Adulte jeune
Maladie rare, caractérisée par l'association ou la succession rapide dans le temps d'une kératite interstitielle, d'un syndrome audiovestibulaire et, dans deux tiers des cas, d'une atteinte systémique, le syndrome de Cogan touche l'adulte jeune. La cause de la maladie est inconnue. Des phénomènes infectieux, notamment ORL et/ou immunologiques, interviendraient dans le déclenchement de la maladie. Les aspects histologiques retrouvés sont pro-ches de ceux observés au cours de la polychondrite atrophiante ou de la périartérite noueuse évoquant un processus de vascularite qui prédomine au niveau des vaisseaux de moyen et de petit calibre et qui touchent parfois aussi la paroi aortique et les gros vaisseaux.
Manifestations cliniques
Signes oculaires
L'atteinte typique est une kératite interstitielle, uni- ou bilatérale. Il peut s'y associer d'autres lésions oculaires : conjonctivite, sclérite ou iridocyclite, ulcération cornéenne, épisclérite, atteinte rétinienne.
Manifestations audiovestibulaires
Il s'agit d'une atteinte de l'oreille interne, caractérisée par un syndrome vestibulaire avec vertiges de Ménière, qui va laisser place, au bout de quelques semaines ou de quelques mois, à une surdité de perception définitive. La surdité est bilatérale d'emblée dans environ trois quarts des cas, les vertiges et les acouphènes peuvent persister.
Manifestations systémiques
Dans deux tiers des cas environ, il existe des signes d'atteinte systémique :
– manifestations neurologiques : il peut s'agir d'une neuropathie périphérique touchant les nerfs crâniens ou d'une atteinte du système nerveux central avec syndromes focaux variés ;
– manifestations cardio-vasculaires : la plus fréquente est l'insuffisance aortique secondaire à une atteinte inflammatoire des parois artérielles ; dans d'autres cas, il s'agit d'une insuffisance cardiaque, d'une insuffisance coronarienne ou d'une péricardite ; quelques cas d'aortite ou d'artérite inflammatoire des gros troncs, sténosantes ou ectasiantes, ont également été rapportés ;
– manifestations rhumatismales : il peut s'agir de polyarthralgies, de monoarthrites ou d'oligoarthrites, parfois de polyarthrites. Les myalgies d'accompagnement ne sont pas exceptionnelles ;
– manifestations digestives : douleurs abdominales et troubles du transit ne sont pas exceptionnels, parfois liés à une atteinte vasculaire mésentérique. On a rapporté des hépatomégalies avec splénomégalie et des hépatites granulomateuses ;
– manifestations cutanéo-muqueuses : il peut s'agir d'un rash non spécifique prenant un aspect urticarien, parfois d'un purpura vasculaire, voire d'ulcérations cutanées ;
– manifestations diverses : on a décrit des adénopathies superficielles ou profondes, des maladies de Lapeyronie, des dysthyroïdies.
Principales manifestations du syndrome de Cogan
– Baisse d'acuité auditive : 98 % des cas ;
– kératite interstitielle : 100 % des formes typiques, 62 % des formes atypiques ;
– syndrome fébrile : 1/3 des cas ;
– manifestations cardio-vasculaires : 1/4 des cas ;
– manifestations rhumatismales : 1/4 des cas ;
– vascularites : 1/4 des cas ;
– signes neurologiques : 1/4 des cas ;
– manifestations digestives : 1/4 des cas ;
– signes cutanéomuqueux : 1/5 des cas ;
– adénopathies : 1/10 des cas.
Le syndrome de Cogan est dit typique s'il associe une atteinte oculaire à type de kératite interstitielle (avec parfois une conjonctivite, des hémorragies sous-conjonctivales, sans iritis) à une atteinte audiovestibulaire à type de syndrome de Ménière avec hypoacousie évoluant vers la surdité en quelques semaines. Les signes oculaires peuvent précéder l'atteinte audiovestibulaire de plusieurs mois (parfois un à deux ans).
Le syndrome de Cogan est dit atypique lorsqu'il existe une autre atteinte oculaire, avec ou sans kératite interstitielle (sclérite, épisclérite, thrombose rétinienne, hémorragie rétinienne, oedème papillaire). On parle aussi de syndrome de Cogan atypique lorsqu'une atteinte oculaire typique s'associe à des manifestations audiovestibulaires à type de pseudo-Ménière ou survenant plus de deux ans après les premières manifestations oculaires. Dans le syndrome de Cogan atypique, le syndrome fébrile, les manifestations rhumatismales, les atteintes cutanéomuqueuses et les adénopathies sont plus fréquentes.
Signes biologiques
Le syndrome inflammatoire est présent dans trois quarts des cas, avec souvent une hyperleucocytose à neutrophiles. Le bilan immunologique est en général négatif, les anticorps antinucléaires sont parfois présents à taux faible, rarement la sérologie rhumatoïde apparaît positive. Quelques observations avec ANCA ont été signalées, soit de type c-ANCA, soit de type p-ANCA rapprochant le syndrome de Cogan des vascularites.
Diagnostic différentiel
•Kératite interstitielle:
– syphilis congénitale ;
– tuberculose ;
– sarcoïdose ;
– onchocercose.
•Atteinte audiovestibulaire et autres maladies systémiques:
– polychondrite atrophiante ;
– périartérite noueuse ;
– granulomatose de Wegener ;
– maladie de Behçet ;
– lupus érythémateux disséminé ;
– polyarthrite rhumatoïde ;
– maladie inflammatoire de l'intestin ;
– syndrome de Gougerot-Sjögren ;
– syndrome de Vogt-Koyanagi-Harada.
•Divers
Maladies de Horton, maladie de Still de l'adulte, syndrome de Kawasaki, sarcoïdose, syndrome de Susac (atteinte artériolaire rétinienne, cochléaire et cérébrale d'étiologie inconnue).
Traitement
Lorsque l'atteinte oculaire est grave ou qu'apparaît un syndrome audiovestibulaire, il y a indication à une corticothérapie générale sous la forme de bolus de méthyprednisolone relayés par de la cortisone par voie orale à 1 mg/kg et par jour d'équivalent de prednisone, avec réduction progressive des doses. Lorsque la surdité est installée, la corticothérapie, même à fortes doses, est en général inefficace.
En cas d'échec de la corticothérapie, le traitement n'est pas bien codifié. Outre le traitement oculaire par voie locale peuvent être discutés les immunosuppresseurs, comme l'azathioprine, le cyclophosphamide, la ciclosporine, le méthotrexate. Les anti-TNF pourraient constituer une alternative thérapeutique intéressante. Les complications cardio- vasculaires peuvent nécessiter un geste chirurgical (cure d'anévrisme, angioplastie, pontage, etc.). La surdité installée est une indication d'implant cochléaire.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature