuite réalisé une évaluation par téléphone du ressenti esthétique des patientes à distance de l'intervention et des traitements complémentaires par radiothérapie. Globalement, 70 % d'entre elles considéraient que le résultat esthétique était favorable et seulement 13 % considéraient que l'intervention était un échec du point de vue esthétique. Elles étaient néanmoins 38 % à souhaiter une nouvelle intervention plastique sur le sein déjà opéré. Près de la moitié des patientes se plaignaient du manque d'information avant l'intervention et, en particulier, trouvaient que le risque de réintervention en cas de marges non saines n'avait pas été assez exposé. Enfin, si 75 % d'entre elles n'avaient pas d'appréhension précise à avoir conservé leur sein, elles étaient quand même 60 % à se poser des questions sur le suivi oncologique.
D'après un entretien avec le Pr Philippe Rouanet, chirurgien oncologique au CRLC Val-d'Aurelle à Montpellier.
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