RACHIDA DATI, comme tout nouveau ministre, ne doit être jugée que sur ses résultats. Il est donc quelque peu prématuré de dresser un bilan de son action, cinq semaines après sa nomination.
Certes, elle est associée à un projet de loi sur la récidive qui fait grincer des dents à gauche, dans la mesure où c'est la troisième fois en quelques années qu'est durcie la répression contre la délinquance. Certes, on peut nourrir le sentiment qu'elle se contente de porter cette nouvelle loi, voulue surtout par Nicolas Sarkozy. Et, bien entendu, on ne saurait épargner la nouvelle ministre sous le prétexte qu'elle est issue de l'immigration. Cela ne lui confère aucun avantage particulier, mais ne doit pas être perçu non plus comme un inconvénient.
Le fait est que Mme Dati souffre de la tâche considérable qu'elle doit accomplir parce que l'intention du président de la République était justement de ne pas la nommer à un poste symbolique. S'il a sacré une personne issue de l'immigration, il n'est pas exclu qu'il se serve de cette qualité pour faire passer une loi répressive.
D'autres attaques viennent du camp de Mme Dati, à laquelle on reproche son autoritarisme qui s'est traduit par la démission de quelques membres importants de son cabinet, ce qui fait désordre, surtout sur la ligne de départ. Mais la ministre n'a jamais eu la vie facile : c'est vraiment quelqu'un qui est arrivé à la force du poignet en se créant un réseau de relations inespérées, d'Albin Chalandon à Simone Veil, qui l'ont soutenue et la soutiennent encore, parce qu'ils estiment qu'elle mérite de jouer le rôle qui lui a été accordé. Le comble serait d'accuser d'arrivisme une femme venue d'une communauté à laquelle on ressasse sans cesse que, si elle ne prend pas son destin en main, si elle ne travaille pas dur, si elle ne croit pas aux « valeurs de la République », elle ne réussira pas. Mme Dati fait ce qu'il est convenu qu'elle doit faire et craint peut-être de s'en laisser conter par des conseillers arrogants. Elle demeure donc un exemple étincelant, une bannière pour tous ceux qui frappent à la porte de l'emploi, sinon de la notoriété.
Rien dans cette méthode, dans ce parcours, dans cet effort n'a changé. Non seulement il faut attendre que le garde des Sceaux ait fait ses preuves, mais on lui doit un minimum de patience, sinon d'indulgence. Quant aux ennuis judiciaires de l'un de ses frères, ils n'ont d'importance qu'aux yeux des plus piètres conservateurs que charrie notre société. Comme il l'a dit lui-même, lui, c'est lui et elle, c'est elle. Elle n'a pas bronché quand le parquet a fait appel d'un jugement clément à l'égard de son frère. C'est bien la preuve qu'elle n'interfère pas dans le cours de la justice. Et l'affaire de toxicomanie dans laquelle son frère est impliqué rappelle simplement qu'elle vient bien d'un milieu pauvre, où la vie est difficile et où existe en permanence la tentation du délit. Si Rachida Dati n'était qu'une fille de famille riche avec pignon sur rue, son ascension serait moins étonnante. Ce qui chagrine ceux qui la critiquent, c'est qu'elle ne doit rien aux autres, et tout à elle-même, y compris l'amitié et l'affection qu'elle inspire au couple Sarkozy.
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