UNE SURPRISE PAR SEMAINE. Après l'échec brutal de la séance de négociation nocturne du 8 mars, qui a débouché sur une situation d'impasse au sujet du tarif de la consultation (C), le « coup » du Syndicat des médecins libéraux (SML) modifie la donne avec à la clé diverses répercussions politiques et syndicales (« le Quotidien » du 14 mars).
En proposant comme solution de repli de signer immédiatement un accord sur le C à 22 euros applicable au 1er juillet, et de renvoyer la négociation sur le C à 23 euros «après l'élection»,lorsque le climat politique sera «plus serein»,le SML reprend l'initiative et intéresse l'assurance-maladie et le gouvernement soucieux d'éviter la rupture avec les médecins. Mais il exaspère son puissant partenaire confédéral (lire ci-contre) et prend le risque de provoquer une partie de la « base » généraliste.
Le SML a justifié sa proposition d'accord partiel par l' «ampleur des conséquences» d'un divorce conventionnel. De fait, l'assurance-maladie n'excluait pas de saisir cette occasion pour conclure la négociation tarifaire dans les plus brefs délais. «Un élément nouveau a été mis sur la table. C'est une proposition intéressante, conforme aux orientations du conseil de l'Uncam», analysait-on en milieu de semaine dans l'entourage de Frédéric Van Roekeghem, directeur de l'assurance-maladie, sans préjuger toutefois du «point de sortie».
Pour la caisse, la proposition du SML a un mérite : celui de ne pas enchaîner l'assurance-maladie à un accord trop coûteux qui accroîtrait mécaniquement le risque d'un déclenchement du comité d'alerte sur les dépenses maladie dès l'été prochain. Une menace qui hante les partenaires sociaux. «La situation économique est telle qu'on risque de ne pas passer en juin, affirme Jean-Claude Sureau (CGT). Et en cas d'alerte, cela se retournera forcément contre les assurés avec une baisse du remboursement, une augmentation du reste à charge et une crise de société».
Le conseil de l'Uncam qui se réunit aujourd'hui devrait donc encourager le directeur, dépositaire des finances sociales, à garder le cap de la fermeté sur les tarifs. Tout en recherchant la voie étroite d'un compromis. «Pour nous, aucun engagement sur le C à 23euros n'est possible en l'état,martèle André Hoguet, chef de file de la Cftc. Cette évolution devra être conditionnée à des résultats effectifs et à la continuité de la maîtrise médicalisée.» Le Dr Bernard Salengro (CGC) exige, lui aussi, «un retour sur investissement». Pour Jean-Claude Mallet (FO), le proposition du SML est «la voie de la sagesse dans un moment très difficile». «Il faut valider le C à 22euros le plus tôt possible et prévoir un nouveau plan de maîtrise et de prévention, ajoute-t-il. Je m'adresse au syndicalisme réformiste, rompre aujourd'hui serait une grave erreur.» Un message en direction de la Csmf qui a annoncé son désengagement des commissions conventionnelles locales.
Quant à Michel Régereau, président Cfdt de l'Uncam, il estime que la proposition du SML «paraît de nature à calmer le jeu et à repartir sur des bases plus saines» le moment venu. Lui aussi insiste sur la contrainte financière pour 2007 et la nécessité d'un partage équitable des augmentations entre les différentes professions de santé. «La revalorisation de la médecine générale n'est pas un problème pour l'Uncam, mais nous n'en n'avons pas les moyens aujourd'hui. Nous devons gérer des négociations avec les infirmières qui demandent 520millions d'euros de revalorisation en année pleine, les kinésithérapeutes avec qui nous avons signé pour 110millions d'euros et les sages-femmes pour quelques dizaines de millions d'euros sans compter les effets reports pour l'année prochaine.»
Alors que la négociation avec les médecins prend un tour de plus en plus politique, à quelques semaines du premier tour de l'élection présidentielle, Michel Régereau n'hésite pas à mettre en cause le «double langage» du ministre de la Santé Xavier Bertrand, qui n'a cessé de soutenir publiquement le C à 23 euros. «Je comprends que la Csmf soit dans une situation difficile, compte tenu de ce qu'affirme le ministre de la Santé dans la presse, mais il ne nous dit pas la même chose à l'oreille!».
Embarras.
Il demeure que la proposition du SML dérange les pouvoirs publics autant qu'elle ne les séduit. La Cnam peut difficilement s'engager sur un accord porté uniquement par le SML, qui serait très minoritaire. Si cette éventualité est possible juridiquement, elle semble peu envisageable politiquement. «Nous voulons le maximum de signataires. Même le C à 22euros est un accord coûteux, qui justifie un engagement des médecins», dit-on du côté de la direction de l'Uncam.D'où l'effort pour rallier la Csmf à une solution de compromis. Les tractations allaient bon train cette semaine. Autre condition posée par la Cnam pour organiser cette ultime séance : la certitude d'aboutir. «Il faudra que le point d'aboutissement soit connu avant», explique-t-on du côté de la caisse. Autrement dit, il est hors de question de se lancer dans un nouveau marathon pour échouer à nouveau. Déjà, la dureté de certains propos du président de la Csmf à l'endroit du directeur de l'assurance-maladie accusé d'être «autiste» (« le Quotidien » du 14 mars) n'a guère été appréciée. Au SML, on s'amusait plutôt des remous provoqués par ces péripéties conventionnelles et la recherche d'un accord impossible. «A force de creuser, on finira bien par trouver du pétrole.»
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