REFERENCE
Des contre-indications
La chirurgie, lourde, reconnaît des contre-indications absolues : carcinose péritonéale, métastases, notamment hépatiques, le plus souvent déjà connues par l'imagerie préopératoire, mais de petits nodules fibreux découverts à ventre ouvert doivent faire l'objet de biopsies extemporanées.
L'envahissement ganglionnaire ne doit plus automatiquement faire renoncer à l'exérèse car il a pu être constaté chez des malades qui ont guéri, sauf s'il intéresse les ganglions inter-aortico-caves.
L'envahissement vasculaire artériel (tronc coeliaque, artère hépatique) est une contre-indication formelle et, à un moindre degré, celle des éléments du tronc porte dont le sacrifice, envisageable, est rarement associé à une survie appréciable.
L'envahissement des organes de voisinage (estomac, surrénale, côlon) doit également faire renoncer à une exérèse qui n'a plus d'intérêt carcinologique.
En revanche, l'âge physiologique est plus important que l'âge réel pour limiter les indications, mais des défaillances viscérales représentent un facteur augmentant significativement la mortalité opératoire.
Bilan préopératoire
Le bilan préopératoire d'opérabilité repose essentiellement sur le scanner et l'échoendoscopie qui permettent de reconnaître les métastases hépatiques, les adénopathies et l'envahissement veineux. La laparotomie pourra éventuellement être précédée par une laparoscopie pour rechercher des nodules de carcinose, voire biopsier un ganglion suspect.
Les tumeurs de la tête inextirpables
Le bilan préopératoire ou l'exploration révèlent l'inextirpabilité de la majorité des lésions (carcinose, métastases, envahissement vasculaire). La médiane de survie ne dépasse pas alors six mois. Les « avantages » d'un traitement chirurgical, dont l'hospitalisation et la morbidité amputeront ce faible sursis, doivent être mis en balance avec les gestes endoscopiques de même finalité. En cas de métastases hépatiques ou péritonéales, même la chirurgie palliative paraît contre-indiquée.
Une sténose digestive, due à un envahissement duodénal, peut être court-circuitée par une gastrojéjunostomie ; une alimentation parentérale représente probablement une meilleure stratégie s'il existe une carcinose.
L'ictère peut être traité chirurgicalement : anastomose cholédocoduodénale (plus simple) ou hépaticojéjunale avec cholécystectomie, ou intubation endoscopique ou percutanée de la voie biliaire, dont la mortalité est moindre mais qui expose à l'obstruction secondaire et au risque de devoir régler une sténose duodénale dans un deuxième temps.
Les tumeurs résécables de la tête
Elles ne représentent que 20 à 30 % du total et ne peuvent être affirmées telles qu'après décollement rétroduodénopancréatique et gastro-épiploïque et dissection du pédicule hépatique.
La duodénopancréatectomie céphalique (DPC) emporte la tête du pancréas, la totalité du duodénum, la partie distale de l'estomac, la partie basse de la voie biliaire principale et la vésicule. Il faut couper les artères pylorique et gastroduodénale et surtout la lame rétroportale (risque hémorragique). Le rétablissement de la continuité suppose de réanastomoser sur le jéjunum l'isthme pancréatique, le cholédoque puis la tranche gastrique.
La mortalité de cette intervention a baissé mais le risque de fistules, surtout pancréatiques, reste présent dans près de 15 % des cas ; leur traitement fait appel à la nutrition parentérale et à la somatostatine également utilisée, comme les colles biologiques, à titre préventif par certaines équipes. Le drainage pour obtenir une fistule dirigée est également conseillé. Le pronostic, encore médiocre, va cependant en s'améliorant et des survies à cinq ans pour de petites tumeurs sont possibles. Des extraits pancréatiques proposés pour pallier l'insuffisance exocrine en cas de stéatorrhée, des antisecrétoires pour prévenir un ulcère anastomotique. La conservation du pylore, qui empêche la réalisation du curage sous-pylorique, a été proposée pour lutter contre les séquelles digestives de la DPC classique, notamment en matière d'amaigrissement, mais son intérêt est contesté.
La pancréatectomie totale, qui supprime, certes, le risque de fistule pancréatique au prix d'une insuffisance exocrine sévère et d'un diabète insulinoprive malaisé à équilibrer, n'est indiquée qu'en cas de tumeurs diffuses, d'envahissement de la tranche de section à l'examen histologique extemporané, ou devant un pancréas très friable qui paraît trop exposé au risque de fistule.
L'association à la DPC de résections vasculaires et notamment de l'axe veineux mésentéricoporte, lorsqu'il est envahi et qu'il n'y a pas d'autre diffusion de la maladie, est toutefois controversée.
Les tumeurs du corps et de la queue
Les tumeurs non résécables (envahissement des organes rétro-péritonéaux ou métastases sur l'imagerie préopératoire) ne sont pas chirurgicales le plus souvent mais permettent quelquefois la biopsie ou un geste antalgique (neurotomie), voire une gastrojéjunostomie si l'on craint une sténose de l'angle duodénojéjunal.
En cas de tumeur résécable, le traitement fait appel à la splénopancréatectomie gauche, sectionnant les vaisseaux spléniques au niveau de l'isthme. Bien que les complications opératoires soient moins redoutables (mais la fistule pancréatique est possible et doit être dirigée par un drainage efficace), le pronostic est encore plus sombre que celui des tumeurs céphaliques.
Le traitement médical
En cas d'échec de la pose d'une prothèse endoscopique métallique expansive, la voie percutanée transhépatique peut être tentée. La complication principale est le sepsis sous forme d'angiocholite, mais au total la prothèse biliaire donne des résultats comparables à ceux de la chirurgie de dérivation.
Les douleurs, inéluctables au cours de l'évolution, sont particulièrement vives dans les tumeurs corporéales par atteinte du plexus cliaque et nécessitent l'emploi des morphiniques.
La radiothérapie externe à la dose de 20 Gy est efficace dans 50 % des cas environ.
Les blocs coeliaques par alcoolisation sous contrôle scanographique soulagent très rapidement et sont reproductibles.
L'association d'une radiothérapie externe à une chimiothérapie utilisant le 5-fluoro-uracile ou la gemcitabine a une action favorable mais peu durable sur la prolongation de la survie.
Pronostic très sombre
Le pronostic du cancer du pancréas reste très sombre, même si les progrès de la chirurgie et de la réanimation ont permis des exérèses moins risquées chez des sujets plus âgés, et si la pratique des prothèses cholédociennes a amélioré la « palliation » de l'ictère et du prurit.
Références
1) Dong Il Park et coll., The analysis of resectability and survival in pancreatic cancer patients with vascular invasion. « J Clin Gastroenterol », 2001 ; 32(3) : 231-234.
2) Coopermann A. M., Kini S., Snady H., Bruckner H., Chamberlain R. S. Current surgical therapy for carcinoma of the pancreas. « J Clin Gastroenterol », 2000 ; 31(2) : 107-113.
3) Warshaw A. L., Fernandez-del Castillo C., Pancreatic carcinoma « N Engl J Med », 1992 ; 326 : 455-465.
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