1) Paralysie faciale afrigore éliminée
Les autres étiologies de la paralysie faciale seront déterminées en fonction du contexte de survenue en tenant compte des éléments recueillis à l'anamnèse, en particulier le mode d'installation (rapide ou progressif), les circonstances de survenue (traumatisme, syndrome infectieux...) et les données de l'examen clinique systématique : les autres nerfs crâniens, les voies longues, l'inspection de la conque de l'oreille, l'examen du tympan à l'otoscope, la palpation de la région parotidienne.
a) Paralysie faciale traumatique
Le contexte est évocateur : traumatisme ouvert par une plaie pénétrante de l'oreille ou de la région parotidienne, traumatisme crânien avec fracture du rocher, ou traumatismes opératoires. La paralysie est immédiate par section-compression ou embrochage du nerf, ou différée par compression par l'oedème posttraumatique. L'otoscopie recherche la rupture du tympan ou du conduit, une fuite de LCR ou une otorragie. Le scanner est indispensable. Le traitement est le plus souvent chirurgical. Les corticoïdes sont proposés pour les paralysies d'apparition secondaire.
b) Paralysie faciale au cours d'affections neurologiques
La paralysie faciale s'accompagne systématiquement d'autres manifestations neurologiques.
La polyradiculonévrite aiguë de Guillain et Barré s'accompagne dans deux tiers des cas d'une diplégie faciale rarement révélatrice et souvent accompagnée d'une paralysie du carrefour vélo-pharyngo-laryngé qui impose une surveillance et des mesures de réanimation symptomatiques. Le mode d'installation, la dissociation albumino-cytologique du LCR et l'EMG confirment le diagnostic. Une récupération complète est le plus souvent observée.
Dans la sclérose en plaques, la paralysie faciale est rarement révélatrice et isolée ; une régression trop rapide d'une paralysie faciale afrigore et l'apparition de myokimies faciales doivent attirer l'attention. Le caractère multiple des signes neurologiques associés, l'âge de survenue, l'aspect oligoclonal à l'électrophorèse des protéines du LCR et l'IRM permettent de poser le diagnostic.
Dans l'infarctus cérébral protubérantiel (atteinte du noyau du nerf facial) : la paralysie faciale s'associe à une hémiplégie controlatérale constituant ainsi un syndrome alterne du tronc cérébral par atteinte de la protubérance (syndrome de Millard-Gubler).
c) Paralysie faciale au cours de maladies infectieuses
De nombreuses pathologies infectieuses peuvent s'accompagner d'une paralysie faciale, alors qu'elles présentent peu de points communs. De ce fait, l'anamnèse et l'examen clinique sont particulièrement importants. Il faudra tenir compte de l'âge, du mode d'installation, des circonstances de survenue, des signes associés et de la notion de contage.
Le zona du ganglion géniculé associe une paralysie faciale, des douleurs périauriculaires intenses, une éruption vésiculeuse dans la zone de Ramsay-Hunt (conque de l'oreille, conduit auditif externe et tympan). Il existe parfois une adénopathie prétragienne et une atteinte auditive. Le pronostic est moins bon que celui des paralysies faciales afrigore ; la récupération, inconstante, n'est le plus souvent que partielle.
Les méningoradiculites virales (coxsackie, herpès, oreillons) s'accompagnent parfois d'une paralysie faciale. Le contexte et l'analyse du LCR permettent d'orienter le diagnostic.
Au cours de l'infection par le VIH, la paralysie faciale est fréquente. Elle peut apparaître à tous les stades, en particulier lors de la séroconversion. Le LCR est souvent anormal avec en particulier une augmentation des gammaglobulines.
La paralysie faciale otitique est fréquente chez l'enfant, révélant une infection otomastoïdienne aiguë ou chronique. De même, les otites chroniques cholestéatomateuses peuvent se compliquer d'une paralysie faciale.
La borréliose (maladie de Lyme) : l'atteinte est parfois bilatérale associant par ailleurs des anomalies du LCR et les autres manifestations de la maladie (cutanées, articulaires…).
D'autres pathologies infectieuses, la lèpre, la syphilis, le tétanos, une rhombencéphalite listérienne ou tuberculeuse, sont parfois incriminées, le contexte étant le plus souvent évocateur.
d) Paralysie faciale et affections métaboliques
Une mononeuropathie diabétique peut toucher le nerf facial ; c'est cependant moins fréquent que l'atteinte oculomotrice. L'atteinte faciale peut ainsi révéler le diabète ou survenir au cours de son évolution. Les porphyries s'accompagnent parfois d'une paralysie faciale.
e)Paralysie faciale au cours des maladies inflammatoires générales
La sarcoïdose constitue l'une des étiologies de paralysie faciale qui s'associe à une parotidite et à une iridocyclite. Elle peut révéler la maladie.
