par Bernard Kouchner
« LA SANTÉ n’est pas divisible entre les nations, elle doit être un bien partagé par tous. Aux yeux des fondateurs de l’OMS en 1946, cette phrase pourrait sonner comme une évidence. Mais au travers de mon expérience du terrain, au plus près des populations dans le besoin, et de mes fonctions de ministre de la Santé et de chef de la mission des Nations unies au Kosovo, j’ai trop souvent éprouvé combien la réalité était autre. Plus que jamais aujourd’hui, l’exigence d’une solidarité globale et la nécessité de répondre aux risques sanitaires transfrontaliers s’imposent. Plus que jamais nous avons besoin d’un lieu qui puisse promouvoir une vision globale et opérationnelle de la santé publique.
Dans le droit fil des Objectifs du millénaire pour le développement, l’OMS doit placer la santé au coeur des préoccupations des gouvernements, en particulier dans le cadre de la lutte contre la pauvreté et la défense des droits de l’homme. Ce qui implique de réaffirmer sa place dans le système des Nations unies.
C’est cette vision d’une OMS au service d’une mondialisation positive que je souhaite relayer en me portant candidat au poste de directeur général. Pour assurer cette mission si je suis élu, je me fixe trois grands objectifs, fondés sur les résolutions adoptées par l’Organisation au cours des dernières années et dans la continuité de l’action menée par le Dr Lee. Pour les mettre en oeuvre, je compte mobiliser tous les moyens nécessaires et positionner l’OMS comme agent de coalition des moyens.
Il faut en premier lieu renforcer l’appui de l’organisation à la mise sur pied de systèmes nationaux et internationaux de santé efficaces et pérennes qui permettent l’accès de tous aux soins et la mise en oeuvre de politiques de santé publique opérationnelles. L’OMS, en tant que meneur mondial en matière de santé publique, doit proposer les fondations de tels systèmes et aider à leur fonctionnement : fournir des solutions à la question de la pénurie des personnels de santé et du financement des systèmes de santé, favoriser la coordination et les partenariats entre les nombreux acteurs de la santé, faciliter la transition vers une couverture maladie universelle, assister les Etats membres dans le renforcement des capacités nationales de surveillance et de gestion des risques de santé publique.
Il faut en second lieu mettre en mesure l’OMS de fournir des réponses ambitieuses et innovantes aux multiples défis de la santé publique mondiale. Lutte contre les maladies transmissibles, renforcement du système de sécurité sanitaire international, urgences sanitaires dans le cadre des catastrophes naturelles, poids exponentiel des maladies chroniques, risques liés à l’environnement et accès à des médicaments de qualité, développement de la recherche, autant de sujets à l’ordre du jour que l’OMS doit pouvoir contribuer à résoudre avec son expertise, son influence et sa capacité à susciter les réseaux et synergies. Mais son action n’aurait que peu de poids sur la mondialisation si elle ne s’inscrivait pas directement dans le cadre des objectifs du millénaire pour le développement. Entendons-nous bien, il ne s’agit pas pour l’OMS de devenir une organisation de développement mais de mieux intégrer son action dans l’agenda du millénaire, en rappelant que la santé constitue une condition indispensable au développement et vice versa : comment réaliser l’accès à l’éducation primaire pour tous sans lutter contre les maladies infantiles ?
Comment promouvoir l’égalité des sexes sans donner aux femmes les moyens d’améliorer leur santé ? Comment réduire la pauvreté sans permettre aux populations de répondre à leurs besoins primaires ? L’OMS ne peut pas laisser de côté les maladies négligées qui affectent les populations les plus défavorisées. Le partenariat mondial doit aussi s’appliquer à la santé.
Enfin, je souhaite que l’organisation améliore son fonctionnement pour être à la fois plus visible, plus transparente et plus efficace. Par la qualité de son travail, le renforcement de sa communication, et son inscription dans la réforme des Nations unies, l’OMS doit renforcer la confiance que les autres institutions internationales, les gouvernements, les populations et les milieux professionnels de santé placent en elle. Ses six bureaux régionaux et ses cent quarante-quatre bureaux pays doivent constituer autant de sentinelles de la santé unies par un même esprit d’équipe et un même objectif : faire de l’OMS un médecin de famille universel. » (IPS)
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