Schémas
La chirurgie a révolutionné l'approche thérapeutique de cette pathologie inflammatoire. Les traitements actuels permettent d'espérer une raréfaction, voire une disparition, des otites chroniques telles que l'on pouvait les rencontrer il y a encore peu de temps. Le terme d'otite regroupe un ensemble pathologique polymorphe. L'otite aiguë désigne une atteinte infectieuse brutale de l'oreille moyenne par un agent pathogène, viral ou bactérien, à partir du complexe nasotubaire.
Un traitement adapté permet habituellement une restitution adintegrum de l'espace auriculaire touché. Pour diverses raisons que nous essaierons de repérer, cette évolution favorable ne se fait pas et un processus inflammatoire postinfectieux persiste au-delà du délai habituel de guérison. Le passage d'une otite aiguë à une otite séreuse se fait insidieusement, sans aucune manifestation algique particulière.
A côté de ce schéma classique, l'installation d'une otite séreuse peut se faire là aussi de façon progressive, par l'intervention d'un ou de plusieurs facteurs favorisants, au premier rang desquels se situe l'allergie respiratoire.
Processus inflammatoire et sécrétant
Le résultat est en tous cas celui d'un double processus, inflammatoire et sécrétant, touchant l'espace situé en dedans du tympan (l'oreille moyenne) et relié au rhino-pharynx par la trompe d'Eustache.
Conséquence immédiate de cet oedème persistant de la muqueuse de recouvrement de l'oreille moyenne et du remplissage de la cavité anatomique concernée : une baisse d'audition permanente, doublée d'une sensation de plénitude de l'oreille, d'acouphènes continus et de perception, parfois douloureuse, de mouvements liquidiens.
Rappel
Un rappel anatomique et physiologique s'impose dès l'abord de cette pathologie inflammatoire chronique.
Retenons simplement que l'oreille est constituée de compartiments se succédant les uns les autres.
De dehors en dedans, l'oreille externe (pavillon et conduit auditif externe) est suivie de l'oreille moyenne, à laquelle succédera l'oreille interne, siège plus profond de la localisation cellulaire noble.
L'oreille moyenne nous intéresse ici.
Il s'agit d'un espace creux aménagé au sein du rocher, cette structure latérocrânienne contenant l'ensemble des éléments auriculaires.
La cavité principale de l'oreille moyenne est la caisse du tympan, sorte d'antre ventilée à partir du rhino-pharynx par la trompe d'Eustache.
Par cette conformation, l'oreille moyenne appartient à part entière aux voies respiratoires supérieures. Cette cavité est habitée par la chaîne des osselets (marteau, enclume et étrier) intimement et structurellement solidaire du tympan.
Toute vibration tympanique déclenche une mise en mouvement de cette chaîne, se répercutant ensuite aux structures complexes de l'oreille interne.
Physiologiquement, la normofonctionnalité de l'ensemble tympan-chaîne ossiculaire obéit à un impératif absolu associant l'intégralité anatomique du complexe tympan-osselets à la parfaite liberté physiologique de système de ventilation à partir du nez.
L'OSM découle de la perturbation de ce deuxième élément.
Entre le nez et l'oreille
L'insuffisance ou l'absence d'aération entre nez et oreille moyenne a pour conséquence immédiate de déclencher dans la cavité de l'oreille moyenne un processus inflammatoire autoentretenu.
La muqueuse de recouvrement de la caisse du tympan et de la trompe d'Eustache subit un phénomène d'oedème, donc d'épaississement contribuant à majorer la notion d'obstacle. L'oedème lui-même, et cette notion est valable tout le long de la voie respiratoire, incite à l'hypersécrétion.
L'anatomie régionale est telle que cet excès de sécrétions assure un remplissage cavitaire rapide avec un degré d'évacuation spontanée faible.
Le couple oedème-sécrétion installe de manière rapide et ample un phénomène de modification d'un espace aérien de l'oreille moyenne en un espace liquidien. La mécanique transmissionnelle tympano-ossiculaire s'en trouve perturbée. De manière simple, le passage sonore entre oreille externe et oreille interne n'est plus correctement assuré, une surdité dite de transmission s'installe.
Les conséquences cliniques
Cliniquement, chez l'enfant comme chez l'adulte, la situation est semblable. La tendance rapide à la pérennisation pour le premier la différencie habituellement du second.
