De notre correspondant
Il n'y a pas de drugstore sans un rayon entier consacré aux produits destinés à supprimer l'halitosis, nom scientifique que les médecins américains donnent à l'haleine fétide. Et ces produits revêtent toutes les formes possibles et imaginables : chewing-gums, sprays, liquides divers, bonbons aux fragrances diverses. Le plus nouveau, c'est une bandelette gélatineuse que l'on place dans la bouche et qui, à mesure qu'elle se dissout, détruit les germes.
Le marché représente plusieurs milliards de dollars. Il est parfaitement adapté à une société qui fait de l'apparence physique et de l'image de soi les conditions essentielles de la réussite professionnelle, en dépit du nombre très élevé des obèses. Selon des statistiques fournies par Procter & Gamble, les Américains dépensent plus en produits anti-mauvaise haleine qu'en shampooings. Il reste à savoir si ces produits sont réellement efficaces.
Des composés sulfurés
On sait en effet d'où vient l'haleine fétide : des débris de nourriture qui se collent au fond du palais et que la brosse à dents ne parvient à déloger. C'est un lieu idéal, par la température et l'humidité, pour favoriser la multiplication des microbes. A mesure que la nourriture se décompose, elle dégage des composés sulfurés, d'où l'odeur.
Certains dentistes grognent : ils croient dur comme fer au brossage (trois fois par jour et toujours après le repas) et au fil à dents, qu'ils ont rendu populaire en incitant leurs patients à l'utiliser. Effectivement, si son usage n'est pas exactement élégant, il a l'avantage de débarrasser des débris de nourriture les intervalles très étroits qui existent entre les dents. Les dentistes proposent aussi une sorte de râpe qu'on passe sur la langue et dont les pharmacies sont abondamment pourvues.
Cependant, ces techniques mécaniques et grossières déplaisent au consommateur. C'est pourquoi un fabricant de liquide anti-haleine fétide propose maintenant la bandelette gélatineuse, PocketPaks, qui fait le travail toute seule et très discrètement. C'est tout nouveau et c'est un marché de 100 millions de dollars par an. Mais beaucoup de consommateurs trouvent la bandelette peu confortable. C'est un corps étranger dans la bouche. Voilà pourquoi un fabricant de chewing-gum importe d'Europe une gomme dont l'effet est, selon lui, immédiat.
« Il faut tenir compte de la multiplication des cas de mauvaise haleine. Les Américains ont des nourritures de plus en plus exotiques, de plus en plus épicées, ils en paient les conséquences, explique le porte-parole du fabricant de chewing-gum. Il leur faut désormais des déodorants oraux beaucoup plus puissants que par le passé. »
« La mauvaise haleine est un problème à 40 % et une névrose collective à 60 %, répond le Dr Peter Jacobsen, un professeur de dentisterie à San Francisco. C'est surtout le moyen qu'ont trouvé certaines compagnies pour ouvrir un nouveau marché et faire des profits. »
Un test d'haleine fraîche
Il est vrai toutefois que le sujet a été longtemps négligé par les dentistes américains. A leurs yeux, ce n'était pas une maladie et ils en ont sous-estimé l'importance psychologique. D'autant que les gens ne savent pas nécessairement qu'ils ont mauvaise haleine ; quand ils l'apprennent, ils sont consternés. Le résultat est que tous les citoyens veulent s'assurer que leur haleine est fraîche. Résultat : il y a maintenant des tests. Vous sucez une sorte de bonbon que vous n'avalez surtout pas et, selon la couleur qu'il aura après le contact avec votre salive, il vous dira si vous sentez bon ou non.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature