LE 31 JUILLET 2007, le Dr X (il préfère garder l'anonymat), généraliste en Corse-du-Sud, est de garde dans le cadre de la permanence des soins. À 23 h 30, il reçoit un appel du Centre 15 pour aller visiter un patient souffrant. Comme à l'accoutumée, il effectue cette visite avec son scooter personnel, mais, sur le chemin du retour, il est victime d'un accident de la route. Le Dr X s'en sort avec trois côtes cassées, le coude fracturé, ainsi que des plaies et brûlures sur une bonne partie du corps, et il est placé en arrêt de travail pour 21 jours. Il porte plainte pour coups et blessures (son accident est dû à un pneu de voiture lancé sur lui par des adolescents), mais, selon son entourage, aucune enquête n'est diligentée par la police.
Se trouvant en mission de service public au moment des faits (durant l'examen du PLFSS 2007 voté en 2006, les députés ont adopté un amendement faisant de la PDS une mission de service public), le Dr X s'adresse à sa caisse primaire d'assurance-maladie pour obtenir réparation des dommages subis. Il se remémore en effet qu'à l'automne 2006 Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, avait indiqué que les médecins participant à la PDS pourraient, dans le cadre de cette mission de service public, bénéficier du statut de collaborateur occasionnel du service public (COSP), et pourraient en conséquence disposer de substantielles protections assurantielles.
Le refus de la CPAM.
Mais la caisse primaire lui répond le 31 janvier 2008 qu'elle «ne peut donner satisfaction à sa demande, dans la mesure où elle ne peut déroger à l'exigence de respect des textes qui fondent sa mission de service public. En effet, pour être couvert par le régime général pour les risques AT et MP, les médecins libéraux doivent souscrire à l'assurance volontaire AT-MP (accident du travail-maladies professionnelles) moyennant une cotisation supplémen- taire. Or il s'avère que le DrX à la date des faits n'adhérait pas à cette assurance». Parallèlement, le Dr X avait envoyé un courrier au Premier ministre François Fillon le 2 octobre 2007 pour lui exposer sa situation. Celui-ci l'avait renvoyé vers Roselyne Bachelot, qui avait elle-même renvoyé le dossier au directeur de la Sécurité sociale et à la directrice de la DHOS, et en avait informé le Dr X par courrier du 19 décembre 2007. Mais le Dr X reste sans réponse à sa demande à ce jour. Or le préjudice est réel, car outre la cessation totale d'activité durant trois semaines en pleine saison estivale, le Dr X, choqué par l'accident autant que par l'absence de réaction des services de l'État, a cessé de s'investir dans la permanence des soins, qui lui apportait pourtant un complément de revenus non négligeable, qu'il évalue à près de 2 000 euros par mois. À telle enseigne que le conseil départemental de l'Ordre de Corse- du-Sud a dû lui adresser à deux reprises des aides financières à titre confraternel.
Le Dr Jean Canarelli, président du CDOM de Corse-du-Sud, s'interroge d'ailleurs sur ce sujet : «Comment un libéral en mission de service public est-il couvert? C'est toute la question. Cette absence de réponse est un élément démotivant de plus pour la participation à la PDS.»
En attendant réparation, le Dr X a fermé son cabinet et en a rouvert un autre, dans un secteur plus rural. Il espère que, dans ce secteur, il pourra participer à la PDS sans risque pour sa vie.
> HENRI DE SAINT ROMAN
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