L'information du patient au doigt et à l'oeil

DEPUIS QUELQUES ANNEES, l'hôpital a du mal à remplir sa mission d'information du patient. Pris entre une exigence sociétale que chaque émission de télévision renforce, des budgets en berne et une réelle complexité du sujet, les responsables peinent à trouver une solution efficace. Lorsque l'Anaes (Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé) y ajoute une couche et recommande la traduction dans la langue du patient du livret d'accueil, on frise la mission impossible.
Le CHU de Nancy, pourtant, s'obstine à croire que l'information du patient n'est pas une cerise sur le gâteau, même allégé, mais une dimension intégrante du soin de qualité.
« Quand on a un robot chirurgical*, on doit bien être capable d'innover en technologie de l'information ? », estime de son côté le patron d'une entreprise lorraine qui développe avec l'université des projets de recherche sur les nouveaux usages de la télévision. Et lorsqu'au cours d'une réunion « Hôpital sans tabac », le groupe de travail propose de diffuser les vidéos de prévention sur les téléviseurs des patients, il ne sait pas qu'il vient de mettre le doigt dans l'engrenage.
Quinze mois plus tard, une patiente collaboration entre médecins, ingénieurs, spécialistes multimédia et informaticiens aboutit à la création d'une innovation en matière de communication hospitalière. HTV, la première chaîne télé santé personnalisée pour établissements de soins s'affiche sur les écrans.

Côté contenus, elle a tout d'une grande.
La grille de programmation est construite autour de quatre rubriques principales : éducation santé, prévention, culture et infos pratiques de l'hôpital. Partant du principe que 80 % des informations attendues par les patients n'ont rien de spécifique, la création de contenus a soigneusement été repensée. Expliquer ce qu'est un PET-scan, le taux d'hématocrite ou un sucre lent, est identique à Bordeaux, à Nevers ou à Forbach. Tout ce qui relève d'une logique de mutualisation sera créé avec le département vidéo de l'université de Nancy-II, qui produit notamment « les Amphis de la 5e ». C'est dans ce catalogue particulièrement riche qu'on peut lire les noms d'Yves Coppens, Jean d'Ormesson, Edgar Morin. Par ailleurs, toutes les initiatives sont bienvenues. Présentée au dernier salon Hôpital Expo, la chaîne a séduit les grands noms de la prévention. Inpes (prévention et éducation pour la santé), Mildt (Mission interminitérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie), Prévention routière, Association française des diabétiques, entre autres, ont promis leur concours.

... et vous en plus.
Comment reconnaître le personnel à la couleur de sa tenue, comment lire sa facture, où acheter le journal, comment prendre contact avec la commission de conciliation, sont des informations spécifiques de chaque établissement. Seulement quelques centres (Paris, Marseille, Strasbourg) ont les compétences internes pour tourner des sujets vidéo. Souvent, les autres n'ont même pas un chargé de communication. Mais ils ont au moins un appareil numérique et les textes de leurs livrets d'accueil. C'est à partir de ce cahier des charges que les ingénieurs de HTV ont créé un système capable de produire ces contenus personnalisés et les infos pratiques tant attendues par les patients. Naturellement, ils ont laissé dans la grille une petite place pour que chaque établissement insère ces précieux décrochages locaux. La faiblesse des investissements en jeu a d'emblée permis de proposer une chaîne par site à Nancy, parce que « Où acheter le journal ? » et « Quel est le nom du directeur ? » n'ont pas la même réponse sur le site de Brabois et à l'hôpital central.
L'avantage essentiel d'une production et diffusion ultrasimplifiées est aussi la capacité de réaction. Par exemple, pour parler de la déshydratation en cas de forte chaleur.
Un canal d'infos TV est une innovation qui décharge les soignants des informations répétitives et garantit la précision du message. Avec comme ambition de trouver plus de temps pour l'écoute, la compassion, toute la dimension sensible de la relation humaine, celle qu'on ne peut remplacer.

www.htv.fr, www.chu-nancy.fr.
* Nancy a été l'un des premiers CHU en France à disposer d'un robot de télémanipulation chirurgical.