DES TRAVAUX sont menés sur les rapports entre l'hyperinsulinisme et la maladie d'Alzheimer (MA). Ils tendent à montrer que l'hyperinsulinémie induit une inflammation et est un facteur de risque de la MA. On sait aussi que des phénomènes inflammatoires ont été impliqués en tant que facteurs pathogéniques dans la MA, et on suspecte que cela passe par des effets sur la protéine bêta-amyloïde. Les patients souffrant d'une MA ont une augmentation dans le liquide céphalorachidien (LCR) des cytokines inflammatoires et des marqueurs de la peroxydation des lipides. Mark Fishel et coll. se sont intéressés à ces phénomènes liant l'inflammation, l'insuline et la physiopathologie de la MA et confirment ces notions chez des volontaires sains.
Ils ont mené une étude chez 16 adultes âgés en moyenne de 68,2 ans (ayant de 55 à 81 ans) selon un protocole randomisé en croisé. Tous les matins, chacun des participants a reçu, alors qu'il était encore à jeun, soit une perfusion saline simple, soit une perfusion contenant de l'insuline (1 mU/kg/mn) et associée à du dextrose pour maintenir l'euglycémie. Le dessein était d'aboutir à des taux d'insuline plasmatique correspondant à l'insulinorésistance. On a mesuré différents marqueurs de l'inflammation (IL1 alpha, IL1 bêta, IL6, TNF-alpha...) dans le plasma et le LCR au terme d'une perfusion qui a duré environ 105 minutes.
Les résultats démontrent que l'insuline provoque une induction de l'inflammation, comme en témoignent les taux des marqueurs, le phénomène étant manifeste à la fois dans le plasma et dans le LCR. « Un hyperinsulinisme modéré est à même d'augmenter le risque de MA », concluent les auteurs.
L'insulinorésistance périphérique.
« Nos résultats peuvent s'intégrer dans un modèle décrivant le rôle de l'insulinorésistance périphérique et de l'hyperinsulinisme dans la pathogénie de la MA. » Selon ce modèle, au cours des phases précoces de la MA, un taux élevé d'insuline plasmatique augmenterait le taux de bêta-amyloïde, à la fois en induisant sa libération, mais aussi en inhibant sa clairance, ce que fait l'enzyme de dégradation de l'insuline. Les précurseurs du bêta-amyloïde sont transportés du plasma vers le cerveau en quantité plus importante, tout comme le transport inverse du SNC vers la périphérie peut être inhibé.
Cytokines proinflammatoires.
Les cytokines pro-inflammatoires sont promotrices de la synthèse de la protéine bêta-amyloïde au niveau du SNC. Il existe un phénomène d'amplification, car la protéine bêta provoque à son tour une réponse inflammatoire plus importante. Et, en outre, l'inflammation prolongée est à même d'exercer des effets délétères indépendamment de la protéine bêta-amyloïde.
Ce modèle a une pertinence évidente dans le cadre du diabète. Mais l'hyperinsulinémie et l'insulinorésistance sont des altérations métaboliques fréquentes chez des adultes non diabétiques, étant associées à l'obésité, aux troubles de la tolérance au glucose, aux maladies cardio-vasculaires, à l'HTA...
« Ce modèle a aussi un intérêt dans le cadre de l'épidémie actuelle de ces états pathologiques et du vieillissement de la population occidentale. » Il peut rendre compte d'une augmentation de la prévalence de la MA. Et, évidemment, une meilleure compréhension du rôle de l'insuline dans la pathogénie de la MA pourrait conduire à découvrir des traitements et à mettre en place une nouvelle stratégie de prévention.
« Arch Neurol », sur www.archneurol.com, le 30 août 2005.
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