LE PREMIER CONSTAT, c’est que les socialistes disposent désormais de tous les leviers du pouvoir : non seulement, ils obtiennent une majorité supérieure, à l’Assemblée, à celle de 1981, mais ils ont aussi le Sénat, les villes et les régions. François Hollande peut donc être assuré d’appliquer son programme sans redouter l’opposition minoritaire, et sans craindre davantage la surenchère du Front de gauche ou la contestation des Verts. C’est l’enseignement le plus fort du second tour. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault risquait en effet d’avoir besoin de voix d’appoint pour des décisions qui seront fatalement douloureuses, compte tenu de la crise économique et sociale. Ce ne sera pas le cas.
Pouvoir généreux.
Ce qui ne signifie pas non plus – et c’est le deuxième constat – que l’omnipotence socialiste conduira nos gouvernants à faire, en toute circonstance, les choix les plus efficaces : le sentiment de ne risquer aucune sanction politique pendant cinq ans peut les conduire à prendre des décisions précipitées au nom d’une majorité forte. Dès hier, François Hollande devait s’engager dans la recherche de solutions à la crise de l’Europe. Les idées qu’il a eu l’occasion d’exprimer dans ce domaine, et les remarques désagréables proférées à ce sujet par la chancelière allemande témoignent d’une brusque tension entre Paris et Berlin. S’il est vrai que le chef de l’État est fondé à exposer une politique européenne différente de celle de son prédécesseur, on n’en est pas moins inquiet d’une ambiance alourdie et peu favorable à la recherche d’un accord européen qui doit être urgent, définitif et capable donner à la zone euro une stabilité financière durable. M. Hollande a le droit d’avoir ses propres idées, il n’a pas celui de provoquer un clash avec Berlin, qui ne ferait qu’achever la monnaie unique et transformerait en chaos la crise de la dette.
La confiance témoignée par le peuple aux socialistes leur donne tous les pouvoirs mais les enferme en même temps dans leurs promesses. Il est de tradition que les législatives confirment le résultat de la présidentielle. Mais avec la majorité absolue, le PS a reçu un encouragement particulier, celui de poursuivre ce qu’il a amorcé depuis le 6 mai. Il ne faut pas s’y tromper : les Français ont été séduits par la simplicité et la gentillesse du président « normal » ; ils ont été soulagés par une forme de gouvernance diamétralement opposée à la précédente ; malheureusement, beaucoup d’entre eux ont été encore plus sensibles à la réforme de la réforme des retraites et aux nouvelles dépenses annoncées par l’Élysée. C’est le pouvoir généreux qu’ils ont approuvé et renforcé, pas celui qui, s’il a un minimum de réalisme, devra réduire les dépenses de façon draconienne. Réduire les dépenses, c’est, inévitablement, diminuer les budgets sociaux. Non seulement une telle diminution n’est pas conforme au credo socialiste et, dans ce cas, le pouvoir échouera au nom de l’idéologie, mais elle est extraordinairement difficile à entreprendre. Le vrai courage, pour le président Hollande, consistera à rééquilibrer les comptes avec l’autorité que lui confère sa majorité plutôt que de distribuer des cadeaux à ceux qui ont voulu cette majorité.
M. Hollande envisage en outre une réforme profonde la Constitution. Il est bien mieux placé que Nicolas Sarkozy pour l’entreprendre. Les législatives de cette année ont fait entrer au moins deux représentants du Front national à l’Assemblée. La gauche, comme la droite avant elle, parle avec insistance de l’introduction d’une dose de proportionnelle dans le scrutin. La dernière fois que cette réforme a été adoptée, le FN a eu 35 députés. C’était en 1986. Ce n’est que justice ! s’exclame-t-on partout. Sauf que l’objectif du Front, c’est d’en finir une fois pour toutes avec la droite classique. Beaucoup de citoyens ne souhaitent pas avoir le choix entre le PS et le FN.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature