LE COMPTE à rebours a commencé avant les élections aux Unions régionales de médecins libéraux (Urml) du 29 mai. Les états-majors des syndicats en lice sont en pleine ébullition puisqu’ils doivent impérativement déposer leurs listes respectives de candidats «entre le 20mars et le 30mars 2006» auprès de la Commission d’organisation électorale (COE) mise en place dans chaque préfecture de région. Les syndicats médicaux sont donc engagés ces jours-ci dans un vrai marathon semé d’embûches réglementaires et de quelques surprises.
Le Dr Eric Henry, cadre breton du Syndicat des médecins libéraux (SML), trouve «inadmissible» d’avoir été obligé de «trouver une femme médecin» afin de pourvoir un poste vacant de la COE. A la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales (Drass) de Bretagne, on explique en effet que «la préfète a demandé de remplacer une représentante des médecins libéraux qui s’était désistée par une autre femme. Elle veut que l’Etat montre l’exemple en matière de parité dans la composition de ses commissions, y compris la COE qui est très éphémère».
A la préfecture régionale de Rennes, on confirme que la préfète s’apprête à signer un arrêté en ce sens, afin de faire valoir le principe de parité hommes-femmes qui figure noir sur blanc dans le « Projet d’actions stratégiques de l’Etat en région Bretagne ». Cette exigence particulière de la préfète bretonne (non prévue par la loi de 2000 sur la parité, qui concerne seulement les scrutins de liste politiques) reste un cas unique, semble-t-il, voire «anecdotique», selon le Dr Roger Rua, secrétaire général du SML. «Si elle avait exigé la parité sur les listes, ce serait une catastrophe car il n’y a pas beaucoup de femmes intéressées par une candidature», commente avec soulagement le directeur de campagne du SML.
A la Fédération des médecins de France (FMF), le Dr Jean-Claude Régi a eu un souci d’un autre ordre. «Afin de ne prendre aucun risque (d’invalidation) , j’ai dû enlever d’une liste un médecin qui a pris sa retraite et fait depuis des lectures de radios dans un centre de dépistage, au motif que son activité n’est pas conventionnée. En revanche, un médecin retraité qui a repris une activité libérale conventionnée dans la limite de 32000euros par an est, lui, éligible!», s’étonne le Dr Régi.
Des délais très courts.
Surtout, le plus gros problème rencontré par les syndicats médicaux concerne la signature en bonne et due forme des listes de candidats pour chacun des collèges de généralistes et de spécialistes, d’autant que les délais impartis sont relativement courts. La circulaire du 20 février 2006 de la Direction de la Sécurité sociale (DSS) du ministère de la Santé oblige les syndicats à faire signer chaque liste par tous ses membres. En Ile-de-France, l’itinéraire de la liste des 60 candidats généralistes FMF-G est tracé en fonction d’horaires et de jours précis à travers Paris et les départements de la petite et grande couronne. «C’est un parcours du combattant, ironise le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF-G. Mais, après les parcours de soins coordonnés, on est rodés! Et puis, on n’a pas trop à se plaindre en Ile-de-France: il n’y a pas de zones de montagnes!»
«Plus la région est grande, plus on doit faire de kilomètres, voilà encore une inégalité!», peste le Dr Henry. «On travaille dans nos cabinets, on n’est pas des syndicalistes professionnels! On a autre chose à faire que de faire le tour de la Bretagne en voiture pour faire signer 45médecins!», s’exclame ce généraliste breton du SML. Le Dr Henry aimerait bien que certaines régions puissent déroger à la règle en se contentant de listes «accompagnées d’attestations individuelles signées» comme lors du précédent scrutin professionnel de 2000.
En début de semaine, la DSS du ministère de la Santé envoyait une nouvelle consigne visant à assouplir un peu le dispositif en proposant une solution intermédiaire : à défaut de parapher tous le même document, les médecins candidats pourraient apposer leur signature en face de leur nom sur une copie de leur liste. A charge ensuite pour le représentant de l’organisation syndicale de récupérer l’ensemble des exemplaires et de tous les signer à son tour avant de les déposer. Contrairement aux déclarations individuelles de candidature, cette solution présente l’avantage de garantir que chaque médecin a pris connaissance de la composition de sa liste et de son rang sur celle-ci. La mesure d’assouplissement envisagée par la DSS «ôte une épine du pied» au Dr Régi. Toutefois, le président de la FMF constate que «lors de sa réunion de mardi dernier, la COE d’Ile-de-France ne l’a pas acceptée». A croire que certaines COE veulent se montrer «plus royalistes que le roi», soupire le Dr Régi.
Dans le procès-verbal de sa réunion du 8 mars, la COE précise que «les listes seront présentées en un exemplaire, éventuellement sur plusieurs pages agrafées, avec signature sur chaque page du président régional du syndicat». En clair, traduit le Dr Bernard Rougier, de la Confédération des syndicats médicaux français (Csmf), «une liste de 60noms peut donc correspondre à 60feuillets, du moment qu’ils sont numérotés par ordre de présence sur la liste...». Une astuce très pratique.
Dans l’entourage du ministre Xavier Bertrand, on rappelle cependant que les élections aux unions de 2006 seront marquées par «un rappel à la règle» afin de limiter au maximum «les risques de contentieux».
Certains syndicats n’y voient d’ailleurs aucun inconvénient. «Il y a toujours un formalisme très important, si bien que les amateurs ont dû mal», lâche le Dr Michel Chassang, un brin perfide, à l’adresse des nouveaux concurrents de la Csmf dans le prochain scrutin.
A MG-France, la responsable de la campagne aux unions «s’accroche aux textes». Pour le Dr Marie-Hélène Certain, tout est une question d’organisation. «Nous organisons à MG-France des réunions de candidats par région ou par département. La tournée des popotes –au cas où les gens ne peuvent se déplacer– doit rester exceptionnelle», explique-t-elle.
Enfin, le président d’Espace Généraliste, qui arrive dans le paysage syndical après avoir fait sécession de MG-France, trouve aussi que les contraintes réglementaires lui conviennent car elles «obligent à être sérieux». Le Dr Claude Bronner «espère qu’Espace Généraliste présentera des listes dans au moins douze régions», couvrant «plus de 60% des médecins libéraux».
> AGNÈS BOURGUIGNON
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