S ANS faire le procès de la psychiatrie, force est de constater que l'information du patient et de son entourage sur la schizophrénie était très souvent occultée, voire inexistante. Mais on assiste, actuellement, à un changement profond dans ce domaine, dû à plusieurs facteurs.
La prise en charge s'est modifiée, avec la baisse de posologie des médicaments et l'apparition de nouvelles molécules dotées d'effets secondaires moindres et à efficacité équivalente. Cette nouvelle approche de la pathologie, qui a modifié le pronostic de la maladie, implique que des informations soient fournies au patient, tant sur sa maladie que sur le traitement, qu'il faut gérer.
La nouvelle législation sur l'obligation d'information du patient s'applique à la schizophrénie comme à d'autres pathologies. Mais, en psychiatrie particulièrement, de nombreuses questions sont soulevées par la transmission des informations : le patient peut-il entendre la réalité ? Est-il capable d'accepter sa maladie ? Trop d'informations ne peuvent-elles pas nuire à une bonne prise en charge ? Dans quelle mesure faut-il, ou peut-on, informer la famille, l'entourage du patient, avec son accord (qui souvent n'est pas suffisant), sans violer le secret professionnel ? Enfin, quelle information donner au patient ?
Comme le souligne Mme C. Finkelstein, présidente de FNAP-PSY (Fédération nationale de patients et ex-patients de psychiatrie), « l'information pour les malades souffrant de maladie mentale est très importante, car s'il y a compréhension de la maladie, l'acceptation de celle-ci et l'adhésion aux traitements sont plus faciles pour envisager une adaptation à la vie sociale ».
« Certains malades ne sont pas toujours prêts à entendre le nom de la maladie, poursuit-elle, mais ils sont toujours réceptifs aux explications sur les symptômes, sur l'évolution du mal, sur les médicaments et leurs effets secondaires. Les patients sont presque "rassurés" quand ils constatent qu'ils ne sont pas les seuls à avoir les mêmes troubles. » Or, si les choses changent, l'information livrée par les psychiatres est « encore trop faible, trop lente. Nombre de malades ont attendu trois, voire cinq ans, pour savoir de quoi ils étaient atteints ». Bien des psychiatres estiment qu'il est inutile de donner des informations aux personnes en crise. « Pourtant, chaque patient se rappelle des détails (les vêtements des soignants, les lieux, les dialogues...), il y a toujours une lueur de réalisme. »
Un élément thérapeutique
« L'information de la famille, des proches est au cœur du processus de soins, c'est un élément thérapeutique », souligne M. Escaing, de l'UNAFAM (Union nationale des amis et familles de malades mentaux), car la particularité des maladies mentales est que le malade n'est pas seul, mais entouré. « Malade et entourage ne font qu'un bloc, sinon la situation est conflictuelle. »« Vivre avec la maladie mentale chez soi est difficile et, aujourd'hui, avec la fermeture des lits d'hôpitaux, nombreuses sont les familles qui doivent prendre en charge au quotidien un proche schizophrène. » Si le malade a besoin d'informations sur sa maladie pour l'accepter, pour comprendre son traitement, la famille également. La schizophrénie touche en majorité des adultes jeunes et la famille doit savoir, comprendre, pour bâtir « un projet de vie » pour le malade, pour sa réinsertion, un des objectifs majeurs de la prise en charge.
Cette information est, reconnaissons-le, difficile à dispenser : « On n'informe pas un sujet schizophrène comme un sujet diabétique ou hypertendu, même si la durée des traitements est identique », souligne D. Friard, infirmier psychiatrique de secteur. Le refus de la réalité est courant, et seul un dialogue, des échanges répétés peuvent conduire le patient à admettre le diagnostic et à adhérer à sa prise en charge. La prudence dans l'information est de rigueur : elle nécessite de longs dialogues avec le patient. Ce qui entraîne, comme le souligne le Dr Lavoine, « un surcroît de travail difficilement compatible avec les réalités sociales ou le manque de personnel ».
Des livrets pour les infirmières
Le travail d'information du médecin et des soignants est, dans la schizophrénie, très complexe : il ne suffit pas « de faire son devoir, d'annoncer la maladie, de décrire les symptômes, d'exposer les traitements ».
Il faut que le patient et son entourage soient préparés à recevoir l'information, et que le soignant sache quelle information donner et à quel moment, pour que le bénéfice soit le plus important possible.
Pour réaliser un tel travail d'accompagnement, les soignants doivent être formés. A cet effet, l'institut Lilly, très impliqué dans le soutien à la psychiatrie, a réalisé un certain nombre de brochures qui permettent aux infirmières et infirmiers d'aider à informer les patients. Ces livrets représentent une base de travail, des outils, pour aborder la maladie et la prise en charge du patient atteint de schizophrénie.
La prise de conscience de la nécessité d'une formation des soignants pour l'information des schizophrènes est actuellement forte et les initiatives dans ce domaine se multiplient.
D'après un symposium de l'institut Lilly, en partenariat avec la revue « Santé mentale », dans le cadre du 14e Salon infirmier
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature