Stratégies thérapeutiques dans l'HTA
Les nouvelles classes d'antihypertenseurs se sont succédé à un rythme régulier au fil des années. Les médecins ont ainsi eu à leur disposition successivement des sympathicolytiques, des bloqueurs ganglionnaires, des vasodilatateurs directs, des diurétiques thiazidiques, des alpha 2 agonistes centraux, des bêtabloquants, des alphabloquants, des antagonistes calciques, des inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), des inhibiteurs du système rénine angiotensine et des antagonistes des récepteurs à l'angiotensinogène II (ARA II).
Tous ont montré leur supériorité comparativement à un placebo. Les recommandations du JNC 6 proposaient en première ligne les bêtabloquants et les diurétiques sur la foi d'études comme Shep ou Stop qui ont mis en évidence une diminution du risque d'accident vasculaire cérébral (AVC), d'ischémie myocardique et de décès d'origine cardio-vasculaire de 40 % environ chez les patients traités.
Des essais plus récents montrent l'intérêt des IEC et des inhibiteurs calciques (IC) sur les événements cardio-vasculaires majeurs ; le risque est diminué de 21 % avec les IEC (Hope, Part2, Quiet, Scat) et de 28 % avec les IC (Prevent, Syst-EUR).
En revanche, les travaux comparant les classes anciennes d'antihypertenseurs avec des familles nouvelles n'ont pas montré de différence notable ; excepté l'étude Life (Losartan Intervention For Endpoint reduction in hypertension study) et l'essai Allhat (Antihypertensive and Lipid-Lowering treatment to prevent Heart Attack Trial), pour lesquelles il convient de réexaminer les résultats avant d'élaborer de nouvelles recommandations.
L'étude Life comparait un ARA II (losartan) à un bêtabloquant (aténolol) chez des hypertendus ayant une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG). Chez 90 % des patients, un diurétique thiazidique était associé. Les auteurs ont observé une diminution de 13 % des événements cardio-vasculaires dans le groupe losartan par rapport au groupe aténolol (p = 0,021). Toutefois, c'est le risque d'AVC qui était réduit de façon la plus nette (- 25,8 % p = 0,0006), alors que les taux de décès d'origine vasculaire et d'IDM n'ont pas différé de façon statistiquement significative dans les deux groupes. Par ailleurs, l'apparition d'un diabète qui était un critère secondaire de l'étude a été significativement moins fréquente dans le groupe ARA II (- 25 % p = 0,001). Enfin, dans le sous-groupe de patients diabétiques inclus dans l'étude, le bénéfice du losartan sur les événements cardio-vasculaires a été plus net dans l'ensemble de la population, avec une baisse des événements cardio-vasculaires de 24,5 % (p = 0,031), des décès vasculaires de 37 % (p = 0,028) et de la mortalité globale de 39 % (p = 0,002).
Allhat est une autre étude récente dont les résultats sont à examiner de près. Elle a comparé un IC (amlodipine), un diurétique thiazidique (chlorthalidone), un alphabloquant (doxazosine, mais ce bras de l'étude a été arrêté prématurément) et un IEC (lisinopril) chez les hypertendus à haut risque cardio-vasculaire. Sur le critère principal de l'étude (les coronaropathies), il n'y avait pas de différence significative entre les traitements. En revanche, sur le critère de l'insuffisance cardiaque, le diurétique s'est révélé plus efficace que l'IEC (RR = 1,19) et que l'IC (RR = 1,38) ; sur celui des AVC, il n'y avait pas de différence entre IC et diurétique et ce dernier faisait mieux que l'IEC (RR = 1,15). En réalité, après une seconde analyse, ces résultats ont été reformulés différemment. En effet, les auteurs ont observé des résultats variables en fonction de l'ethnie. Chez les Noirs, les diurétiques donnent des résultats nettement supérieurs aux IEC et même aux IC (diminution supplémentaire de 4 à 5 mmHg) ; en revanche, dans la population non noire, les IEC ne sont pas inférieurs aux diurétiques. Rappelons que l'étude Aask (African-American Study of Kidney disease and hypertension), qui portait sur des hypertendus Noirs ayant une atteinte rénale non diabétique, a montré l'intérêt des IEC sur l'évolution de la néphropathie.
L'ensemble de ces résultats a compté dans les nouvelles recommandations américaines du JNC 7.
La première étape concerne les modifications des habitudes de vie (traitement du surpoids, exercice physique, consommation modérée de sel et d'alcool...). Dans le cas où ces mesures ne permettent pas de faire baisser les chiffres tensionnels au-dessous de 140 mmHg pour la PAS et de 90 mmHg pour la PAD ou de 130/80 mmHg chez les diabétiques et les patients présentant une rétinopathie, un traitement médicamenteux est mis en route. Les HTA de stade 1 relèvent la plupart du temps de la prescription d'un diurétique ; mais on peut aussi envisager celle d'un IEC, un ARA II, un bêtabloquant, un IC ou une association.
Le traitement des HTA de stade 2 fait appel à l'association d'un diurétique et d'un IEC, un ARA II, un bêtabloquant ou un IC. Si les objectifs thérapeutiques ne sont pas atteints, les posologies sont optimisées ou une troisième classe est associée.
Toutefois, on tiendra compte dans ces choix d'indications complémentaires pour telle ou telle classe d'antihypertenseurs. Ainsi, chez le diabétique, le choix peut porter sur un thiazidique, un bêtabloquant, un IEC, un IC ou un ARA II (NKF-ADD guideline, Ukpds, Allhat) ; en cas d'atteinte rénale, le choix porte sur un IEC ou un ARA II (NKF guideline, captopril trial, Renaal, Idnt, Rein, Aask) ; pour la prévention d'une récidive d'AVC, le choix se porte sur un thiazidique ou un IEC (Progress).
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