Elections régionales et cantonales
DEPUIS UNE DIZAINE D'ANNEES, la régionalisation du système de santé est un serpent de mer présenté par les gouvernements français. Jean-Pierre Raffarin déclarait en juillet 2002 vouloir mettre en place une « nouvelle gouvernance du système de santé et d'assurance-maladie » avec « une régionalisation accrue, afin de favoriser une prise en charge plus cohérente et plus adaptée ». Son intention n'a pas été suivie d'effet. En décembre 2002, le groupe de travail sur la « nouvelle gouvernance », confié par le ministre de la Santé à Rollande Ruellan, rejetait « unanimement toute idée de régionalisation politique de la santé et de l'assurance-maladie ». Sa plus grande crainte était l'émergence de 26 politiques de santé qui n'auraient été aucunement une source d'économie.
Le projet de loi sur la santé publique, actuellement en seconde lecture à l'Assemblée nationale, redonne donc la main à l'Etat. L'article premier de ce projet ne laisse d'ailleurs planer aucun doute : « La détermination des objectifs, la conception des plans, des actions et des programmes de santé mis en œuvre pour les atteindre ainsi que l'évaluation de cette politique relèvent de la responsabilité de l'Etat. »
L'innovation du Grsp.
Une conférence nationale de santé est mise sur pied pour permettre la concertation sur les questions de santé. Le gouvernement la consultera lors de la préparation du projet de loi quinquennal qui devra définir les objectifs de la politique de santé publique. Et il est prévu que cette conférence nationale s'appuie sur les conférences régionales de santé, et formule des avis ou propositions en vue d'améliorer le système de santé publique.
Mais la mise en œuvre opérationnelle du plan régional sera confiée au groupement régional de santé publique (Grsp), principale innovation de ce projet de loi. On est loin de l'agence régionale de santé (ARS) qui aurait émané de l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH) et que promettait le candidat Jacques Chirac dans son programme pour les présidentielles de 2002. Les Grsp sont en effet placés sous la responsabilité du préfet. Composés des financeurs du système de santé (Etat, ARH, caisses d'assurance-maladie et collectivités locales), ils ont pour mission de « réunir en groupement d'intérêt public (GIP) tous les acteurs concernés par la déclinaison du programme de santé publique national dans les régions, sans redondances ni gaspillages ».
Le Grsp a été très contesté sur les bancs de l'Assemblée. Socialistes et UDF ont mêlé leurs voix pour dénoncer une « étatisation » du système de santé. Parmi les déçus, Jean-Luc Préel, député UDF de Vendée et grand partisan de la régionalisation de la santé, déplorait une volonté de marginaliser les associations de terrain et une certaine dispersion avec la présentation de « 100 objectifs de santé publique ».
En Alsace, Adrien Zeller, président UMP du conseil régional et ancien secrétaire d'Etat en charge de la Sécurité sociale de 1986 à 1988, estime également plus facile d'impliquer les acteurs du système de santé à l'échelon régional (ARH, Urcam, Urml...). En se basant sur les conclusions d'un rapport remis par un groupe de travail composé d'élus et de professionnels de santé alsaciens, il se déclarait favorable à une expérimentation de régionalisation de la santé et de l'assurance-maladie (« le Quotidien » du 16 octobre 2003). Il préconisait la création d'une « autorité régionale de santé » pour gérer une enveloppe de l'assurance-maladie. Composée d'une cinquantaine de représentants, assurés et cotisants, offreurs de soins, usagers et quelques élus régionaux, cette autorité aurait une instance délibérante, le conseil régional de santé, qui serait « pleinement responsable devant ses mandants de sa gestion et des fonds qui lui seraient délégués ».
Timidités.
Des projets semblables à celui-là sont rares.
Et pour cause : une majorité de conseils régionaux restent attentistes. Ils hésitent à assurer la gestion et l'organisation du système de soins. En octobre 2002, huit présidents de région de gauche (Aquitaine, Centre, Haute-Normandie, Ile-de-France, Limousin, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais et Provence-Alpes-Côte d'Azur) le faisaient savoir dans une déclaration commune : « La décentralisation doit comporter des transferts clairs et équitables de compétences, dans les domaines où les régions ont acquis une expérience et un savoir-faire indiscutables. » Or, selon Elisabeth Morin, présidente de la région Poitou-Charentes, c'est justement « du fait de leur très faible expérience des questions de santé, [que] les régions ne sont pas un échelon plus pertinent que l'Etat et les partenaires sociaux pour gérer l'ensemble des questions de santé » (« le Quotidien » du 28 février 2003).
D'une formule imagée, le président de la région Champagne-Ardenne, Jean-Claude Etienne, résumait la principale préoccupation des régions : « D'accord pour que l'Etat nous refile le bébé, mais il nous faut le biberon avec, et qu'il soit suffisamment rempli. »
Un sujet à la mode depuis une dizaine d'années
Le processus de régionalisation de la gestion du système de soins débute avec la loi hospitalière de 1991 et la mise en place des schémas régionaux d'organisation sanitaire (Sros). Avec les ordonnances du 24 avril 1996, les agences régionales d'hospitalisation (Arh) et les unions régionales de caisses d'assurance-maladie (Urcam) voient le jour. Les premières ont pour objectif d'unifier la gestion de l'hospitalisation publique et privée, les secondes de coordonner l'action des caisses. Deux nouvelles instances seront créées lorsque sera adopté le projet de loi relatif à la politique de santé publique : le groupement régional de santé publique (Grsp) et la conférence régionale de santé.
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