« En matière de crédits, nous baignons dans l'opacité la plus complète », déclare le Dr Christophe Prudhomme.
Le coordinateur du collectif des médecins des SAMU d'Ile-de-France ne limite pas sa réflexion aux services d'urgences franciliens, en grève depuis une semaine pour réclamer plus de moyens. C'est l'ensemble des services des hôpitaux publics de France qui est asphyxié par l'absence de financement. Celui qu'avait prévu l'accord d'assouplissement du protocole sur la RTT (réduction du temps de travail) à l'hôpital signé le 13 janvier 2003, était insuffisant mais avait au moins le mérite d'exister.
La direction de l'Hospitalisation et des Soins (DHOS) a correctement délégué son argent aux régions, puisque, actuellement, les agences régionales d'hospitalisation (ARH) auraient reçu 80 % des 200 millions d'euros pour les créations de postes et des 45 millions d'euros pour le paiement des plages additionnelles (en Ile-de-France, la DHOS a annoncé le déblocage de 39,8 millions d'euros d'ici à fin juin).
C'est après que l'intendance ne suit pas : seulement 10 % à 30 % des budgets auraient été versés aux hôpitaux, estime le Dr François Aubart, président de la Coordination médicale hospitalière (CMH). Les directeurs sont donc coincés : impossible pour eux de payer les plages additionnelles prises par leurs praticiens, impossible aussi de créer des postes pour renflouer les effectifs.
Une formulation trop vague
La circulaire qui réorganise la permanence des soins à l'hôpital (voir « le Quotidien » du 12 mai) n'est pas de nature à les rassurer : elle laisse les directeurs libres de définir pour chaque praticien si telle garde doit être intégrée aux obligations de service « dans le respect du budget alloué à l'établissement ». Certes, le paragraphe qui précisait que seulement 25 % des gardes prises en 2003 seraient intégrées dans le temps de travail normal, c'est-à-dire les 48 heures de travail hebdomadaires, a disparu, comme le réclamaient les syndicats. Mais son remplacement par cette vague formulation est jugé aussi inquiétant : les syndicats refusent que les directeurs définissent arbitrairement quel travail de nuit et de week-end peut donner droit à une indemnité de sujétion ou à une plage additionnelle.
« La balle est renvoyée aux établissements en leur demandant de faire avec ce qu'ils ont », dit François Aubart, qui estime « très préoccupante cette façon de déconcentrer les responsabilités ». Des dérives locales sont à craindre, car aucune garde ne serait intégrée dans le temps de travail normal et l'argent ne servirait qu'à combler les déficits, les enveloppes étant fongibles entre elles, dit le président de la CMH. L'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH) espère que les comités de suivi du protocole sur la RTT se réuniront prochainement pour que la circulaire s'applique au plus vite et au mieux. L'INPH considère la démographie médicale comme la première des priorités à l'hôpital. Pour sa présidente, le Dr Rachel Bocher, « il faut créer des postes, mais aussi des mesures attractives pour que les médecins restent à l'hôpital ». Allusion faite au plan Hôpital 2007, en jachère complète depuis des semaines. De son côté, la Confédération des hôpitaux généraux (CHG) étudie la possibilité de recours juridiques contre cette circulaire « pleine de contradictions ». La CHG va faire monter la pression pour qu'ait lieu une rencontre avec Jean-François Mattei.
Aucun calendrier n'est annoncé pour les négociations sur le plan Hôpital 2007, que le ministre de la Santé avait promises d'organiser lors de la première quinzaine de mai. Ce n'est pas la seule promesse non tenue, soulignent les syndicats : le rebasage des budgets en début d'année et la réévaluation de la dotation globale des hôpitaux en avril sont également passés à la trappe.
Les urgentistes en grève le 20 mai
Une journée nationale de grève de médecins des services d'urgences des hôpitaux devrait avoir lieu le 20 mai pour soutenir le mouvement lancé le 6 mai en Ile-de-France. Décidée lundi par une assemblée téléphonique de délégués de région de l'AMUHF (l'Association des médecins urgentistes hospitaliers de France), cette journée devait être votée le soir en assemblée générale.
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