Alors que quelque 40 % des accouchements prématurés sont attribués à un phénomène inflammatoire, le reste est dit idiopathique... et donc sans cause déclenchante retrouvée. Pourtant, chez l'humain, une sous-nutrition ou un stress, en début de grossesse, a déjà été incriminé. Mais les preuves manquent. C'est un argument de plus en faveur d'une composante nutritionnelle qu'apporte une équipe composée de Canadiens, Néo-Zélandais et Australiens, dans « Science ».
Le travail de Frank H. Bloomfield (Toronto) et coll. a été mené chez la brebis. Et si leurs conclusions ne peuvent être directement extrapolées à la femme, elles ouvrent une voie de réflexion sur un moyen de prévention des accouchements prématurés et de leur morbi-mortalité.
La montée du cortisol plasmatique
La brebis a été retenue comme animal d'expérimentation car l'accouchement est déclenché, chez elle, par une montée du cortisol plasmatique. Elévation retrouvée dans toutes les espèces étudiées. Dix-huit brebis, portant un seul agneau, ont été séparées en deux groupes. Huit s'alimentaient à volonté. Les dix autres ont été sous-alimentées, de façon à provoquer une perte de poids de 15 %, de soixante jours avant la conception au trentième jour de gestation. Elles ont eu ensuite liberté de se nourrir ad libitum. Tous les ftus ont subi des contrôles réguliers des taux de cortisol et d'ACTH.
Les brebis sous-alimentées ont agnelé en moyenne à 139 jours, les huit autres à 146 jours (gestation ovine : 145 jours). Le cortisol plasmatique des agneaux nés de brebis sous-alimentées s'est élevé plus précocement. Chez la moitié de ces brebis, il a également augmenté plus tôt. Le taux d'ACTH ftal était également plus haut.
Par sécurité, les chercheurs ont pu éliminer une infection maternelle, grâce à la normalité des taux d'interleukine 6 et de Tumor Necrosis Factor-alpha.
De l'hypothalamus aux surrénales
Reste à comprendre comment une modeste réduction alimentaire, avant et peu après la conception, peut entraîner de telles conséquences chez la brebis. De fait, les besoins nutritionnels d'un ftus de 30 jours sont faibles. La sous-alimentation maternelle ne devrait avoir que peu d'incidence sur la croissance de l'agneau. Les auteurs s'orientent donc vers l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien. La carence alimentaire semble accélérer la maturation de cet axe chez le ftus. Lorsqu'il atteint un certain palier, il met en route la boucle hormonale. La production d'ACTH de concert avec celle de cortisol peut alors déclencher le travail. Dans l'étude, ce palier n'aurait été atteint que chez la moitié des agneaux issus de brebis sous-alimentées.
Les chercheurs font un parallèle avec les femmes. En effet, la moitié de celles qui entrent prématurément en travail accouchent en fait avant terme. En outre, la grossesse est plus courte chez les femmes aux faibles réserves nutritionnelles en début de grossesse.
« Science », vol. 300, 25 avril 2003, p. 606.
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