ON NE PEUT songer à l’avenir immédiat sans d’abord donner un coup de chapeau à un homme, François Hollande sur lequel pas un parieur n’aurait misé un centime il y a un an. Il a certes été servi par des circonstances exceptionnelles, depuis la disparition politique de Dominique Strauss-Kahn jusqu’à l’antisarkozysme effréné que Nicolas Sarkozy a attisé lui-même par des comportements sur lesquels il n’est pas utile de revenir. Mais M. Hollande s’est lancé dans l’aventure quand il ne semblait disposer d’aucun atout et quand il était l’objet des quolibets répétés de ses amis socialistes. La crise économique et sociale a certainement donné un élan à sa candidature ; encore fallait-il qu’il franchît le cap des primaires socialistes. C’est à ce moment-là, sans doute, qu’il a montré le meilleur de lui-même et qu’il est devenu un candidat plus crédible que tous ses adversaires.
Il n’est pas non plus interdit de constater, en ce qui concerne le président battu, qu’il a au moins fait en sorte de ne pas être pulvérisé par le candidat socialiste et qu’il a su réunir autour de son nom, pourtant traîné dans la boue depuis des années, une minorité aussi honorable et même meilleure que celle de Ségolène Royal en 2007. Mais la pente sur laquelle le faisait glisser le rejet populaire était trop forte, et l’image du président protecteur qu’il n’a pas su cultiver pendant une campagne finalement ratée n’aura pas suffi. On suppose qu’il s’est enfin convaincu de l’inefficacité de sa stratégie, uniquement axée sur la séduction des électeurs du Front National. Son successeur à l’UMP devra trouver tout autre chose que des débats ineptes sur l’identité nationale pour empêcher le plus grave, c’est-à-dire la décomposition du parti et le très inquiétant renforcement de l’extrême droite, qui deviendrait alors la seule alternative à la gauche.
Le problème, d’ailleurs, est moins celui de la droite classique que celui du pays en général et de la gauche en particulier, dont les attitudes à l’égard du FN, jusqu’à présent, ont oscillé entre le mépris ou l’indifférence. L’énergie qui fait progresser le Front n’a guère été affaiblie par le mélenchonisme aigu d’avant le premier tour. La gauche ne saurait nier qu’il existe un vote d’adhésion au FN chez les jeunes, chez les ouvriers et chez les précaires, lesquels devraient tous faire partie de la clientèle du PS. En dépit de sa victoire « historique », le président Hollande doit commencer à s’inquiéter de cette défection.
M. Hollande l’a dit lui-même, un peu avant le second tour, en répondant à une question sur les premiers mots qu’il prononcerait après son éventuelle victoire : « C’est maintenant que les ennuis commencent. » Ils commencent donc avec l’état politique d’une France qui a rarement été aussi divisée. Qui est très affaiblie économiquement, politiquement, stratégiquement. À laquelle l’ex-candidat socialiste a fait beaucoup de promesses coûteuses que le président actuel ne tiendra qu’au détriment de ses comptes ou qu’il oubliera au détriment de ses électeurs.
Cependant, dès lors que M. Hollande est élu, il est préférable qu’il aille vite. En premier lieu, il lui faut une majorité parlementaire, qu’il devrait obtenir sans trop d’efforts. Dans les jours qui viennent, il y a plusieurs rendez-vous internationaux à respecter. M. Hollande a eu l’occasion de dire qu’il ferait en Allemagne son premier voyage de président. On lui souhaite de renforcer l’axe franco-allemand, récemment affaibli par la trop grande domination allemande et auquel il faudra éviter les incompatibilités d’humeur entre une Angela Merkel conservatrice et un François Hollande socialiste. Dès lors que l’ex-candidat désormais président nous assurait naguère qu’il avait un programme d’action précis, rien ne lui interdit de transformer le couple Paris-Berlin en un ménage à trois avec Rome, le sérieux du président du Conseil italien, Mario Monti, apportant une caution supplémentaire à la rigoriste Merkel. Socialiste ou pas, M. Hollande doit aussi rassurer les marchés, malgré le mépris qu’ils lui inspirent. On l’a assez dit : il n’y a plus de pays complètement indépendant et la gestion de notre dette dépend de la confiance que nous inspirons. Enfin, on espère que le nouveau président sera capable de gérer les divisions de son parti d’origine et les ambitions qui s’y manifestent. Ce ne sera pas sa tâche la plus aisée.
François Hollande ou l’efficacité de la constance
M. HOLLANDE ÉTANT ÉLU, IL VAUT MIEUX QU’IL AILLE VITE
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