ADOPTÉ en première lecture par l'Assemblée nationale le 14 octobre 2003, puis au Sénat le 19 janvier (le
« Quotidien » du 20), le projet de loi sur la Santé publique prend forme, passant de 56 articles à 79. « Il est indispensable que la prévention en matière santé relève aussi d'une politique globale prenant en compte le cadre dans lequel évolue la personne (travail, logement, environnement, précarité) », a tenu à déclarer Jean-François Mattei lors de son intervention devant les sénateurs. Pour l'heure, sur 150 milliards d'euros de dépense de santé, seulement 3,6 milliards, soit 2,3 %, sont consacrés à la prévention. A cet égard, le texte affirme solennellement dans son article premier la responsabilité de l'Etat dans le domaine de la santé publique. Seul il peut organiser efficacement la lutte contre les épidémies, comme le syndrome respiratoire aigu sévère, la légionelle, les méningites, le SIDA, la grippe ou encore l'hépatite B. Dans le même esprit, il est de son devoir d'agir sur la mortalité prématurée (avant 65 ans), le tabagisme, l'alcoolisme , les drogues, la maladie et la mort. Selon qu'ils résident en Bretagne, en Alsace, dans le Pas-de-Calais ou en Midi-Pyrénées, mais également en raison de leur milieu social, les Français sont affectés différemment par la maladie et n'ont pas la même espérance de vie. Il appartient en outre aux pouvoirs publics de trouver de nouvelles formes d'intervention face aux catastrophes écologiques (Amoco Cadiz), aux scandales sanitaires (sang contaminé, vache folle), aux craintes sur l'ozone ou aux accidents hospitaliers (anesthésiques ou obstétriques). Pour sa part, la région étant consacrée comme le « meilleur niveau » pour mettre en œuvre une politique pérenne de santé publique, la principale innovation de la future loi est la création de groupements régionaux de santé publique (GRSP).
Cinq priorités quinquennales. Concrètement, le rôle de garant et de responsable de la santé publique confié à l'Etat porte sur 5 priorités (2005-2009): la lutte contre le cancer, la santé environnementale incluant la santé au travail, la violence et les comportements à risque, les maladies rares, et la qualité de vie des personnes atteintes d'affections chroniques. Parallèlement un rapport annexé au projet de loi comporte une centaine d'objectifs qui ont vocation à constituer un « tableau de bord » sur les évolutions de la situation sanitaire. Tous les 5 ans, le gouvernement soumettra au Parlement une loi fixant de nouvelles priorités, après avis de la Conférence nationale de santé, du Haut comité de la santé publique et du Comité national de la santé publique, tandis que le ministre de la Santé arrêtera un plan national. A l'échelon régional, ce sont les GRPS qui garantiront la coordination des actions sur la base des priorités établies par leur conseil d'administration où siègent, outre l'Etat, l'assurance maladie, les collectivités locales et l'ARH.
Gestion des crises sanitaires. Le système de surveillance et d'alerte sanitaires est renforcée. L'Institut national de veille sanitaire (INVS) conduira une réflexion prospective sur les facteurs de risque non identifié, complétera son approche par pathologie par une démarche orientée vers les populations en danger, et définira des indicateurs d'alerte. Dans le même temps, l'obligation faite aux médecins et aux hôpitaux publics de signaler aux autorités sanitaires les risques dont ils auraient connaissance est étendue à l'ensemble des professionnels de la sphère sanitaire et médico-sociale. Une base légale est donnée au Plan blanc hospitalier : celui-ci peut être déclenché en cas d'afflux de victimes ou de situation sanitaire exceptionnelle, et le préfet a la possibilité de recourir à des plans blancs « élargis ». D'autre part, le système de remontée des certificats de décès, du médecin à l'INSERM, est perfectionné. L'INVS devrait ainsi pouvoir construire un mécanisme d'alerte et de mesure au jour le jour des décès constatés.
Un Institut national du cancer. Par ailleurs, le projet de loi est porteur d'une Ecole des hautes études en santé publique (techniciens du bruit ou de la qualité des eaux, formation continue en sécurité sanitaire), et d'un Institut national du cancer chargé de financer des programmes de recherche et d'aider à la structuration régionale de « cancéropôles ». Dans le domaine de l'environnement, un plan national comportera un volet relatif aux situations météorologiques extrêmes. La surveillance épidémiologique en milieu du travail est facilitée. Les dispositions relatives à la préservation de la qualité de l'eau sont actualisées, et les autorisations d'exploitation des sources d'eau minérales et thermales simplifiées. Les pouvoirs préfectoraux sont accrus pour les contaminations issues des réseaux d'eau des particuliers ou d'établissements recevant du public. Devant le risque de prolifération de légionelles, la législation est renforcée, ainsi que les mesures contre le saturnisme. Enfin, l'encadrement des recherches biomédicales issu de la loi du 20 décembre 1988 est révisé (directive 2001/20/CE) : le régime déclaratif est remplacé par un régime d'autorisation, qui supprime la distinction entre recherche sans bénéfice individuel direct et recherche avec bénéfice individuel direct, au profit de l'appréciation plus fine d'un bilan bénéfice-risque. Il organise également la participation à la recherche des personnes vulnérables hors d'état d'exprimer leur consentement, afin qu'elles puissent accéder au progrès scientifique et médical.
Le projet de loi sur la Santé publique retournera devant les députés pour une deuxième lecture entre le 6 février et le 6 mars, sachant que 15 au 22 février le Parlement est en vacances, ainsi que du 7 mars au 4 avril en raison des élections régionales.
L'obésité juvénile sous contrôle
Pour lutter contre l'obésité infantile, le Sénat a adopté un amendement prévoyant que " toute publicité télévisuelle en faveur de produits alimentaires dans des programmes destinés à la jeunesse doit être assortie d'un message de caractère sanitaire rappelant les principes d'éducation diététique agréés par l'Institut national d'éducation pour la santé ".En outre, " les produits alimentaires d'origine industrielle doivent afficher sur chaque emballage le nombre de calories, contenu en graisses saturées, et non saturées, ainsi que la teneur en socium de chaque ration alimentaire ".
Un registre des psychothérapeutes
Lors de l'examen du projet de loi sur la santé publique, le 19 janvier, le Sénat a décidé que l'usage du titre de psychothérapeute serait réservé aux professionnels inscrits sur un registre national dressé par le préfet à l'échelon départemental. Les 195 000 titulaires d'un diplôme de docteur en médecine, les 35 000 psychologues diplômés d'Etat et les 6000 psychanalystes régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations sont dispensés de cette inscription. restent 25 000 psychothérapeutes autoproclamés à qui s'adresse en fait le législateur.
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