Décision Santé. Comment expliquez-vous une telle profusion d’hématologues à la tête des institutions ?
Jean-Luc Harousseau. C’est vrai nous sommes nombreux. Gérard Tobelem dirige l’établissement français du sang, Dominique Maraninchi l’Afssaps, Josy Reiffers la FFCLCC, Agnès Buzyn à l’Inca. Il faut préciser que nous avons été formés par un grand homme, le professeur Jean Bernard, qui a eu à cœur de nous enseigner d’autres matières que la médecine pure. Grand humaniste, il nous a ouvert l’esprit à la philosophie, le social, l’éthique. Par ailleurs, l’hématologie est une discipline qui a beaucoup progressé en peu de temps. Par exemple, je suis très vite, à l’âge de 32 ans, passé professeur et chef de service à l’âge de 36 ans. Nous avons très tôt endossé de grandes responsabilités.
D. S. Comment se situe l’évaluation de la qualité en France, comparée à d’autres pays en Europe ?
J.- L. H. En Europe, les systèmes mis en place pour évaluer la qualité sont à géométrie variable. Il faut ajouter qu’il y a malgré tout une mise en commun en ce qui concerne le médicament, via l’EMEA (Agence européenne du médicament), au sujet des autorisations de mise sur le marché. Nous progressons également en matière de vigilance. Mais il est clair que l’on ne peut pas comparer le Nice et la HAS, même si nous ressentons tous le besoin de travailler ensemble. Néanmoins, je tiens à souligner que nos démarches convergent. Ainsi, l’agence allemande, à l’instar de la HAS, a mis en place un système d’évaluation du bénéfice thérapeutique, sur le modèle de la commission de la transparence de la HAS. Il y a une réelle volonté politique d’harmoniser les différents systèmes. Au niveau européen, par exemple, la France tente d’harmoniser la prise en charge de la maladie d’Alzheimer.
D. S. Comment déterminer l’avantage thérapeutique d’un médicament ?
J.- L. H. Il faut, à mon avis, sans cesse jauger l’évolution bénéfice/risque. Cette évaluation doit être faite dès l’autorisation de mise sur le marché (AMM) et réévaluée périodiquement. Ce travail est du ressort de l’Afssaps. Mais il faut ensuite comprendre la manière dont un médicament s’intègre dans une stratégie thérapeutique. C’est à la HAS de mener ce travail, en s’appuyant sur le service médical rendu (SMR). Pour ma part, je milite pour la création d’un seul index, qui intégrerait différentes variables, comme le bénéfice/risques, la santé publique, etc. Cet index pourrait être utilisé à la fois par l’assurance maladie, pour déterminer la part de remboursement, et le CEPS, pour fixer le prix.
Nous avons par ailleurs édité à la HAS une fiche sur les stratégies thérapeutiques non médicamenteuses. Dans certains cas en effet, on peut ne pas prescrire de médicaments, mais plutôt agir sur un changement des règles de vie du patient. Mais l’on s’aperçoit que l’on est confronté à de nombreux freins, culturels par exemple : le patient attend du médecin une ordonnance. Mais aussi économiques : il est plus facile, et plus rapide, pour un médecin, de prescrire un traitement médicamenteux, que de le convaincre de modifier son mode de vie.
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