On a beaucoup de mal à comprendre que les taliban aient été tellement attachés à Oussama ben Laden qu'ils aient attiré sur leurs têtes un enfer de métal et de feu.
Ils peuvent, pour les mêmes raisons que les siennes, qui demeurent pratiquement insondables, haïr l'Amérique. Ils peuvent rêver d'un monde désoccidentalisé où régnerait leur ordre mystique, où la femme est une bête répugnante qu'il faut cacher et asservir. Ils peuvent avoir cru, après les attentats, à une vulnérabilité inespérée des Etats-Unis. Mais George W. Bush leur a mis en main un marché dont ils ont fort bien compris à quoi il les exposerait s'ils le refusaient.
Deux ou trois jours avant les raids, ils ont d'ailleurs laissé percer un désarroi qui les rendait presque humains : ils ne savaient plus où était Oussama ben Laden, il avait quitté l'Afghanistan, et puis non, il y était resté et ils ne le livreraient pas. Puis, sous une pluie de bombes, ces hommes, qui exécutent une femme quand elle montre sa cheville, ont libéré la journaliste anglaise Yvonne Ridley, comme si le cadeau inespéré qu'ils faisaient ainsi aux Britanniques avait la moindre chance d'inverser leur sort.
Cependant, même si l'unique projet islamiste du XXIe siècle était de convertir l'Occident chrétien à la religion musulmane, la très grave blessure infligée à l'éléphant américain par Ben Laden et ses sbires aurait dû logiquement les faire reculer d'épouvante, et réagir un peu comme les complices d'un criminel dépassés par la monstruosité de son acte. Non. Après avoir tergiversé, ils ont décidé de répondre par l'arrogance.
Il est vrai qu'ils ont trouvé dans le monde musulman le soutien de foules surexcitées et que les gouvernements arabes sont affreusement inquiets de la réaction de leurs opinions publiques. Il est vrai qu'ils pouvaient compter sur cette poignée d'inconscients qui, de l'Italie aux Etats-Unis, ont manifesté contre les frappes américano-anglaises. Il est vrai qu'ils ont leur propre théorie du chaos et que, s'ils sont capables de déstabiliser durablement et les pays arabo-musulmans et les sociétés occidentales, ils estimeront avoir fait du bon travail.
Mais ils risquent bel et bien d'être laminés par le bulldozer américain, de disparaître dans le maelström qu'ils ont appelé de leurs vœux. De ce point de vue, ils ne sont pas différents des dix-neuf terroristes qui ont péri dans les attentats. C'est le principe du scorpion : tant pis si je me noie dès lors que j'entraîne la grenouille avec moi.
Chez nous, le débat est largement ouvert sur l'islam - à ne confondre sous aucun prétexte avec l'islamisme. Mais nous n'en sommes pas moins restés bouche bée quand des « beurs » ont sifflé la Marseillaise lors du match France-Algérie, lorsque les micros-trottoirs de la télévision nous montrent des jeunes gens qui témoignent de leur admiration pour Ben Laden. Le choc est rude pour tous ceux qui croient à l'intégration, mais se demandent aujourd'hui si des citoyens qui bafouent la République et ont le droit de vote en même temps ne vont pas un jour créer un Etat dans l'Etat et démolir quelques petites choses auxquelles nous sommes très attachés, comme la démocratie, la laïcité et la séparation de l'Eglise et de l'Etat.
C'est sûr ; s'ils en sont là, c'est que nous n'avons pas su les intégrer. S'ils sont conquis par des thèses obscurantistes, c'est que nous n'avons pas su leur faire partager nos convictions, et encore moins notre mode de vie.
Mais le problème, aujourd'hui et maintenant, c'est que nous n'allons pas les récupérer de sitôt. Il suffit, pour le savoir, de regarder ces reportages à la télévision qui nous montrent des sectes musulmanes occupant des locaux dans la région parisienne et dont les membres refusent de regarder dans les yeux la dame-journaliste, sous le prétexte qu'un bon musulman n'échange pas de regard avec une femme. Où sommes-nous ? Et à quels dangers sommes-nous exposés dans l'immédiat si des sujets de la République ne reconnaissent pas un crime contre l'humanité ?
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