Le patient s'assied sur la peinture de sable, réalisée à même le sol, et l'homme-médecine transfère avec ses mains les poudres colorées de la peinture sur son corps : c'est le grand moment de la cérémonie de guérison chez les indiens navajo. Une exposition de peintures de sable présentée jusqu'au 13 octobre à la galerie des Hospices*, à Limoges, permet d'évoquer ces pratiques encore en cours.
L'exposition, intitulée « Hozho, peintures de guérison des indiens navajo », inaugure un nouveau lieu municipal. La galerie des Hospices a été aménagée dans l'aile sud de l'ancien hôpital de Limoges, qui a retrouvé la noblesse de ses deux niveaux datant des agrandissements réalisés par Turgot entre 1766 et 1770. L'hôpital lui-même avait été construit au milieu du XVIIe siècle ; il était tenu par la communauté des surs hospitalières de Saint-Alexis.
Une médecine biculturelle
Les Navajo constituent aujourd'hui la plus grande des nations indiennes d'Amérique du Nord, par sa population (250 000 personnes environ) et par la superficie de son territoire (64 750 km2, l'équivalent de la Belgique), réparti sur trois Etats, l'Arizona, le Nouveau-Mexique et l'Utah.
De leur histoire et de leur culture, les Navajo ont gardé en particulier leur langue et les cérémonies de guérison. Les hommes et femmes-médecine reçoivent même, depuis 1998, des subventions du gouvernement navajo pour transmettre leur savoir aux jeunes qui, eux, ont droit à 300 dollars par mois pour 24 heures mensuelles de formation. En outre, des médecins navajo, formés comme leurs confrères dans les grandes universités américaines, encouragent la pratique d'une médecine « biculturelle » ; ils uvrent pour que dans les hôpitaux de la nation navajo, un ataali (homme-médecine) soit engagé et qu'un hogan (maison cérémonielle) soit intégré dans les structures hospitalières.
L'exposition Hozho (qui, en navajo, veut dire à la fois santé et beauté) réunit des uvres de Fred Stevens II (1922-1983), le premier homme-médecine navajo à avoir fixé ses peintures de sable (avec de la résine et du vernis). Elles proviennent de la collection de Glen Harris, un enseignant qui travaillait non loin de Fred Stevens. Soixante et une peintures de sable sont réparties en cinq séquences correspondant à cinq groupes de cérémonies : la Voie de la bénédiction et de la beauté (un rite protecteur qui accompagne les passages de la vie), les Voies du vent et de la montagne, la Voie de la nuit (curative aussi bien pour un individu que pour un groupe social), les Voies de la perle, de l'eau, de la grande étoile, et enfin la Voie du projectile, la plus puissante.
L'exposition est complétée par une vidéo présentant le point de vue de la médecine occidentale, avec le Pr Jean-Loup Accard, cancérologue, et le Dr Patrice Muller, rédacteur en chef de la revue « Pratiques, les Cahiers de la médecine utopique ». Les deux praticiens participeront le samedi 6 juillet, avec deux hommes-médecine navajo, à une conférence-débat intitulée « Médecine occidentale/médecine navajo : la responsabilité du patient ». Présents pendant une semaine à Limoges, les hommes-médecine feront du 3 au 8 juillet des démonstrations de peintures de sable. Art et savoir, médecine d'ici et médecine d'ailleurs, une passionnante confrontation.
* 2, rue Félix-Eboué, tous les jours, sauf le lundi, de 10 h à 19 h.
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