« Le seuil de 0,70 g/l pour le LDL-cholestérol est arbitraire car ne repose sur aucune donnée de la littérature – par exemple dans l’étude CARDS, la moyenne du LDL-c se situe à 75 mg/l, mais elle est à 77 mg/l dans l’étude TNT », avance le Dr Bruno Vergès (CHU du Bocage, Dijon). Pour l’endocrinologue, « la nouveauté est que les études récentes montrent bien que, contrairement à ce qu’affirme le dogme " Haffner " (1), le risque cardiovasculaire (RCV) d’un diabétique de type 2 en l’absence d’antécédent coronarien n’est pas identique à celui d’un sujet non diabétique en post-infarctus et en prévention secondaire ». La traduction -généralement admise- qu’un diabétique, avant même d’avoir présenté un accident CV doit être considéré en prévention secondaire et qu’on doit donc lui appliquer toutes les thérapeutiques (statines, IEC, ARA II…) et mesures préventives en particulier concernant les lipides est aujourd’hui remise en cause. « Plusieurs études épidémiologiques et méta-analyses récentes ont non seulement atténué mais contredisent ce premier jugement issu des études Haffner et autres, précise-t-il. Notamment la méta-analyse CTTC parue dans le Lancet en 2008 et où le risque d'événements CV majeur pendant les 4,3 années de suivi est de 9,3 % chez les patients diabétiques et de 8,4 % chez les non diabétiques. Ainsi le risque CV, chez les patients diabétiques est augmenté par rapport aux sujets non diabétiques, mais pas de façon majeure. L’étude canadienne de Booth corrobore ces faits ». Dans cette étude, les personnes diabétiques de moins de 40 ans ne sont pas à haut risque cardiovasculaire, c’est pourquoi l’âge doit entrer en ligne de compte dans la cible de réduction du risque chez les diabétiques. Dans l’étude HPS (Heart Protection Study), le risque relatif chez un diabétique tout venant sans antécédent CV est de 18,6 et de 22,5 chez un patient tout-venant avec antécédent CV. Les chiffres de la Nurse Health Study vont dans ce sens, ainsi que ceux de la US Male Physician Study. « Vu la grande hétérogénéité du RCV des patients diabétiques, il est important d’en tenir compte en étudiant les facteurs de risque associés (PA, tabagisme, dyslipidémies, antécédents personnels CV, ancienneté du diabète, microangiopathie…) », conseille Bruno Vergès, « et donc d’adapter le traitement en fonction du profil de risque car un RCV peu élevé chez un patient diabétique n’implique sûrement pas d’abaisser le LDL-c en dessous de 0,70 g/l, plutôt à réserver aux sujets en prévention secondaire à très haut risque CV ». Un argumentaire assez convaincant en prévention secondaire, cependant délicat à extrapoler à l’ensemble de la population diabétique, en particulier en prévention primaire où les preuves sont moins nombreuses. Faut-il viser chez les patients diabétiques de type 2 tout-venant un taux de LDL-c inférieur à 0,7g/l afin de réduire leur risque cardiovasculaire ? « La réponse est clairement non, confirme-t-il. Tout dépend du profil de risque CV du patient diabétique. On peut ici s'appuyer sur les recommandations en vigueur : LDL-chol < 0,70 g/l si risque CV très élevé, LDL-cholestérol <1,00 g/l pour la majorité des patients diabétiques de type 2 en prévention primaire, LDL-chol< 1,30 g/l si risque CV faible (âge<40 ans par exemple) ».
(1) Haffner SM, N Eng J Med1998 ; 339 : 229-34.
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