15° congrès mondial de Sexologie 24-28 juin 2001 à Paris

L'espérance de vie sexuelle des plus de 50 ans s'est améliorée en vingt ans

Publié le 20/09/2001
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La France est l'un des rares pays (avec la Finlande) à avoir mené dès 1972 une étude sur les comportements sexuels des plus de 21 ans. Le Dr Pierre Simon (1), gynécologue, fondateur du planning familial, est à l'origine de la première étude qui a été effectuée dans un contexte de diffusion de la contraception orale et de la légalisation de l'IVG, époque pendant laquelle l'influence de la connaissance scientifique sur l'évolution de la sexualité était analysée.
En 1993, l'étude menée par le Pr Alfred Spira (2) sur demande gouvernementale concernant les 18-69 ans avait davantage une vocation de santé publique, avec pour objectif précis la mise en place de mesures préventives dans le cadre du SIDA.
Cette seconde enquête, à l'inverse de la première, ne considérait pas le caractère hétérosexuel comme évident dans les comportements sexuels mais prenait également en compte le multipartenariat et l'homosexualité ; cela correspond à une évolution significative des comportements sexuels.
Malgré les différentes motivations qui ont présidé au déroulement de ces deux études, les résultats sont comparables pour les principaux indicateurs étudiés :
•  Age moyen du premier rapport sexuel :
- 1972 : 17,8 ans pour les hommes et 18,8 ans pour les femmes ;
- 1993 : 17,2 ans pour les hommes et 18,1 ans pour les femmes.
Pour les deux sexes, on constate une légère diminution de l'âge moyen du premier rapport sexuel.
•  Nombre de partenaires sexuels (moyenne) au cours de la vie :
- 1972 : 11,8 partenaires pour les hommes contre 1,8 pour les femmes ;
- 1993 : 12,1 partenaires pour les hommes contre 3,2 pour les femmes.
On observe une augmentation significative du nombre de partenaires pour les femmes en vingt ans. Contraception orale, féminisme, libération des mœurs ne sont sans doute pas étrangers à cette évolution mais, comme le souligne Alain Giami, il faut rester prudent dans l'analyse des résultats car ces enquêtes s'appuient sur des déclarations de comportements sexuels en réponse aux questionnaires établis pour les différentes enquêtes. Des chiffres équivalents pour les hommes et pour les femmes sont retrouvés lorsque la question concerne les douze derniers mois.
•  Nombre moyen de rapports sexuels au cours du dernier mois :
Entre 1972 et 1993, les chiffres retrouvés sont stables : 8 pour les hommes et 7 pour les femmes.
•  Déclaration de la pratique de la pénétration anale au moins une fois dans sa vie :
- 1972 : 24 % pour les hommes et 16 % pour les femmes ;
- 1993 : 30 % pour les hommes et 24 % pour les femmes.
Une forte minorité d'hétérosexuels la pratique alors que les homosexuels ne la pratiquent pas systématiquement ; il s'agit là, selon l'analyse d'Alain Giami, d'un fantasme croisé entre les homosexuels et les hétérosexuels. Lorsque l'on questionne l'ensemble des individus sur cette pratique au cours du dernier rapport sexuel, 6 % des hommes et 3 % des femmes affirment l'avoir pratiquée. Ce n'est donc pas un comportement sexuel très fréquent.
•  Relation sexuelle après 50 ans :
- 1972 : 36 % des hommes déclaraient ne pas avoir eu de relations sexuelles depuis un an contre 66 % des femmes ;
- 1993 : 11 % des hommes contre 28 % des femmes n'ont pas eu de relation sexuelle (d'expérience sexuelle) depuis un an.
« Il existe une évolution significative sur deux décennies de l'espérance de vie sexuelle qui est liée à une amélioration de l'espérance de vie sans handicap, sans incapacité », affirme Alain Giami.
• Pratiques contraceptives :
- 1972 : 30 % des hommes et 21 % des femmes déclaraient utiliser le préservatif comme moyen contraceptif ;
- 1993 : 9 % des hommes et 4 % des femmes l'utilisent toujours de cette façon.
Pour la contraception orale, on observe un renversement de la tendance : en 1972, 10 % des hommes et 8 % des femmes disaient utiliser la contraception orale comme méthode contraceptive ; en 1993, les hommes et les femmes déclarent utiliser les contraceptifs oraux beaucoup plus fréquemment, de l'ordre de 28 %.
L'une des réserves formulées par Alain Giami est de dire que l'évolution de la sexualité ne s'arrête pas à la déclaration des comportements sexuels. On constate néanmoins, selon lui, que le préservatif est tombé en désuétude comme moyen de contraception, mais que, en revanche, il est devenu la méthode de prévention des maladies sexuellement transmissibles.

D'après un entretien avec Alain Giami, directeur de recherche, INSERM U292.
(1) Simon P., Gondonneau J., Mironer L., Dorlen-Rollier A.-M. (1972). « Rapport sur le comportement sexuel des Français », Paris, Julliard, Charron.
(2) Spira A., Bajos N., Groupe ACSF (1993). « Les Comportements sexuels en France », Paris, la Documentation française.

Dr Sylvie LE GAC

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6972