L’AP-HP jouerait-elle les promoteurs immobiliers ? La première pierre de l’Institut de la vision à peine posée, les Prs Gérard Saillant (Pitié-Salpêtrière), Yves Agid (neurologie, Pitié-Salpêtrière) et Olivier Lyon-Caen (neurologie, Pitié-Salpêtrière) annonçaient le 26 septembre la construction prochaine de l’institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM) sur le site de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris).
L’ICM se présente d’emblée comme le principal vivier de la recherche en neurosciences. Le futur institut – un bâtiment de 22 000 m2 sur un terrain de 4 400 m2 – devrait accueillir quelque 600 chercheurs internationaux répartis dans 60 à 80 équipes scientifiques et fédérer un réseau de centres en neurosciences partout dans le monde.
Fondation d’utilité publique.
«Notre philosophie est de mettre le patient au coeur de l’ICM où tout est pensé pour que les découvertes passent directement de leur achèvement à leur application sur le malade», indique G. Saillant. Du jamais vu dans l’Hexagone.
Ce projet considérable répond à une urgence de santé publique. En France, entre autres pathologies, les infarctus cérébraux frappent 150 000 personnes par an, la maladie d’Alzheimer touche 500 000 patients, l’épilepsie 400 000, et on dénombre 80 000 cas avérés de sclérose en plaques. C’est probablement cette litanie médicale qui explique le décret du gouvernement accordant, le 13 septembre dernier, le statut tant convoité de « fondation d’utilité publique de recherche » à l’ICM. Et a décidé l’organisme, sous l’impulsion de son trio fondateur – Gérard Saillant, Yves Agid et Olivier Lyon-Caen –, de passer sans plus attendre à l’action. L’institut existe déjà, mais hors les murs. L’inauguration d’une IRM de recherche 3 Teslas à la Pitié-Salpêtrière, ce même 26 septembre, a lancé dans la foulée sa mise en route pour la fin de l’année : six équipes sélectionnées par le conseil scientifique de l’institut devront l’intégrer en janvier 2007.
L’ICM privilégié ?
L’arrivée de l’ICM dans le paysage français de la recherche aiguise pourtant la curiosité. Doté de la technologie dernier cri – notamment un plateau technique d’imagerie par résonance magnétique nucléaire –, entièrement financé à hauteur de 67 millions d’euros avant même sa construction, il pourrait faire de l’ombre aux « plus petits ».
L’ICM obtient de facto une IRM pour la recherche (car il est hors cadre sanitaire), alors que Paris et la région francilienne souffrent d’un retard sur le plan de l’imagerie médicale. En outre, l’IRM de l’institut du cerveau et de la moelle épinière est le premier dans Paris intra muros depuis une décennie, celui de l’hôpital Sainte-Anne étant réservé à l’activité clinique et ce malgré la nécessité d’investigations en psychiatrie. «On ne cherche pas à concurrencer, prévient Yves Agid. Des conventions vont se mettre en place avec d’autres établissements, dont Sainte-Anne. Un ensemble cohérent est à créer.»
L’institut se veut donc «une plate-forme pour les chercheurs». Reste à fédérer un ensemble disparate pour gagner en efficacité. Si une fusion avec la Fédération de recherche clinique, à l’origine de l’opération Neurodon, n’est pas à l’ordre du jour, «il sera peut-être nécessaire de se rapprocher sur un plan médiatique pour ne faire qu’un appel aux dons», poursuit-il. De même, l’ICM prévoit de se raccorder au centre de ressources biologiques de la Pitié-Salpêtrière, qui dispose de 30 000 échantillons, plutôt que de rapatrier dans ses murs les nombreuses banques d’ADN et de tissus céphalo-rachidiens. En voulant renforcer la recherche contre les pathologies neurologiques et psychiatriques, l’ICM met en avant le manque de stratégie globale de nos instituts de recherche. Et milite pour jouer collectif.
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