AVEC L'ÉDUCATION, la santé emploie l'un des plus gros bataillons de fonctionnaires du pays. Plus d'un million de Français travaillent à l'hôpital. Face à un tel poids lourd de la fonction publique, aucune formation politique ne peut se payer le luxe de froisser le monde hospitalier à la veille de scrutins nationaux.
Les promesses en direction de ce secteur, pourtant, ne déferlent pas. A gauche comme à droite, les candidats à l'élection présidentielle sont plus enclins à flatter d'autres franges de l'électorat. Peut-être les aspirants à l'Elysée peinent-ils à définir un message unique et fédérateur, alors que l'hôpital abrite des catégories socioprofessionnelles hétéroclites, animées par des intérêts différents. Les balbutiements de la nouvelle gouvernance hospitalière prouvent combien les corporatismes sont encore vivaces dans les établissements : les directeurs font des pieds et des mains pour pouvoir nommer à leur guise les médecins, lesquels ont obtenu, contre l'avis des directeurs, le maintien des chefferies de service. Les soignants ont le sentiment que cette réforme a été faite sans eux.
Prudence des discours politiques.
Lancée par la droite, la nouvelle gouvernance hospitalière, avec les autres réformes du plan Hôpital 2007, n'a fait l'objet que de rares commentaires de la part des candidats à la présidence de la République. Tous se font forts de rappeler leur attachement à cette grande institution française, garante d'une certaine égalité dans l'accès aux soins des citoyens.
Pour le reste, il faut éplucher dans le détail les projets en santé des partis pour se faire une idée des orientations stratégiques que chacun compte développer pour l'hôpital.
Si les candidats sont plutôt discrets sur la question, c'est sans doute qu'ils craignent de mettre à feu et à sang une communauté de soignants souvent prompte à réagir au quart de tour au moindre faux-pas.
Un épisode récent a marqué les esprits : l'absence d'anticipation de la canicule en 2003 a sans doute coûté son poste de ministre à Jean-François Mattei.
Certes, l'hôpital d'aujourd'hui est moins en surchauffe qu'alors, mais il demeurerait «en crise», «au bord de l'implosion». Cette description alarmiste relayée par les syndicats incite sans doute à la prudence des discours politiques. Le passage précipité aux 35 heures, Lionel Jospin l'a lui-même reconnu, a plongé les hôpitaux dans le marasme. A cet état de fait s'ajoute l'impression, largement répandue chez les hospitaliers, que les moyens diminuent et que les conditions de travail se dégradent. Les hôpitaux, au même titre que les médecins libéraux, sont priés de faire des économies pour aider l'assurance-maladie à revenir à l'équilibre financier. Régulièrement, les syndicats montent au créneau pour défendre l'emploi, la formation et les revenus. Le quinquennat qui s'achève, comme le précédent, a été émaillé de grèves à répétition. Plusieurs fois par an, les blouses blanches manifestent au pied du ministère de la Santé. Le risque d'un embrasement de la communauté hospitalière explique sans doute combien sont discrètes les propositions des candidats à l'élection présidentielle pour l'avenir de l'hospitalisation française. Un pan de l'économie qui, pourtant, représente 4 % du produit intérieur brut français.
Le Cnps écrit aux candidats
Le Centre national des professions de santé (Cnps) a écrit aux candidats pour leur demander de préciser leurs intentions sur l'avenir de l'exercice libéral.
Les professionnels de santé libéraux, explique notamment le président du Cnps, le Dr Dinorino Cabrera, «sont inquiets pour leur avenir car les objectifs des dépenses de l'assurance-maladie (Ondam) votés par le Parlement ces dernières années font constamment la part belle à l'hôpital au détriment des soins de ville».
Or, poursuit-il, «tout devrait concourir à l'inverse, du fait notamment du raccourcissement des durées de séjours hospitaliers, du développement des alternatives à l'hospitalisation ou de la sortie de médicaments très onéreux de la réserve hospitalière et désormais délivrés en ville».
Les professionnels libéraux «participent, avec succès, à la maîtrise des dépenses sur des bases médicales, ils souhaitent cependant, précise encore le président du Cnps, être étroitement associés à l'élaboration des objectifs en matière de santé publique et d'évolution des dépenses».
Enfin, le Cnps se dit inquiet du projet de la Commission européenne de revenir sur la limitation des capitaux extérieurs à une profession de santé dans le cadre des sociétés d'exercice libéral.
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