RIEN. Pas de décor. Un pauvre rideau de toile bise. Comme un rugueux drap d'hôpital. L'homme, en costume sombre, veste de soirée sur pantalon noir, finira dans le pyjama blanc des malades… Le personnage combattant, dans la distance, les angoisses, les terreurs de l'hôpital, finira comme un maigre pantin, objet des soins, des attentions des autres. Finira un peu vaincu.
Mais pas complètement puisque, justement, Jean-Luc Lagarce a écrit « l'Apprentissage ». L'apprentissage de la maladie, celui des règles du savoir-vivre dans la société médicale…
On reconnaît sa voix. Cette manière qu'avait Jean-Luc Lagarce de reprendre un mot pour le lancer plus loin. Un style. Ici, dans la sobriété d'un espace nu, éclairé avec tact (Xavier Mélot), et qu'anime quelques sons choisis avec parcimonie (Jean de Almeida), Sylvain Maurice dirige avec finesse un interprète remarquable qui trouve l'exacte vérité de ce texte très sombre et parfois drôle, un texte terrible que l'on écoute avec une attention fascinée.
C'est toujours la même chose : on connaît la fin de l'histoire. Il en est mort, Jean-Luc Largarce, de la méchante maladie qui a fauché tant de jeunes gens dans ces années là… aussi chacun de ses mots est-il déchirant car il y a dans ce qui se donne pour un récit, et qui est un récit, la crudité sans complaisance du reportage. Du témoignage.
On peut dire : un homme s'éveille, se réveille. Dans un lit d'hôpital. Il sort du coma. On lui raconte. On le dépossède d'une partie de son être en lui parlant à la troisième personne. Mais sa lucidité est telle qu'il peut s'en amuser, s'amuser. Nous faire rire.
Alain Macé prend avec une fermeté sans démonstration cette parole. Il est fin, nerveux. Il respecte jusqu'aux silences. Lorsqu'il écrivit « l'Apprentissage », Jean-Luc Lagarce mettait en scène « le Malade imaginaire », la pièce ultime de Molière qui mourut en la jouant… On saisit dans le timbre de l'interprète, dans ses manières d'articuler cette langue fascinante, de respecter cette musique, le chagrin définitif du jeune et grand écrivain… Du beau et bouleversant théâtre.
Les Déchargeurs, à 19 h tous les jours du mardi au samedi. Durée : 1 h sans entracte (0.892.70.12.28). Les écrits de Jean-Luc Lagarce sont publiés aux Solitaires Intempestifs.
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