Les proches de malades chroniques et qui s'en occupent, sont eux-mêmes à risque de connaître de sérieux problèmes de santé. Et, selon l'équipe de Janice Kiecolt-Glaser et Ronald Glaser (Ohio, Etats-Unis), une élévation anormale des taux d'interleukine 6 pourrait en être responsable. La piste de cette cytokine a été explorée car elle est connue pour majorer les risques d'affection sérieuse chez les plus âgés (maladies cardiaques, polyarthrite, ostéoporose, diabète de type 2 ou cancers).
Le travail, publié dans les « Proceedings of the National Academy of Sciences » est l'ultime étape d'une étude à long terme concernant les conjoints ou les proches maternant des déments ou des Alzheimer. Les chercheurs ont pu enrôler 117 « soignants » et les ont comparés à 106 sujets témoins. Tous les participants ont subi des tests psychologiques afin d'évaluer leur niveau de stress, de dépression et de sentiment de solitude. Le bilan a été réalisé à l'entrée dans l'étude, puis au moins deux fois par an tout au long des six années de suivi. Les auteurs précisent qu'à l'enrôlement près d'un quart des malades étaient déjà décédés, 50 autres ont disparu au cours du suivi. Malgré ces décès, les « soignants » ont continué à être suivis. Des bilans biologiques ont été ajoutés à l'évaluation psychologique, dont l'IL6.
Taux d'IL6 quatre fois plus élevé
Par rapport aux témoins, le taux d'IL6 était quatre fois plus élevé chez les proches de malades, avec de possibles implications sur la morbidité de ce sujets. Pour les auteurs, il s'agit d'une piste clé expliquant le rôle du stress sur la santé des plus âgés. Il pourrait accélérer les risques d'affection, voire de décès.
L'étude ne s'achève pas sur cette conclusion. Les médecins américains se sont aperçus qu'après le décès du malade, l'IL6 conservait un taux anormalement élevé. L'absence d'amélioration après que le « devoir de soins » se fut achevé serait en rapport avec des mécanismes à la fois psychologiques et biologiques. Le stress et la dépression peuvent altérer de façon permanente la réponse du système immunitaire. Mais les chercheurs ont été surpris de l'absence de rebond immun à la fin de la période deuil, comme cela avait été décrit auparavant.
La même équipe avait déjà mis en évidence une action défavorable du stress sur certaines immunités postvaccinales et, lorsqu'il est très marqué, sur la cicatrisation. Ils ont également suggéré que des événements stressants brefs tels que des discussions ou le passage de tests peuvent avoir une action défavorable.
« Proc Natl Acad USA », 1er juillet 2003.
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