Le syndrome de Melkerson- Rosenthal associe une paralysie faciale d'allure essentielle, le plus souvent récidivante ainsi qu'une infiltration cutanéo-muqueuse de la face (lèvres) et une langue plicaturée dite « scrotale », avec des antécédents familiaux identiques.
D'autres causes plus rares sont repésentées par la périartérite noueuse, le lupus érythémateux disséminé ou l'amylose…
f) Paralysies faciales tumorales
L'atteinte du nerf facial au cours de l'évolution d'une tumeur parotidienne doit faire craindre la nature cancéreuse de celle-ci. Des tumeurs intra-axiales telles qu'un gliome infiltrant ou une métastase du tronc cérébral sont parfois responsables d'une paralysie faciale rarement isolée. Parmi les tumeurs extra-axiales, celles de l'angle ponto-cérébelleux, en particulier le neurinome de l'acoustique, peuvent se compliquer d'une paralysie faciale. Celle-ci est le plus souvent tardive par rapport à l'atteinte audiovestibulaire. Il existe souvent à ce stade une atteinte du trijumeau et, bien entendu, une surdité.
Plus rarement, il peut s'agir d'un neurinome du facial, d'une méningite carcinomateuse (cancer du sein), d'une infiltration tumorale de la base du crâne.
g) Paralysies faciales bilatérales
Les paralysies faciales bilatérales peuvent émailler le cours évolutif de plusieurs pathologies ou les révéler : syndrome de Guillain et Barré, borréliose, infection par le VIH, sarcoïdose, syndrome de Melkerson- Rosenthal, porphyries.
2) Examens paracliniques
Ils seront envisagés selon le contexte au cas par cas : scanner du rocher et du conduit auditif interne, IRM avant et après injection de gadolinium avec acquisition volumique, ponction lombaire, examens biologiques NFS, VS, CRP, glycémie, sérologies (VIH, Lyme, coxsackie, herpès, CMV, listériose), dosage de l'enzyme de conversion de l'angiotensine et radiographie pulmonaire. L'EMG (avec mesure de la latence) n'a d'intérêt qu'après le 5e jour où il permet le plus souvent d'évaluer le pronostic en terme de récupération (pronostic réservé en cas de dénervation sévère et précoce).
3) Principes du traitement
Des mesures générales, en particulier de protection oculaire, doivent être prises devant toute paralysie faciale. Il convient d'obtenir une occlusion oculaire parfaite en particulier la nuit, au besoin par Steri-strip ou pansement occlusif, et de mettre un collyre antiseptique plusieurs fois par jour, et un antibiotique en dépôt dans le cul-de-sac conjonctival le soir.
Le traitement spécifique dépend de l'étiologie. Par exemple, en cas de paralysie faciale zostérienne, la prescription précoce d'aciclovir (Zovirax) par voie intraveineuse (10 mg/kg/j pendant 10 j) est préconisée.
Le traitement spécifique de la paralysie faciale afrigore demeure controversé. Dans la majorité des cas, l'évolution est spontanément favorable. Des données récentes semblent confirmer le bénéfice d'une prescription précoce de corticoïdes per os à la posologie de 50 mg par jour pendant 10 jours, permettant d'obtenir un pourcentage plus élevé de guérison à 3 mois par rapport au placebo ou à la prescription d'aciclovir. Un tel traitement ne s'applique qu'aux paralysies faciales complètes vues précocement, en l'absence de contre-indication et après avoir éliminé un diabète ou une étiologie infectieuse.
Des injections locales de toxine botulique sont proposées pour contrôler avec succès le spasme hémifacial. Le traitement des syncinésies est préventif : dans un contexte de rééducation faciale, il faut éviter de proposer une gomme à mâcher ainsi que l'électrothérapie. Des injections de toxine botulique peuvent être envisagées.
Au stade de séquelles dans les tableaux sévères divers, des techniques de greffes et d'anastomoses nerveuses peuvent être discutées (par exemple l'anastomose du nerf facial et du nerf hypoglosse). Si la paralysie faciale est trop ancienne avec des muscles atrophiés, on pourra, pour diminuer l'asymétrie, réaliser des gestes de transferts musculaires dynamiques associés à des gestes plastiques au niveau des téguments.
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