Certains actes pratiqués dans un contexte diagnostique ou thérapeutique entraînent des douleurs qui peuvent être soit prévenues, soit réduites.
Cependant, certaines catégories de patients sont particulièrement vulnérables, notamment les jeunes enfants, les personnes âgées et les patients en réanimation qui ne peuvent pas s'exprimer. Chez eux, il faut penser systématiquement à prévenir la douleur.
Pour prévenir ou réduire ces douleurs, nous disposons de plusieurs moyens.
D'abord, les anesthésiques locaux, qui entraînent peu d'effets secondaires. C'est le cas de la crème Emla, largement utilisée chez l'enfant, mais pas assez encore chez l'adulte. Elle a obtenu une extension d'utilisation dans les soins d'ulcères. Du fait de son délai d'action, il faut prescrire son application au moins une heure avant le geste programmé. Actuellement, pour les patients qui vont au bloc opératoire, on prévoit de plus en plus systématiquement son application en même temps que la prémédication pour réduire la douleur d'une ponction veineuse par exemple. D'autres anesthésiques locaux, comme la xylocaïne, sont employés avant un sondage vésical, ou systématiquement avant une suture. En sachant qu'il existe actuellement des colles qui permettent des sutures sans agression.
Lorsque les anesthésiques locaux ne suffisent pas à calmer la douleur, il faut employer des antalgiques, tels que le mélange équimoléculaire oxygène-protoxyde d'azote, commercialisé sous le nom de Kalinox. Il s'administre par inhalation à l'aide d'un masque chez l'enfant dès qu'il l'accepte, comme chez la personne très âgée. L'antalgie est obtenue en quelques minutes. Elle est elle-même réversible quelques minutes après l'arrêt de l'administration. C'est un produit dont sera probablement croissant.
Parfois, la douleur induite par le geste est telle qu'il faut employer des médicaments antalgiques adaptés à son intensité. Si les douleurs sont modérées, on utilisera des antalgiques de palier I type paracétamol, en ayant toujours en mémoire les délais d'action du produit. Ailleurs, la douleur est telle qu'il faudra recourir à la prise de morphine par voie orale ou intraveineuse ou sous-cutané. C'est le cas pour certains pansements qui nécessitent l'administration préalable de morphine.
Enfin, certains gestes thérapeutiques ou diagnostiques comme une ponction ostéo-médullaire vont jusqu'à requérir une anesthésie générale de brève durée. Si le traitement de la douleur ne doit pas retarder des gestes salvateurs en cas d'urgence vitale, rapidement il faut penser au soulagement du patient.
Tous ces gestes d'antalgie doivent s'accompagner d'une attitude rassurante, voire relaxante de la part des soignants. En effet, les douleurs induites pourront être prévenues ou réduites de manière importante, au prix d'une organisation de l'antalgie. Au besoin, en faisant appel à une équipe antidouleur de l'hôpital. Car il est certain que les services hospitaliers n'ont pas tous les moyens tant humains que matériels pour assurer cette antalgie. Dans beaucoup d'établissements, il existe un comité de lutte contre la douleur. C'est à ce comité d'impulser une culture anti-douleur, de sensibiliser et de former le personnel soignant à la réduction de ce type de douleur.
Plusieurs comités de lutte contre la douleur ont organisé des enquêtes pour connaître la fréquence des douleurs rencontrées par les patients lors d'actes diagnostiques et thérapeutiques. Un grand nombre de patients disent avoir ressenti une douleur importante soit pour un geste réalisé dans un contexte d'urgence, soit lors d'une ponction ou de la mise en place d'un drain. C'est à ce prix que l'on pourra prévenir et réduire efficacement toutes ces douleurs.
D'après un entretien avec le Dr Stéphane Donnadieu, hôpital Georges-Pompidou, Paris.
Un livre sur l'histoire de la douleur
L'évolution des pratiques et des savoirs relatifs à la douleur en Occident est retracée, de l'Antiquité grecque au XXè siècle, dans le livre de Roselyne Rey : « Histoire de la douleur *». L'auteur confronte les théories médicales imaginées au fil des époques pour élucider, à chaque période, les mécanismes et les thérapeutiques mises en oeuvre pour soulager le patient. L'expérience de la douleur, incompréhensible et incommunicable, souvent source de connaissance de soi, est partagée par tous, ce qui lui confère une dimension sociale et culturelle inconstestable. Cet ouvrage souligne la transformation du rapport des hommes à la douleur, les progrès accomplis dans sa compréhension et dans son traitement. « La douleur est probablement pour le médecin comme pour le malade une remise en cause des rôles traditionnellement dévolus à chacun », conclut très justement l'auteur.
* Editions La Découverte et Syros, Paris. Posts-face de J. Cambier, professeur de clinique neurologique, membre de l'Académie de médecine, et de J.L Fischer, chargé de recherche au CNRS.
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