Une triade symptomatique chez l'enfant (nous ne traiterons désormais que ce cas de figure) associe à une baisse d'audition une sensibilité de l'oreille, ou des oreilles, intermittente et un cortège de signes d'accompagnement au premier rang desquels on peut retenir un trouble fréquent du comportement de type agitation ou agressivité.
La baisse d'audition se comprend facilement. L'espace que nous avons décrit plus haut, normalement rempli d'air, est rempli de sérosités.
Le jeu tympano-ossiculaire n'est plus assuré, l'énergie sonore arrivant sur le tympan est absorbée par cette rétention liquidienne.
Si l'oreille interne garde toute sa fonctionnalité, c'est le défaut de transmission en amont qui génère la difficulté auditive.
Cette baisse d'audition est d'intensité variable, pouvant aller de quelques décibels à une perte dont l'importance chez un sujet âgé, et pour d'autres raisons, justifierait le port rapide d'un appareillage auditif !
La notion d' audition fluctuante est à souligner. En fonction de divers facteurs, le retentissement sur l'audition varie parfois d'un jour à l'autre, voire tout au long d'une même journée. Cette variabilité est troublante pour l'entourage, induisant à juste titre un doute sur la véracité de la gêne auditive. Généralement, l'OSM touchant les deux oreilles, on retiendra que la gêne sociale est marquée, contraignant les parents à consulter assez vite.
La sensibilité de l'oreille dans le cadre de l'OSM n'est pas de mise. A l'otite aiguë douloureuse s'oppose l'indolence de l'OSM chronique. Seules quelques sensations transitoires d'oreille sous pression peuvent survenir, cédant spontanément ou à un antalgique mineur.
Cette absence de manifestation algique réalise un piège clinique, expliquant parfois la découverte tardive d'une OSM.
La petite poussée douloureuse que l'on peut constater ne correspond qu'à un phénomène inflammatoire tympanique, lié à une surtension de sa surface sous l'effet de la masse liquidienne présente.
Conséquences de l'hypoacousie
Le troisième volet de notre triade symptomatique est fait de signes de retentissement chez l'enfant de sa baisse d'audition. En l'occurrence, une agitation est régulièrement notée par l'entourage, surtout en fin de journée.
Il suffit d'imaginer avoir en permanence, de manière bilatérale, cette impression d'oreille cotonneuse de fin d'atterrissage en avion pour admettre ces répercussions.
Diverses études ont montré que la résolution de l'otite séreuse chez l'enfant donnait aux parents la satisfaction d'avoir un chérubin plus calme et plus concentré sur ses activités…
C'est en milieu ORL spécialisé que se fait le diagnostic d'OSM.
Par le canal de l'un ou de plusieurs des signes précédents, afortiori lorsqu'un trouble du langage s'installe, le ou les parents s'inquiètent à juste titre.
Il n'est pas rare cependant, et ce n'est pas forcément le fait d'une négligence particulièrement culpabilisante, de faire le diagnostic assez tardivement.
Examen clinique, impédancemétrie et audiométrie
Ici encore, trois éléments cliniques vont rapidement guider le spécialiste vers le diagnostic.
L'examen de l'oreille : l'otoscopie, c'est-à-dire l'appréciation de l'aspect du tympan au moyen d'une source lumineuse et d'un système grossissant, conduit au diagnostic.
A la normalité d'un tympan translucide, nacré, réfléchissant la lumière (notion de triangle lumineux) s'oppose le caractère terne, mat, du tympan de l'otite séreuse. Du gris bleuté, l'OSM dévie la coloration vers un teint chamoisé, plus ou moins foncé.
Les deuxième et troisième éléments diagnostiques sont l'impédancemétrie et l'audiométrie, toujours réalisable pour la première quel que soit l'âge, fiable pour la seconde chez l'enfant coopérant.
L'impédancemétrie consiste à apprécier la capacité de vibration de la membrane tympanique. En cas d'otite séreuse, cette vibration diminue ou est absente, du fait de la présence de mucus dans l'oreille moyenne.
C'est cette réduction de la capacité vibratoire qui explique la baisse d'audition. L'audiométrie objective la baisse.
Il s'agit d'une surdité dite transmissionnelle. Les cellules de l'oreille interne gardent leur efficacité. Le trouble auditif est lié au fait du mauvais passage de l'énergie sonore au travers d'une oreille moyenne remplie de liquide.
Tout l'enjeu de l'approche thérapeutique de l'otite séromuqueuse, abordée plus loin, va consister à rendre à l'oreille moyenne son caractère aérien et à la débarrasser de cette rétention liquidienne.
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