Retour en arrière. Il y a quelques années, IBM défrayait la chronique en milieu médical pour une opération pour le moins originale : la collaboration avec le CHU de Nice pour la conception et le déploiement d’un chantier pilote au sein de ses urgences. La finalité : la mise en place d’une solution combinant les technologies RFID et sans fil afin d’optimiser le parcours du patient dans cet univers particulier qui accueille plus de 75 000 personnes chaque année. Cette solution expérimentée en grandeur nature permettait de localiser le patient en temps réel et de n’importe quel endroit du service des urgences afin de lui prodiguer les soins sans délai d’attente inutile. Quel en était le mode opératoire ? Les différents PC des professionnels de santé et les patients avaient été équipés de puces RFID, ce qui permettait la géolocalisation sans fil des malades et de maîtriser le taux de disponibilité des équipements. Considérée alors comme une grande avancée, cette initiative a été toutefois cantonnée dans une phase d’expérimentation. La généralisation tant espérée par les utilisateurs est restée lettre morte.
Une expérimentation avortée
Sans s’appesantir ici sur les fondements de l’abandon d’une telle opération, l’on peut constater qu’elle a mis la lumière sur les limites en équipement d’un service, celui des urgences au sein duquel la technologie peut permettre de gagner en productivité et de respecter la logique opérationnelle qui le sous-tend : intervenir rapidement pour sauver des vies en danger. Pour cela, il faudrait respecter un minimum de prérequis, quel que soit l'outil à intégrer : le secret médical sur ce terrain où se multiplient les intervenants doit être préservé ; le recueil et l'analyse des données garantis. Sur cette base, l'intégration de tout système doit être précédée d'une analyse approfondie du service concerné. Et mobiliser une équipe pluridisciplinaire représentant les différents corps de métiers concernés. Ces derniers auront leur mot à dire tout au long du projet, du choix du logiciel jusqu'à son déploiement. Outre la problématique de la géolocalisation mise en exergue à travers l'expérimentation conduite au sein du CHU de Nice, l'informatique des urgences doit garantir une gestion administrative et médicale du patient.
Partant de ces besoins, plus d’un fournisseur du marché a développé une solution logicielle. La tendance fonctionnelle la plus remarquée étant le centrage des processus sur l’arrivée du patient au sein du service, son mode de prise en charge, les mouvements associés (accueil, salle d’examen, laboratoire d’analyse médicale, imagerie, etc.). C’est le cas du module Osoft dédié aux urgences. À partir d’un écran de saisie, les utilisateurs que sont les médecins urgentistes et les infirmières ont accès à des fonctions permettant l'enregistrement des motifs d'entrée, des examens effectués et des actes réalisés. Cet outil est doté d’un module de paramétrage qui offre la possibilité d’associer à chaque forme de prise en charge et de pathologie un environnement de travail.
Quatre éditeurs se partagent 90 % du marché
Plus généralement, une dizaine d’éditeurs sont présents sur ce marché de logiciels de gestion des urgences sachant que les quatre premiers s’arrogent 90 % du périmètre. Urqual fait partie de ces systèmes qui permettent d’asseoir une traçabilité au sein d’un service. Commercialisée par le Mipih, cette solution propose une batterie de fonctionnalités relatives à la prise en charge médicale (aide au questionnaire, etc.), aux soins (planification, dispensation, etc.), à l’activité, à la qualité (organisation, protocoles, sondes de mesure, etc.). En complément, Urqual propose également des tableaux de bord exploitables à des fins de reporting.
Sur ce marché que l’on pouvait imaginer comme assez peu porteur, l’on a vu arriver récemment de nouveaux entrants. Sur le terrain du logiciel de spécialité, le Syndicat interhospitalier de Bretagne (SIB) a décidé d’ajouter une nouvelle solution aux offres déjà existantes : Sillage Urgence. Cette structure avait commencé par la mise au point d’un générateur de dossier de spécialités dans son système d’information hospitalier. Visiblement, cela n’a pas suffi. La version 5 de la plate-forme Sillage, qui arbore une nouvelle ergonomie, propose également le module Sillage Urgence. Ce qui installe un flux continu entre le dossier médical et celui de spécialité. Avec à l’arrivée une économie des ressaisies. Les données patients disponibles dans le SIH sont visualisables et exploitables au sein des urgences. Pour poser facilement les jalons de son outil, le SIB a décidé de travailler avec deux partenaires pilotes chargés de l’expérimenter. Il s’agit des centres hospitaliers de Bayeux dans le Calvados, d’un côté, et celui de Douarnenez dans le Finistère, de l’autre. Ces établissements devraient progressivement bénéficier des fonctions de gestion de leurs urgences dans une logique intégrée avec leur SIH. Deux autres établissements vont bientôt entrer dans le bal.
