PARMI les 2 726 victimes de la catastrophe du 11 septembre 2001, on dénombrait 343 pompiers et 60 policiers. Leur tribut ne s'arrête pas là, puisque des évaluations cliniques réalisées peu après l'événement mettaient en évidence, parmi les survivants, une forte prévalence des symptômes respiratoires, en particulier d'une toux persistante. Une étude publiée dans la revue mensuelle du Niehs (National Institute of Environmental Health Sciences) fait aujourd'hui le point sur l'impact sur un plus long terme d'une exposition à des polluants aéroportés de tous ceux, volontaires ou non, qui ont participé aux secours, au déblaiement et au nettoyage des lieux et de ceux qui résidaient près des tours au moment de la catastrophe. « L'effondrement des tours s'est accompagné de nuages de plusieurs tonnes de particules de poussière, de ciment, de fibre de verre, d'amiante, de plomb, d'hydrocarbures aromatiques et organochlorés », explique le Dr Philip J. Landrigan, chercheur au Mount Sinai School of Medecine, un des principaux auteurs de l'étude. L'amiante, notamment, a été utilisé pour l'isolation thermique de la tour nord et, en dépit du désamiantage entrepris ces trente dernières années, des centaines de tonnes ont pu être libérées.
Les douze premières heures.
Selon les premières analyses, « les conséquences sur l'appareil respiratoire, plus de deux ans après, sont d'autant plus prononcées que les sujets étaient présents près ou autour du site dans les douze premières heures de la catastrophe », commente le Dr Landrigan. Ainsi, les pompiers sont parmi ceux qui ont été les plus exposés. Sur les 10 116 qui ont été examinés, 332 présentaient une toux persistante dont la « prévalence était directement en rapport avec l'intensité de l'exposition. » Leur toux est associée à d'autres symptômes respiratoires, assez sévères pour avoir nécessité au moins quatre semaines d'arrêt de travail. De même, 23 % de ceux qui ont été soumis à une forte exposition et 8 % de ceux qui ont été soumis à une exposition moyenne souffrent d'une hyperréactivité bronchique chronique, avec déclenchement d'un spasme lors de tout contact avec des polluants comme la fumée de cigarettes ou les gaz d'échappement des voitures. « La forte alcalinité de la poussière est sûrement un facteur favorisant la survenue de cette hyperréactivité », estime le Dr Landrigan.
D'autres ont passé plusieurs mois à la réhabilitation du site. Environ un tiers d'entre eux rapporte une toux chronique qui a commencé peu de temps après leur arrivée sur le site, productive (24 % des cas) ou associée à une respiration sifflante (17 % des cas).
Dans un rayon de 1,6 km autour du site, les habitants présentent également plus de symptômes respiratoires (toux et dyspnée) que ceux qui en sont éloignés.
Enfin, de façon plus inattendue, les femmes enceintes qui habitaient à moins de dix pâtés de maisons des tours ont accouché d'un enfant de petit poids comparé à leur âge gestationnel, avec un risque deux fois plus grand que celles qui résidaient alors en dehors de Manhattan. Selon le Dr Trudy Berkowitz, une des épidémiologistes de l'étude, ce risque plus élevé serait bien en rapport avec l'exposition aux polluants. « Nous avons, précise-t-elle , éliminé le rôle potentiel qu'aurait pu jouer le stress post-traumatique dans la survenue de cet effet délétère. »
Quant aux conséquences de l'amiante, qui s'est propagé dans les premières heures avant que sa concentration dans l'air ambiant ne retombe à des niveaux normalement admis, elles devront faire l'objet d'études ultérieures, afin d'évaluer le risque éventuel de survenue de mésothéliome.
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