Insuffisance cardiaque réfractaire

Les techniques de resynchronisation

Publié le 17/11/2004
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Défaillance

L' insuffisance cardiaque est un état physiopathologique au cours duquel une anomalie de la fonction cardiaque entraîne une défaillance de la pompe qui devient incapable d'assurer un débit sanguin compatible avec les nécessités métaboliques de l'organisme. Certaines de ces insuffisances cardiaques ne répondent plus au traitement médical : elles sont alors qualifiées d'insuffisances cardiaques réfractaires. A ce stade, la qualité de vie des patients est très sévèrement altérée, les obligeant à des séjours hospitaliers de plus en plus fréquents, et le pronostic vital peut être lui-même engagé.

Stimulateur

Le traitement de resynchronisation cardiaque est une nouvelle alternative thérapeutique destinée aux patients en insuffisance cardiaque réfractaire. Cette méthode consiste à implanter au patient un stimulateur connecté à des électrodes, qui envoient des impulsions au niveau de l'oreillette droite et des deux ventricules droit et gauche.

L'asynchronisme

Les bases physiopathologiques de ce traitement reposent sur la constatation de troubles de conduction responsables d'un asynchronisme mécanique. En effet, chez la majorité de ces patients, les deux ventricules ne parviennent plus à se contracter simultanément. « On a pu constater que plus la cardiopathie était évoluée plus les patients présentaient des troubles conductifs de type asynchronisme inter- et intraventriculaire », explique Philippe Mabo. Et cet asynchronisme, en entraînant une diminution supplémentaire des capacités contractiles du cœur, qui se surajoute à la maladie cardiaque sous-jacente, aggrave d'autant plus les symptômes de l'insuffisance cardiaque. Le traitement par resynchronisation cardiaque vise donc à corriger cet asynchronisme et par là même les symptômes de l'insuffisance cardiaque.

Les patients

Chez les patients atteints d'insuffisance cardiaque chronique et présentant un asynchronisme ventriculaire, les symptômes tels que l'essoufflement, la faiblesse à l'effort ou la fatigue peuvent persister malgré un traitement médicamenteux optimisé. « C'est à ces patients que s'adresse en priorité le traitement par resynchronisation cardiaque », affirme Philippe Mabo. Les patients devront donc présenter une pathologie évoluée (classe III ou IV de la Nyha), avec une fraction d'éjection inférieure à 35 % et un asynchronisme ventriculaire objectivé par des troubles conductifs et les données échocardiographiques. Enfin, les patients sélectionnés auront bien sûr bénéficié d'un traitement médical optimal préalable, ce traitement bien conduit n'ayant pas permis à lui seul le contrôle de la maladie.

Résultats

De nombreuses études hémodynamiques aiguës ont permis de montrer les effets positifs de la stimulation atrioventriculaire gauche et de la stimulation atriobiventriculaire. On obtient une augmentation significative du débit cardiaque, avec une fraction d'éjection augmentée, une fuite mitrale diminuée et une diminution des pressions de remplissage du cœur. « On a également pu mettre en évidence, comme pour les IEC ou les bêtabloquants, un effet positif sur le remodelage ventriculaire », ajoute Philippe Mabo. Par ailleurs, plusieurs études contrôlées ont évalué l'efficacité de ces techniques sur le plan fonctionnel, montrant une amélioration significative et durable des symptômes (classe Nyha, de la tolérance à l'effort et de la qualité de vie des patients en classe III ou IV). L'étude Mustic a apporté la preuve (131 patients en un an) de l'intérêt thérapeutique de la stimulation atriobiventriculaire chez les patients en insuffisance cardiaque sévère ne relevant pas de l'indication de pose d'un pacemaker. L'étude Miracle a, quant à elle, mis en évidence l'amélioration de la tolérance fonctionnelle (classe Nyha) du test de marche de six minutes et du score de qualité de vie. En critère secondaire, une diminution très sensible du nombre de journées d'hospitalisations a été démontrée.
Il apparaît donc que la resynchronisation améliore très significativement les symptômes, la tolérance à l'effort et la qualité de vie des patients en insuffisance cardiaque sévère et atteints d'une désynchronisation ventriculaire. Aussi, compte tenu de l'incidence financière et de la fréquence croissante de cette pathologie liée au vieillissement de la population, la stimulation cardiaque semble s'imposer comme une innovation indispensable pour l'avenir.

Etudes complémentaires

« Les effets sur la mortalité demeurent néanmoins encore inconnus », confie Philippe Mabo. Des études complémentaires telles que l'étude Care HF, dont les résultats seront publiés au printemps 2005, devront permettre une approche quantitative sur l'impact global de la resynchronisation cardiaque, son influence sur la mortalité totale et sur la mort subite, la morbidité et enfin les coûts de prise en charge.

D'après un entretien avec le Pr Philippe Mabo.

> PATRICIA MARTEL

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7634