Mai 2011 : un enfant de 11 ans retrouvé pendu à son école par le col de son tee-shirt. Janvier 2011 une fillette de 9 ans souffrant de diabète se jette du 5e étage de l’appartement familial. Septembre 2011 : un garçon de 12 ans se suicide par asphyxie …. Si le suicide des enfants est considéré comme très rare par les psychiatres, plusieurs faits divers ont récemment mis en lumière cette réalité. Pour tenter d’éviter ces drames « impensables », Jeannette Bougrab , secrétaire d’état chargée de la jeunesse et de la vie associative, a demandé à Boris Cyrulnik un rapport sur le suicide des enfants, que le neuropsychiatre lui a remis le 29 septembre dernier. En parallèle, le rapport est publié chez Odile Jacob*, afin que tous les Français puissent « lire et traduire les signes du mal que nos enfants laissent entrevoir » et « être acteurs de la prévention du suicide des tout petits », évoque Jeannette Bougrab, qui s’avoue « convaincue que la lecture de ce livre permettra de sauver des vies ».
L’impact du stress maternel
Pour Boris Cyrulnik, plusieurs points ressortent de ce travail réalisé sur la tranche d’âge des 5-12 ans. D ‘une part, l’importance des dernières semaines de grossesse et des premiers mois de vie. « Les carences sensorielles précoces chez le fœtus et le nourrisson, créent une vulnérabilité neurologique. Beaucoup de publications sur le stress maternel dans les derniers temps de la grossesse montrent une altération fronto-limbique chez les enfants à naître, et cette altération est très facile à récupérer si la femme enceinte est rapidement placée dans une enveloppe sécurisante » analyse-t-il. Mais tel n’est pas le cas, et si par la suite, l’enfant reste dans un environnement non sécurisant (malheur parental, violence entre parents, privation affective, voire maltraitance ou violence sexuelle), il peut alors se développer « un trouble sensoriel qui le pousse à réagir aux émotions en augmentant ses activités autocentrées », selon Boris Cyrulnik. Ainsi, « une pichenette suffit pour passer à l’acte : une phrase blessante, une petite frustration, une mauvaise notre à l’école, une dispute familiale peut provoquer une déflagration émotionnelle qu’aucun argument ne peut calmer».
Créer des niches sensorielles
Deuxième point : le neuropsychiatre soulève l’importance de la verbalité : « il faut donner la parole aux enfants», martèle-t-il. En troisième lieu, Boris Cyrulnik insiste sur l’importance de changer notre culture et d’organiser des lieux de protection, créer des niches sensorielles, avec une relation sécurisante pour les enfants, notamment à l’école. Cela a été fait en Finlande, où ont été instaurés des rythmes scolaires adaptés à l’enfant et non pas à l’adulte. Les enfants sont d’abord sécurisés par des accueillants dotés d’une formation psychologique étayée sur les théories de l’attachement, ils sont notés beaucoup plus tard, et il y a plusieurs enseignants spécialisés par école, etc. 10 ans plus tard, on ne compte qu’1% d’illettrés et le taux de suicide chez les enfants a diminué de 40% ».
Ainsi, Boris Cyrulnik accompagne son analyse de propositions concrètes. Notamment, de réfléchir sur la durée du congé maternité, du congé paternité, de créer dans les écoles des structures traits d’union entre les enseignants et les familles, des lieux d’écoute et de parole à l’occasion d’activités artistiques (films à commenter, etc), et instaurer dans les quartiers une culture des clubs, « avec la mise en place d’activités sportives, de scoutisme…». Jeannette Bougrab a entendu le message et affirme que « des mesures seront mises en place, ou développées dans les prochaines semaines.
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