EN URGENCE préhospitalière, le diagnostic d'infarctus du myocarde est en premier lieu évoqué sur la présentation clinique. En se fondant sur l'analyse des signes objectifs et sur l'ECG (dans les vingt minutes suivant l'installation des troubles), il est possible d'établir un diagnostic préhospitalier dans près de 80 % des cas. Lorsqu'un doute persiste, il est licite de recourir à des dosages biologiques : CPK-Mb, troponine Ic, myoglobine. Mais un délai de deux heures environ est nécessaire avant la positivation de ces tests qui sont pratiqués en routine depuis les années 1995-2000. Dans la mesure où, en France, la plupart des patients contactent les services d'urgence dans les deux premières heures suivant le début de la douleur et que, dans ces conditions, le délai pour faire profiter au malade des toutes nouvelles techniques de revascularisation est limité, il est important de pouvoir détecter au lit du malade des signes biologiques de nécrose dans les 20 % de cas douteux.
CardioDetect est un nouveau test de détection biologique rapide de h-FABP, un marqueur biologique diagnostique précoce des souffrances myocardiques. CardioDetect a fait l'objet d'une étude pilote au Smur de la Pitié-Salpêtrière à laquelle ont participé le Pr Gilles Montalescot et le Dr Jean-Philippe Collet. Au total, 108 patients souffrant de douleur thoracique depuis moins de douze heures ont été inclus. « A l'arrivée au domicile, un ECG, un bilan biologique (troponine Ic, myoglobine) et un test h-FABP ont été systématiquement pratiqués. Les résultats de ces différents tests ont été analysés en prenant en compte le devenir des patients à vingt-quatre heures et à une semaine », explique au « Quotidien » le Dr Patrick Ecollan. A 180 minutes, le test h-FABP s'est révélé plus sensible et spécifique que l'ECG et la troponine Ic (sensibilité de 89 % et spécificité de 90 % contre, respectivement, 50 et 90 % et 39 et 100 %). A vingt-quatre heures, ces chiffres étaient de 87 et 94 % pour l'h-FABP, de 78 et 67 % pour l'ECG et de 41 et 100 % pour la troponine Ic.
Une nouvelle étude en cours.
Au total, 55 des 108 patients inclus souffraient d'infarctus du myocarde. Pour 48 d'entre eux, le test h-FABP était positif. Si l'on exclut les 23 patients dont l'ECG était typique et les 13 chez lesquels le taux de troponine était majoré, il reste 12 patients souffrant réellement d'infarctus qui auraient été mal orientés par le Smur s'ils n'avaient pas bénéficié du test h-FABP. Il s'agissait généralement de sujets présentant des infarctus sans élévation du segment ST (9 patients) ou chez qui l'ECG était peu contributif (bloc de branche gauche, pacemaker, AC/FA).
Une nouvelle étude est en cours dans quatre services de Samu de l'île-de-France. Incluant plus de 1 000 patients, elle devrait permettre de préciser l'intérêt de cette technique à plus large échelle.
h-FABP pour heart-Fatty Acid Binding Protein
h-FABP est une très petite molécule (14,5 kD) qui lie deux acides gras impliqués dans le cycle de Krebs. Sa concentration est dix fois plus importante dans le muscle cardiaque que dans le muscle squelettique. h-FABP est libérée dans le sang dans les vingt minutes qui suivent la nécrose et elle est éliminée par le rein. Découverte en 1988 par une équipe néerlandaise (Dr J. Glatz), cette molécule a fait l'objet de plusieurs travaux durant les années 1990 qui ont confirmé l'intérêt diagnostic de son dosage dans l'infarctus, notamment du fait d'une libération plus précoce que la troponine Ic. Le test est positif lorsque le taux d'h-FABP est supérieur à 7 ng/ml (vingt minutes après le début de la nécrose) et la concentration maximale moyenne est de 320 g/ml après un délai de cinq heures.
Un partenariat entre une société française (Biomedical Diagnostic) et des chercheurs allemands a permis la production à grande échelle de ces tests qui ont été utilisés pour la première fois en préhospitalier par l'équipe du Dr Ecollan. Le matériel est constitué de nitrocellulose qui contient, au niveau de la zone de dépôt sanguin veineux ou capillaire, des anticorps anti-h-FABP. Lorsque des complexes se forment, ils migrent progressivement vers une seconde zone contenant des anticorps fixés qui retiennent le complexe migrant. Visuellement, cette fixation se traduit par la présence d'un trait sur la bandelette.
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