L A France consacre environ 10 F par habitant à l'éducation pour la santé contre 11 000 F aux soins. Les jeunes sont « les premiers à pâtir de cette insuffisance ». Et quand on leur apprend à faire « les gestes qui les aident à rester en bonne santé », c'est à travers des actions d'éducation pour la santé « souvent ponctuelles et rarement coordonnées. Peu ciblées, elles ne tiennent pas toujours compte de l'âge, du sexe, du statut psychologique et social, et s'appuient insuffisamment sur les résultats de la recherche ».
Ce diagnostic, pour le moins sévère, est porté par 8 médecins et scientifiques*, chargés de réaliser, dans le cadre de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, une expertise collective « Education pour la santé des jeunes » à la demande de la Caisse nationale d'assurance-maladie des professions indépendantes.
Un programme cadre national
En premier lieu, les experts confirment que l'école est le « lieu de prédilection pour éduquer les jeunes à la santé », car il « existe un lien direct entre les apprentissages, la réussite scolaire et la santé ». Mais « la participation des parents est capitale » pour le bon déroulement du « programme cadre national d'éducation pour la santé », que l'INSERM souhaite pour éviter « l'éparpillement des actions » et assurer « la continuité des démarches éducatives » tout au long de la scolarité.
Par ailleurs, « pour être efficaces », il est plus opportun « de parler de nutrition et de prévention des blessures aux enfants du primaire, et des drogues, du SIDA et de la sexualité aux adolescents » ; et ce, dans le cadre « de réels programmes d'au moins une dizaine d'heures par an, sur plusieurs années ».
En outre, l'INSERM suggère de doter les comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté de « coordinateurs qualifiés ». Il convient aussi de former, reconnaître et soutenir ceux qui éduquent les jeunes à la santé. La remise d'un diplôme validant un cursus universitaire complet, s'inspirant autant des sciences de l'éducations que des sciences médicales semble indispensable. Quant aux médecins et infirmières de l'Education nationale, ils doivent être épaulés dans leurs missions de prévention. Les intervenants extérieurs devraient bénéficier d' « accréditations délivrées par les rectorats ».
Participation active
L'INSERM note que l'objectif est de permettre à l'élève d' « acquérir de nouvelles compétences psychologiques et sociales comme l'estime de soi, l'empathie, la capacité à résoudre les problèmes, à résister à l'influence des autres, à prendre des décisions et à gérer son propre stress et ses émotions ». A cette fin, les méthodes éducatives doivent entraîner « la participation active et interactive des jeunes ». Quant aux outils pédagogiques, il importe de les « avoir testés au préalable ». Enfin, il est nécessaire de mieux valoriser les résultats de la recherche en éducation pour la santé.
Pour parler de sexualité à l'adolescence, les experts s'accordent sur l'idée de séparer les filles et les garçons, sans toutefois écarter des séances d'information mixtes. Selon eux, l'une des lacunes principales des programmes de prévention des comportements sexuels à risque concerne la violence sexuelle.
A propos des consommations répétées de tabac, d'alcool et de cannabis chez les jeunes scolarisés, qui ont augmenté régulièrement ces dernières années (voir tableaux), les acteurs de la prévention sont conviés à « aborder les produits licites avant les substances illicites ».
En matière de tabagisme, « les programmes de prévention sont plus efficaces quand ils sont dirigés vers des groupes que lorsqu'ils s'adressent à chaque élève individuellement ». Et l'augmentation du prix des paquets, comme la réglementation de la vente du tabac (« le Quotidien » du 19 juin) « ont plus d'impact pour dissuader de fumer que les mesures radicales d'interdiction ».
Avec l'alcool, il en est de même : l'alcoolémie « zéro », la hausse des prix dans les bars ou la reconduite à leur domicile des jeunes en état d'ivresse après des manifestations festives « se révèlent efficaces ».
Pour les autres « drogues », les programmes éducatifs doivent bien établir « la différence entre les notions d'usage, d'abus et de dépendance ». Au total, pour Bernard Kouchner et Jack Lang, cette expertise collective de l'INSERM renferme de précieuses recommandations qui ne manqueront pas d'être relayées par des circulaires ministérielles.
* Jacques A. Bury, université de médecine de Genève, Christine de Peretti, unité école et santé (Paris), Alain Deccache, Unité RESO-éducation pour la santé (Bruxelles), Marie-Laure Moquet-Anger, faculté de droit (Rennes), Pierre Arwidson, CFES, Geneviève Paicheler, sociologue, Jeanne Etiemble, et Marie Choquet, INSERM.
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