LE PLAN HÔPITAL 2007 n’y aura rien changé. Même refaits à neuf, les murs des hôpitaux demeurent poreux, et les praticiens en poste assistent, dépités, à l’exode de leurs confrères vers le privé.
Le Dr Rachel Bocher est pessimiste : «On observe une fuite des compétences. L’hôpital a été le parent pauvre de cette législature: il était en crise en 2002, et l’est encore aujourd’hui.»
Face à ce constat, que faire ? L’Inph (Intersyndicat national des praticiens hospitaliers), que préside le Dr Bocher, a organisé un colloque à l’Assemblée nationale pour qu’émergent des solutions. A l’évidence, pas d’hôpital réactif sans médecins motivés pour faire tourner la boutique. Or les jeunes hésitent, à l’image du Dr Pierre Loulergue, représentant des chefs de clinique : «Les cliniques savent être plus “glamour”. L’hôpital doit développer sa vitrine auprès des plus jeunes qui ne savent rien» de son fonctionnement.
«Le statut de PH (praticien hospitalier) est peu attrayant en début de carrière», a reconnu Pascal Forcioli, directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation (ARH) de Picardie. Les écarts de revenus entre les secteurs libéral et hospitalier posent problème, indiscutablement. Les directeurs d’hôpital croient tenir la solution, en proposant aux PH une rémunération incitative – 50 % à l’acte, 50 % au forfait – afin de reprendre des parts de marché aux cliniques. «On ne peut pas rémunérer de la même façon un chirurgien qui fait 60000actes par an, et un chirurgien qui en fait 20000», a déclaré le président du Syndicat national des cadres hospitaliers (Snch), Philippe El Saïr. Façon diplomate de faire remarquer que certains travaillent plus que d’autres.
L’affaire n’est pas si simple, dit le jeune chef de clinique : «En chirurgie, il ne s’agit pas uniquement d’un problème de rémunération, selon le Dr Loulergue. Quand on interroge les jeunes, ce sont surtout les conditions d’exercice qui font la différence.»
Le ton s’est durci quand a été évoquée la répartition des médecins sur le territoire, très inégale. En Picardie, région sous-dotée, «nous importons des étudiants et nous exportons des médecins thésés», déplore Pascal Forcioli. «La liberté d’installation n’est pas négociable, a aussitôt rétorqué le Dr Pierre Loulergue. La limiter serait contre-productif. » Le risque serait que des médecins arrêtent d’exercer, a fait valoir le chef de clinique.
Convié au débat, le président du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) a rappelé les réserves qui sont les siennes sur le nouveau statut des praticiens hospitaliers, qui introduit une part variable dans le revenu des PH. Cette part variable sera affectée aux équipes médicales sur la base de critères quantitatifs et qualitatifs.
L’Ordre vigilant.
Pas question que les actes soient évalués «heure par heure», a mis en garde le Pr Jacques Roland, appelant les PH à «résister» : «Il faut absolument que les médecins gardent leur indépendance, affirme le président du Cnom . Cela ne veut pas dire se méfier de son chef de service ou de sa direction, mais ne rien admettre qui aille à l’encontre d’une bonne prise en charge des patients. L’Ordre mettra tout son poids pour cela.»
Réaction contrariée de Philippe El Saïr, le directeur d’établissement : «Il est normal que les corporatismes s’expriment. (...) Mais on ne peut tenir de discours incantatoires sur l’hôpital sans rien proposer de plus. Il faut se demander pourquoi certains blocs opératoires sont moins bien organisés que d’autres.» Chacun a pu s’exprimer librement lors du colloque de l’Inph, mais les habituels clivages n’ont pas été dépassés.
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