UN REMEDE médicinal traditionnel chinois, ou tout du moins l'une des molécules actives qu'il contient, pourrait se révéler très efficace dans la lutte contre le cancer. Cette molécule, l'indirubine, était déjà connue pour sa capacité à inhiber la prolifération cellulaire (voir encadré). Une nouvelle étude indique que ce composant est, en outre, capable de provoquer la destruction des cellules tumorales humaines en induisant leur mort par apoptose.
Nam et coll. ne se sont pas contentés de démontrer l'existence d'un effet proapoptotique de l'indirubine. Leurs travaux apportent également de précieuses informations sur les mécanismes moléculaires qui sous-tendent les propriétés antitumorales de ce composé. La dissection de ces mécanismes devrait faciliter la mise au point de stratégies thérapeutiques efficaces et spécifiques, applicables à l'homme.
Un processus cellulaire très régulé.
Plusieurs études avaient déjà suggéré que l'indirubine devait avoir un effet sur l'apoptose. Cependant, personne ne savait comment la molécule intervenait dans l'induction de ce processus cellulaire très régulé.
Afin d'en apprendre plus sur ce phénomène, Nam et coll. ont décidé de tester l'effet d'un dérivé chimique de l'indirubine sur l'expression des protéines impliquées dans l'apoptose. L'expérience leur a permis de découvrir que la molécule inhibe la synthèse de certaines protéines antiapoptotiques telles que la Mcl-1 et la survivine. Cet effet est observé dans les cellules dérivant de tumeurs humaines du sein ou de la prostate, mais pas dans les lignées cellulaires non tumorales. Il semble donc être associé à une propriété spécifique des cellules transformées cancéreuses.
Le facteur de transcription Stat3.
Des expériences complémentaires ont montré que l'effet de l'indirubine sur l'apoptose est indirect : la cible principale de la molécule se révèle être une kinase, la tyrosine kinase Src.
Nam et coll. ont pu démontrer que l'indirubine se fixe à la kinase et inhibe son activité. L'un des rôles de la tyrosine kinase Src est d'activer le facteur de transcription Stat3. Or ce facteur régule l'expression des gènes qui codent pour les protéines antiapoptotiques.
La boucle est ainsi bouclée : en inhibant Src, l'indirubine s'oppose à l'activation de Stat3 et, donc, à la transcription des gènes codant pour Mcl-1 et pour la survivine.
La voie de signalisation intracellulaire Src-Stat3 est connue pour être fréquemment suractivée dans les cellules tumorales. Les travaux de Nam et coll. indiquent que l'indirubine s'oppose à cette suractivation. Si la molécule ne provoque pas l'apoptose des cellules non cancéreuses, c'est tout simplement parce que cette voie n'est pas active dans une cellules normale. L'indirubine ne peut donc pas l'inhiber.
Nam S et coll., « Proc Nalt Acad Sci USA » du 26 avril 2005, pp. 5998-6003.
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