Leucémies de l'enfant : actualités sur la LAL

Publié le 28/10/2002
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REFERENCE

Gènes de fusion

A partir des années 1985-1990, les analyses cytogénétiques médullaires systématiques ont permis d'identifier des anomalies chromosomiques dans les cellules leucémiques, conduisant à l'identification de gènes de fusion dans les LAL de l'enfant. De plus, ces avancées théoriques ont permis de développer de nouveaux outils d'évaluation biologique. En effet, les analyses moléculaires des cellules leucémiques permettent d'identifier environ une cellule pathologique sur 10 000, ce qui a permis de développer le concept de maladie résiduelle minime infracytologique ou Minimal Residual Disease (MRD). La réponse au traitement, évaluée par les analyses de MRD conduit actuellement à des modalités de prise en charge différentes des patients selon la cinétique de disparition des cellules leucémiques. La découverte de marqueurs moléculaires dans les LAL a également permis de démontrer les mécanismes à l'origine des risques élevés de leucémie chez les jumeaux homozygotes lorsque l'un des jumeaux est atteint. Le même gène de fusion spécifique du clone leucémique a été identifié dans le sang des sujets recueilli en période néonatale (test de Guthrie). Il s'agit donc d'une transfusion in utero du clone leucémique de l'un à l'autre des enfants. Cette découverte est très importante, car elle identifie que le premier événement oncogénique a lieu in utero, et ce point, suspecté depuis longtemps, est maintenant démontré dans de nombreux cas en dehors de tout contexte de gémellité.

Nombreux essais cliniques

En ce qui concerne la prise en charge thérapeutique, les LAL de l'enfant sont l'objet de nombreux essais cliniques ; néanmoins, les traitements tendent à devenir de plus en plus homogènes concernant les points suivants :
- stratification du traitement selon les facteurs de risque présents lors du diagnostic : il s'agit principalement, pour les LAL de la lignée B de l'âge (< 1 an ou > 9 ans), de la leucocytose (> 50 000) et de l'existence d'anomalies cytogénétiques telles que la présence d'un chromosome Philadelphie ou d'une translocation T ;
- stratification selon la réponse précoce au traitement : celle-ci est évaluée par le myélogramme effectué précocement ou par les analyses de MRD. Enfin, dans le cas des LAL de la lignée T (15 %), la réponse à la corticothérapie initiale est prise en compte ;
- introduction d'une intensification thérapeutique tardive : son intérêt a été montré par le groupe allemand BFM et fait partie de la plupart des protocoles pédiatriques.

Espérance de vie

On peut actuellement obtenir une espérance de vie sans récidive à cinq ans voisine de 80 % dans les LAL sans facteurs péjoratifs, soit environ 60 % des patients. Celle des sujets à risque est d'environ 70 %.
Le traitement des rechutes repose principalement sur la greffe de moelle allogénique lorsqu'une nouvelle rémission a pu être obtenue.

Séquelles à l'âge adulte

L'augmentation du nombre de patients guéris qui atteignent l'âge adulte a permis d'identifier les séquelles liées au traitement et de proposer de nouvelles stratégies de prise en charge afin de diminuer la fréquence de celles-ci. Pour les formes de risque standard, la désescalade thérapeutique porte sur les anthracyclines à l'origine de toxicité cardiaque à long terme. En ce qui concerne la prophylaxie de l'atteinte méningée, l'irradiation cérébrale voit sa place réduite aux formes à très haut risque. Enfin, de nombreux travaux de psychologie ont mis en lumière les séquelles personnelles et familiales liées au traumatisme de la maladie, conduisant à apporter une meilleure information des enfants et des familles.

Entretiens de Bichat. Table ronde à laquelle participaient G. Blancher, J. Landman-Parker, S. Gervaise et A. Guillamet-Oudin.

Les soignants

La prise en charge et l'environnement des enfants traités pour leucémie aiguë ont subi de très nombreux progrès. Les soignants ont ainsi été mieux formés à accueillir l'enfant et sa famille, à le prendre en charge de manière éducative (information sur sa maladie, sur les effets secondaires des traitements) permettant d'obtenir une meilleure compliance. Par ailleurs, s'est effectuée une prise en charge sociale de la famille, des problèmes alimentaires (effets secondaires des corticoïdes, de la chimiothérapie, perte de poids importante), du respect de l'hygiène. Une humanisation des locaux, des propositions d'activités ludiques, un travail en réseau avec échanges médicaux à l'extérieur ainsi qu'un suivi scolaire ont également été réalisés.

Dr Brigitte VALLOIS

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7208