Garantir une fermeture automatisée des écrans ouverts
Si les processus métiers font l’objet d’un équipement désormais avancé, la problématique de la sécurité et de la confidentialité des données reste cuisante dans l’environnement des urgences. Dans un va-et-vient incessant, les professionnels de santé se connectent à leur univers de travail et sont souvent obligés de l’abandonner sans clore leur session, pour des raisons de réactivité et de prise en charge urgente du patient. Dans ces conditions, les données d’un patient peuvent être visualisées par plus d’une personne non habilitée, à commencer par des professionnels de santé autres que le médecin en charge du malade, sans compter les accompagnants. Un véritable risque qu’il faut maîtriser. Il existe bien des solutions d’identification et d’authentification fortes sur le marché. Mais comment garantir une fermeture automatisée des écrans ouverts ? Face à ce défi, la société Bluelinea a lancé le système BlueLoc. Il s’agit d’un badge d’identification sans contact destiné à protéger l’accès à un poste de travail du professionnel de santé. Du fait de sa convivialité, cette solution a trouvé une de ses applications au sein des urgences. Accrochée autour du coup de l’utilisateur, elle lui garantit un usage en mains libres, sachant qu’il est automatiquement reconnu dès qu’il s’approche d’un PC déployé au sein des urgences. La session ouverte se verrouille dès qu’il s’éloigne de son outil. Derrière ce système, qui a déjà été installé dans différents établissements, parmi lesquels le centre hospitalier de Châteauroux, se confine la technologie RFID active. Son couplage avec la solution Axigate est à l’œuvre au sein des urgences de l’hôpital de Gien. Le centre hospitalier de Chaumont l’a également déployé pour une cinquantaine d’utilisateurs de ses urgences.
Limiter les coûts grâce à la télémédecine
Si le volet sécurité et confidentialité des données peut désormais être maîtrisé au sein des urgences, ces dernières ont besoin d’autres avancées technologiques pour optimiser la prise en charge du patient. Il s’agit entre autres de la télémédecine. Celle-ci est exploitée sur différents sites. Depuis plusieurs mois, elle est utilisée sous la forme d’une téléexpertise permettant d’expérimenter les demandes d’avis neurochirurgicaux dans un contexte d’urgence. Une telle opération mobilise le CHU de Caen et différents hôpitaux parmi lesquels celui d’Argentan, l’objectif étant de limiter, autant que faire faire se peut, les transferts de patients grâce à des avis distants émis par des experts. Une telle exploitation de la télémédecine dans un contexte d’urgence est opérée dans d’autres établissements en France. Elle permet d’aller vite dans le diagnostic, de limiter les coûts liés à des déplacements parfois évitables. Dans cette logique, un réseau de télémédecine a initialement été créé entre le centre hospitalier de Châteauroux et le CHRU de Tours pour la prise en charge des urgences neurochirurgicales. Par la suite, cette infrastructure a été élargie aux transactions entre les hôpitaux du Blanc, Châteauroux, Issoudun et le CHRU de Tours pour des urgences neurochirurgicales, mais également orthopédiques et neurovasculaires.
Extracteur de données utiles
Espace de santé hyperactif, le service des urgences s’informatise de plus en plus. Au logiciel de spécialité viennent s’ajouter d’autres couches applicatives. Tous doivent s’intégrer entre eux et permettre aux multiples professionnels de santé qui y interviennent de travailler dans les conditions les meilleures, afin de prendre le patient en charge le plus rapidement possible. Car plus qu’ailleurs, le facteur temps peut, ici, s’avérer vital. Pour cela, il est nécessaire d’équiper ces plateaux d’outils hautement sécurisés par des architectures redondantes et éprouvées. Enfin, il est vital de réserver l’information aux seuls professionnels habilités. Les établissements l’ont compris, qui multiplient des projets d’intégration de systèmes d’identification efficaces. Mieux, les pouvoirs publics sont également mobilisés en vue d’encourager une meilleure prise en charge du patient dans les urgences. C’est le sens du projet Lerudi ou Lecture rapide en urgence du dossier informatisé du patient. Il s’agit d’un prototype de moteur de recherche capable d’extraire, en quelques secondes, des informations utiles pour le médecin urgentiste, à partir d’un dossier médical électronique. Une véritable aide à la prise de décision.
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