C'EST LE 2 AOUT que la polémique a commencé avec la révélation, par le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, de l'existence de 351 fœtus ou corps d'enfants mort-nés dans la chambre mortuaire de l'hôpital de Saint-Vincent-de-Paul, à Paris.
L'affaire avait été involontairement déclenchée quelques jours auparavant par une jeune mère de famille qui, ayant subi une interruption médicale de grossesse en 2002, souhaitait obtenir des informations sur le traitement réservé à son fœtus. Contrairement à ce qu'elle attendait, l'hôpital ne s'était pas chargé de l'incinération du fœtus. Selon la circulaire du 30 novembre 2001 relative à l'enregistrement à l'état civil et à la prise en charge des corps des enfants décédés avant la déclaration de naissance, la conservation des foetus ou des enfants mort-nés ou dont le décès suit de quelques instants leur naissance est interdite. A moins de 22 semaines, un foetus doit être incinéré ou inhumé. A plus de 22 semaines, la famille a dix jours pour le réclamer à l'hôpital et organiser elle-même les funérailles. Au-delà de ce délai, l'inhumation ou la crémation du foetus est à la charge de l'hôpital dès lors que les examens auxquels il convient de procéder ont été effectués par un laboratoire. Dans certains cas particuliers, des investigations peuvent se révéler utiles soit pour compléter un diagnostic au service de la famille, soit pour accompagner par des examens des travaux strictement scientifiques permettant de faire progresser la connaissance sur telle ou telle affection. Une trace écrite est, dans tous les cas, conservée.
Une mission d'inspection.
L'enquête menée dans les hôpitaux de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) montre que la situation rencontrée à Saint-Vincent-de-Paul est limitée à cet hôpital. L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) a également été saisie par le Premier ministre, Dominique de Villepin, afin de mettre au jour le dysfonctionnement administratif. Il est toutefois probable que d'autres pratiques archaïques persistent dans certains hôpitaux universitaires : en effet, les établissements ont longtemps conservé des fœtus à des fins d'enseignement et de recherche, avant que la loi ne fixe des restrictions. C'est précisément ce que devra déterminer la mission d'inspection ordonnée par Xavier Bertrand dans l'ensemble des établissements hospitaliers de France disposant d'une chambre mortuaire en lien avec une maternité.
Pour le Pr Claude Sureau, ancien président de l'Académie nationale de médecine et membre du Comité consultatif national d'éthique, l'agitation médiatique consacrée cet été à cette affaire est disproportionnée et relève plutôt de ce qu'il appelle le « principe de précaution politique postcaniculaire. Pour des raisons organisationnelles, les règles administratives n'ont pas été respectées. Ce problème est regrettable, mais il ne dépasse pas ce cadre. Les corps des fœtus étaient répertoriés : ils n'étaient pas en vrac dans une bassine », rappelle-t-il. Selon lui, l'attention des politiques devrait plutôt s'attacher à « la reconnaissance d'un statut spécifique pour l'être prénatal à partir de la viabilité. Depuis le droit romain, le monde juridique considère deux catégories du droit : les personnes et les choses. Qu'en est-il de l'embryon ? Il n'est pas considéré comme sujet de droit ni comme objet de droit : il n'est rien. Nous devons sortir de cette conception binaire. Les parlementaires n'osent pas donner un statut pénal à l'être prénatal, de peur de remettre en cause le droit à l'interruption volontaire de grossesse. Mais cela n'a rien à voir », martèle-t-il.
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