Une protéase mitochondriale serait impliquée dans la genèse d'un syndrome neurodégénératif murin. Des chercheurs américains viennent en effet d'identifier l'origine génétique ce cette pathologie : il s'agit d'une mutation du gène codant pour la protéase Omi. Cette mutation est associée à une sensibilisation des cellules à la mort induite par le stress. Un homologue de la protéine Omi existe chez l'homme. Le gène codant pour la protéine humaine est localisé près d'un locus de susceptibilité à la maladie de Parkinson (PARK3 sur le chromosome 2). Reste maintenant à découvrir si des mutations de l'homologue humain de Omi sont associées à des maladies neurodégénératives.
Le syndrome neurodégénératif murin dont il est question dans le revue « Nature » a été décrit il y a une dizaine d'année. Les souriceaux atteints montrent une démarche altérée et cessent rapidement de grossir. Les symptômes progressent ensuite vers l'ataxie et une akinésie. Les souris meurent au bout de 40 jours en moyenne. Ces manifestations cliniques sont associées à une dégénérescence neuronale, principalement au niveau du striatum, mais aussi dans le système nerveux central, le tronc cérébral et la moelle épinière. La mutation responsable de l'ensemble de ces symptômes a été baptisée mnd2 pour « motor neuron degeneration 2 ».
Une sérine protéase mitochondriale
Une longue et laborieuse étude génétique a permis à Jones et coll. d'identifier l'origine moléculaire du syndrome mnd2 : il s'agit d'une mutation ponctuelle localisée dans un gène codant pour la protéine Omi, une sérine protéase mitochondriale.
Omi est située dans l'espace intermembranaire des mitochondrie. Au cours de l'apoptose, elle est relarguée dans le cytoplasme des cellules, où elle se fixe aux protéines inhibant la mort cellulaire programmée (les IAP, « inhibitor of apoptosis protein »). Cette interaction conduit à la dégradation des IAP via l'activité protéase de Omi.
Chez les souris mnd2, un acide aminé situé à proximité du site catalytique de l'enzyme Omi est muté. Cette mutation altère la fonction de la protéine : l'enzyme mutée doit être présente à une concentration plus de sept fois supérieure à la concentration physiologique pour qu'une activité protéasique résiduelle puisse être détectée.
Par apoptose ou par nécrose
Jones et coll. ont examiné l'effet de la mutation mnd2 sur la viabilité des cellules. Pour cela, ils ont traité des cellules en culture avec des agents inducteurs de stress cellulaire. En comparaison avec des cellules sauvages, davantage de cellules mnd2 meurent à la suite de ce traitement. La mort des cellules induites par le stress intervient, soit par apoptose, soit par nécrose.
Par ailleurs, Jones et coll. ont observé que la mutation mnd2 augmente la susceptibilité des mitochondries à induire, notamment via les ions calcium, la transition de perméabilité (phénomène par lequel les mitochondries libèrent des molécules apoptogènes en cas de stress cellulaire). Les mitochondries des cellules du striatum étant particulièrement sensibles à la transition de perméabilité induite par le calcium, cette observation permet d'expliquer pourquoi les neurones atteints dans le système nerveux des souris mutantes sont essentiellement des cellules striatales.
A partir de l'ensemble de ces données Jones et coll. ont bâti un modèle s'efforçant d'expliquer comment la mutation mnd2 conduit à la neurodégénérescence même en l'absence de stress cellulaire. Selon eux, la protéine Omi doit posséder deux fonctions distinctes : (1) dans des conditions physiologiques normales, la protéine est nécessaire au maintien de l'homéostasie mitochondriale, mais (2) dans des conditions de stress, elle est relarguée vers le cytoplasme et joue un rôle proapoptotique en dégradant les IAP. Jones et coll. proposent que la forme mutée de Omi ne soit plus capable d'assurer sa fonction dans la mitochondrie et conduise de ce fait à la perméabilisation de la membrane mitochondriale, même en l'absence de stress exogène. Omi et d'autres molécules apoptotiques seraient alors libérées dans la cellule, favorisant la mort cellulaire.
J.M. Jones et coll., « Nature » , publication en ligne avancée sur www.nature.com (doi:10.1038/nature02052).
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