«EN prononçant le retrait de la cérivastatine, les Laboratoires Bayer ont eu raison d'appliquer le principe de précaution, car on n'est jamais trop prudent dans ce domaine, souligne le Dr Alain Ducardonnet. Mais, jusqu'à présent, je n'ai personnellement pas eu de patient traité par cérivastatine à la dose de 0,3 ou 0,4 mg/j qui ait fait une rhabdomyolyse ou une insuffisance rénale aiguë. Au Japon où le gemfibrozil (Lipur) n'est pas commercialisé, la cérivastatine reste d'ailleurs autorisée au dosage de 0,3 mg. Je suis convaincu que, avec ce dosage modéré, il n'y aura pas plus de problèmes qu'avec les autres statines. En revanche, la cérivastatine est susceptible d'entraîner des douleurs musculaires comme les autres statines et des élévations de CPK de façon ponctuelle. »
« Il faut tirer, poursuit-il, plusieurs enseignements de ce retrait. Premièrement, cela ne doit pas remettre en question l'intérêt thérapeutique majeur que représentent les statines, de par leur efficacité sur l'hypercholestérolémie, ni les résultats des études menées avec cette classe thérapeutique en prévention secondaire, voire en prévention primaire. »
Seuil d'efficacité, seuil de tolérance
« En revanche, les problèmes rencontrés avec la cérivastatine font toucher du doigt l'existence probable de seuils de tolérance, rencontrés également avec les inhibiteurs de l'enzyme de conversion. La tendance actuelle était d'augmenter progressivement les doses car il y avait probablement un potentiel d'efficacité dose-dépendant, mais il y a aussi certainement un problème de tolérance dose-dépendant qui doit conduire à la plus grande vigilance. »
Il faut donc prendre conscience des limites qui n'étaient pas du tout définies auparavant entre le seuil de tolérance et le seuil d'efficacité des statine, a-t-il enchaîné. « Cela va sans doute conduire nos autorités de tutelle, et notamment l'AFSSAPS qui s'est déjà prononcée sur le retrait de la cérivastatine, à modifier les recommandations de prescription des statines, en préconisant peut-être des dosages plus fréquents et plus systématiques de CPK, jusqu'à présent dosées uniquement lorsque les patients se plaignaient de douleurs musculaires. »
Quoi qu'il en soit, il faut absolument rassurer les patients qui suivent un traitement hypocholestérolémiant par statine. Ce qui n'empêche pas de réévaluer le bien-fondé d'un traitement et d'un dosage, surtout lorsqu'il s'agit de traitements prescrits au long cours.
A partir d'un entretien avec le Dr Alain Ducardonnet, cardiologue à l'institut Cur, Effort, Santé, Paris.
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