Des étiologies multiples, des traitements adaptés

L'incontinence urinaire n'est pas une fatalité

Publié le 02/10/2008
Article réservé aux abonnés

LES ENQUÊTES épidémiologiques menées sur la prévalence de l'incontinence urinaire ont mis en évidence la très grande fréquence de ce trouble chez les personnes âgées. Chez les sujets de plus de 65 ans vivant à leur domicile, une étude française (Passadori et Grosshans) a ainsi retrouvé une prévalence de 23 % d'incontinences permanentes et 48 % d'incontinences occasionnelles chez les femmes et chez les hommes, 16 % d'incontinences permanentes et 30 % d'incontinences occasionnelles. Cette prévalence croît avec l'âge dans les deux sexes. Dans les institutions d'hébergement social et médical, les prévalences sont bien supérieures, variant, suivant les études, de 40 à 90 %. Pour tous les auteurs, l'incontinence urinaire est un facteur d'institutionnalisation des personnes âgées.

L'incontinence urinaire ne doit plus être considérée comme une fatalité liée à l'âge, mais comme une maladie aux étiologies multiples à laquelle il faut appliquer un traitement adapté.

Des facteurs précipitants.

L'incontinence du sujet âgé peut principalement résulter d'une altération du mécanisme de clôture urétral, d'une altération du système de transmission des pressions, d'une désinhibition du réflexe de distension-évacuation ou d'une hypoactivité du muscle détrusor. Le plus souvent, plusieurs de ces mécanismes sont mis en cause. La fragilité de la continence chez le sujet âgé explique qu'un certain nombre de facteurs dits précipitants, généralement accessibles à un traitement simple, soient capables d'induire une incontinence. Ils doivent systématiquement être recherchés lorsque l'incontinence est d'apparition récente : modification récente de l'environnement, environnement inadapté, perte de mobilité, ablation récente de sonde à demeure, infection urinaire, lithiase, fécalome, délire, confusion, dépression, médicaments, surtout de prescription récente, désordres métaboliques, troubles hydro-électrolytiques, troubles de la glycémie, hypoxie.

Un catalogue mictionnel.

L'interrogatoire du patient ou de son entourage doit être soigneux ; il cherchera à préciser les modalités d'installation de l'incontinence : chez la femme, secondaire aux accouchements, à la ménopause, aux interventions gynécologiques ; chez l'homme, en relation avec des pathologies et des interventions urologiques.

Pour mieux préciser le type de cette incontinence, il faut obtenir du patient ou de son entourage un catalogue mictionnel (on y note les mictions, les fuites). On recherchera également des antécédents neurologiques et un éventuel diabète, et l'on évaluera l'état des fonctions supérieures, ainsi que les conséquences sociales de l'incontinence. L'examen clinique s'effectuera vessie vide ; chez l'homme : inspection et palpation des organes génitaux externes, toucher rectal évaluant le volume de la prostate, le tonus des muscles releveurs de l'anus et recherchera un fécalome ; chez la femme, un prolapsus génital sera systématiquement recherché. L'exploration urodynamique va permettre de préciser le mécanisme de l'incontinence qui peut être multiple : elle doit systématiquement être demandée car elle conditionne la prise en charge. Le prolapsus génital est associé dans un cas sur trois à l'incontinence féminine, la pathologie prostatique et ses séquelles à 80 % des incontinences masculines.

Chez les sujets âgés, les techniques faisant appel à la rééducation ont la faveur en première intention, du fait de leur relative innocuité et de la possibilité d'une participation directe du patient à son traitement. Dans 70 % des cas, une guérison ou une très nette amélioration sera constatée. Un traitement anticholinergique (en dehors des contre-indications) peut avoir un intérêt pour stabiliser la vessie, un traitement par alphabloquant peut améliorer le débit urinaire dans le cas d'une obstruction prostatique. Les autres traitements médicamenteux ont peu de place chez la personne âgée, hormis les antibiotiques en cas d'infection urinaire et l'estrogénothérapie locale qui doit être quasi systématique chez la femme en l'absence de contre-indication. Les traitements chirurgicaux de l'incontinence féminine ont progressé depuis l'apparition du TVT, bandelette sous-urétrale permettant de corriger les incontinences d'effort par insuffisance sphinctérienne ; elle pourra aussi compléter la correction d'un prolapsus. En cas d'échec de la rééducation, dans des cas bien définis, il est possible de proposer l'implantation d'un sphincter artificiel. Enfin, le médecin traitant a un rôle majeur pour dédramatiser la situation et conseiller au patient incontinent des matériels absorbants dont la qualité est devenue excellente. Sur le site de l'association d'aide aux personnes incontinentes (http://www.aapi.asso.fr/), les patients trouveront une documentation très complète sur leur problème.

Propos recueillis auprès du Dr M.-F. Maugour (chef de service, hôpital Georges-Clemenceau, Champcueil).

> Dr BRIGITTE VALLOIS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8432