Les vaccins selon le Dr Choux…

Publié le 02/10/2017
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En lisant l’article du Dr Choux dans le quotidien n° 9603 du 21 septembre 2017 « La vaccination selon Macron… », je me permets de réagir sur trois points.

1) Selon lui, les vaccins qui devraient être rendus obligatoires début 2018, contiennent la vaccination contre la grippe. D’où tient-il les renseignements ? Ne se trompe-t-il pas entre l'Hæmophilus influenzae b, bactérie responsable de la grande majorité des méningites bactériennes des enfants de moins de 5 ans, et le Myxovirus influenzae (virus de la grippe).

Quoi qu’il en soit les études montrent une baisse importante et une stabilisation de l’incidence des méningites à Hæmophilus influenzae b depuis l'avènement du vaccin, au milieu des années 90. Cela montre le grand intérêt de cette vaccination.

2) Cela va coûter 22 milliards d’euros, deux fois plus que les dégâts d’Irma (Ouah ! Frappons fort avec des phrases chocs et comparons ce qui n'est pas comparable, bien sûr).

Je pourrai être d'accord avec lui en considérant que nous partons de zéro mais là encore, il ne s'agit que de récupérer les quelques parents négligents ou vaccino-septiques en imposant ses vaccinations avant l'entrée à l'école. Et nous ne partons pas de zéro. Selon une étude de l'Institut de veille sanitaire en 2014, la couverture vaccinale en France des enfants de 24 mois pour le DT Polio est de 91 %, celle de la coqueluche de 91 %, de l'Hæmophilus influenzae b de 89 %, de l'hépatite B de 78 % (avec une nette augmentation puisqu’en 2008 elle n'était que de 47 %), des infections invasives à pneumocoques de 89 %, de la rougeole-oreillons-rubéole de 90 % et enfin de la méningite à méningocoque C de 57.6 %.

Le surcoût engendré par le rattrapage des non-vaccinés ne devrait pas coûter les 22 milliards d’euros annoncés. En admettant 800 000 naissances par an, en retirant le coût annuel déjà dépensé pour les vaccinations effectuées (selon les pourcentages indiqués ci-dessus) et en considérant que nous utilisons l'hexavalent, je me suis exercé à calculer le surcoût annuel que cela engendrerait si on vaccinait la totalité des nourrissons contre les 11 bactéries et virus précités. Il serait de 49 millions d'euros, chiffre évidemment très éloigné des 22 milliards annoncés (ne pas confondre le surcoût occasionné par cette réforme avec le montant de 3,2 milliards d'euros annuel que représenterait le prix payé pour vacciner l'ensemble des nourrissons).

On pourrait retirer de cela ce que coûterait annuellement un enfant ayant des séquelles neurologiques après une encéphalite rougeoleuse, celui des hospitalisations en réanimation des nourrissons en détresse respiratoire suite à une coqueluche, celui des hospitalisations pour des nourrissons ayant contracté une méningite à Hæmophilus influenzae b… sans compter les différentes consultations inéluctables par la suite en médecine de ville.

Personnellement, je préfère voir mes jeunes patients pour les vacciner plutôt que pour gérer les séquelles de ces terribles maladies… En France, 10 personnes sont décédées de la rougeole entre 2008 et 2016, toutes n’étaient pas vaccinées. 10 vies perdues alors que l'on disposait de moyens efficaces et sans danger de les éviter !

Pour les vaccino-septiques, quelques pistes de réflexion :

- À l'échelle de la vaccination en France, les quelques cas d'effets secondaires graves réellement confirmés ne devraient pas plutôt être des milliers ?

- La balance bénéfice-risque n'est-elle pas largement en faveur de la vaccination ?

- Pour mes confrères peu enclins à vacciner, ne doit-on pas adapter notre activité aux données actuelles de la science ? Encore une fois, quand vous traversez une route, n'y a-t-il pas un risque de vous faire renverser par un véhicule ? Pourtant, vous faites attention mais vous la traversez quand même… Ne confondons donc pas principe de précaution et immobilisme, sinon nous serions toujours à l'âge de pierre ou encore du mauvais côté de la route.

3) Enfin, pour la vaccination contre la tuberculose. Elle était obligatoire en France jusqu’en 2007. Nous étions parmi les derniers en Europe à vacciner de façon systématique nos nourrissons. L’intérêt majeur de cette vaccination était la protection non pas contre la forme pulmonaire de la tuberculose mais contre la forme méningée (méningite tuberculeuse). Avec la disparition complète de cette dernière et l’incidence faible de la tuberculose en France, nous sommes passés de « obligatoire » à « fortement recommandé » pour les enfants résidants dans des zones à risques, notamment l'Ile-de-France et la Guyane. Y a-t-il eu du nouveau pour envisager de la remettre parmi les vaccinations obligatoires ? En tout état de cause ce type d’articles (« Les vaccins selon Macron… ») entretiennent la peur et le doute chez les patients et compliquent notre travail de fond au quotidien. 

Dr David Boulanger, Rieulay (59)

Source : Le Quotidien du médecin: 9606