APPELER son bateau « le Rêve de Cassandre », c'est bien sûr s'exposer à de sombres perspectives. Les deux frères incarnés par Colin Farrell et Ewan McGregor dans le film du même titre de Woody Allen, – le troisième et dernier de sa « trilogie londonienne » –, n'ont pas les moyens à la hauteur de leurs rêves. L'un travaille dans un garage et joue (courses de lévriers, poker...) des sommes empruntées à des individus douteux. L'autre travaille avec son père dans le restaurant familial, en difficulté, et tombe amoureux d'une jeune actrice aux goûts dispendieux.
Et voici, du côté des Cockneys, la tragédie grecque, avec laquelle le réalisateur voit «des connivences», et la sombre atmosphère dostoïevskienne. «Quiconque a lu les romans russes ne peut qu'en subir l'influence. C'est impossible d'y échapper», explique Woody Allen. Ce n'est certes pas la première fois qu'il succombe à la tentation d'abandonner l'humour, fut-il existentiel, pour un drame que la musique de Philip Glass rend encore plus noir. Mais il pimentait son récit d'un soupçon de parodie et d'une larme d'autodérision que l'on peine à retrouver ici.
Les acteurs sont bien dirigés et jouent le jeu, les deux cités ci-dessus mais aussi Tom Wilkinson ou les pétillantes Hayley Atwell et Sally Hawkins. La mise en scène est soignée et intelligente. Et on accepterait même de ne pas sourire. Le problème est que rien ne nous surprend et ne nous fait vraiment frémir. Pour être honnête, on n'est pas non plus très surpris ni frémissant devant « l'Heure zéro », inspiré au sympathique Pascal Thomas par un roman du même titre d'Agatha Christie. Car les ingrédients sont ultraconnus : quelques membres d'une même famille réunis dans une maison isolée à la campagne (ici au bord de l'océan en Bretagne), un héritage, un crime dans la nuit, un enquêteur astucieux, des liens secrets et quelques rebondissements. Mais le cinéaste de « la Dilettante », grand lecteur, depuis l'adolescence, de la romancière anglaise, dont il a adapté récemment « Mon petit doigt m'a dit », sait jouer avec les faux-semblants, les masques et les codes policiers sans se prendre au sérieux. Avec cette petite distance, ce deuxième degré indispensables, qu'on se targue de délivrer un message ou qu'on ait simplement envie de raconter une histoire. Et une mise en scène tout en finesse et en vivacité.
Le plaisir est donc de retrouver des quasi-stéréotypes interprétés avec fantaisie. C'est ainsi que jouent l'excellente brochette d'acteurs réunis pour l'aventure : Danielle Darrieux, qui, comme le dit Thomas, a apporté «son incroyable plaisir de jouer, sa grande fantaisie, son passé si riche, sa beauté, sa vitalité»; Laura Smet, qui met toute son énergie retrouvée à incarner une charmante mais hurlante peste ; Chiara Mastroianni, toute en douceur et en retenue ; Melvil Poupaud, le plus joueur de tous, sous ses allures élégantes. Et encore François Morel, le commissaire, Alessandra
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